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Pérégrinages Philosophiques
Edition Avril 2025
Ertiamel
Ce livre est disponible sur le site de l'auteur :
http://ertia2.free.fr/
Ce site, intitulé "Pérégrinages physiques et métaphysiques"
est un ensemble éclectique de plusieurs milliers de pages, entièrement personnel et
libre de droits (dans le respect de l'auteur), tous originaux, conçus et rédigés par
Ertiamel, pompeusement passager de l'Univers :
Littéraires, poétiques, philosophiques,
des blogs citoyen (constitution, retraite, impôts)
des blogs de tout et de riens
Techniques, avec des graphes de productions photovoltaïques et de mesures mé-
téo
Techniques avec des idées innovantes
Musicales avec des partitions pour voix-piano et pour choeurs
Youtube avec une trentaine de diaporamas
Trouvailles qui ont plu à l'auteur
et un dictionnaire Espéranto
Du même auteur!:
Le petit barreau tournant par la pensée (2023 - 234 pages)
Science-fiction l'ordinateur manipulé par l'homme devient conscience artificielle. L'-
homme devient en quelque sorte la transcendance de sa créature...
Pérégrinages citoyens (2023 - 250 pages)
Réflexions d'un simple citoyen sur la Constitution, l'organisation de la gouvernance, les
«!Communs!», les retraites, la scalité, la dette publique, les risques majeurs, l'éducation,
l'énergie, l'urbanisation, la violence...
Pérégrinages (1998 - 150 pages)
Nouvelles et rêves à trois personnages
Pérégrinages futurs (2022 - 121 pages)
recueil d’anticipations, courtes et longues, en prolongement de ce que nous sommes en train
d’inventer et de ce que nous allons inventer.
Pérégrinages poétiques (2008 - 116 pages)
Pérégrinages aux intelligences (2022 - 56 pages)
Pérégrinages astronomiques (2022 - 48 pages)
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Le présent livret -Edition Juillet 2024 -
regroupe un ensemble de textes métaphysiques et philosophiques :
Un essai sur notre Responsabilité Naturelle (32 p.),
des métaphysiques pour rire, à propos de la création de notre
monde
des réflexions sur les Intelligences (37 p.),
des réflexions sur la Conscience (8 p.),
des réflexions sur la place de l'Homme dans l'Univers (3 p.)
sur une certaine Conception du monde (2 p.)
et, bien sûr, sur la Transcendance (10 p.)
Et puis deux ou trois choses encore pour rire ! ( 3 p.)
Ajouté en 2024 : Apprendre à prendre du recul ( 18p )
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Pérégrinages philoso-
phiques
https://fr.wikipedia.org/wiki/Pastafarisme
Je suis Pastafarien
et je milite dans deux des sous-groupes :
le Pastroisfoisrien
et le Pasçafaitrien.
Le Pastroisfoisrien exprime
qu'il ne faut se moquer de rien,
parce que ce n'est pas trois fois rien,
mais seulement du rien.
Le Pasçafairien exprime que tout est grave,
y compris les notes de gauche du piano
ou les pinards du Bordelais.
Ertiamel
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Table des matières générale
Métaphysique pour sourire ..................................................7
Sélections naturelles, théorie de la responsabilité ...........10
Métaphysique pour rire ......................................................60
Consciences ..............................................................................62
Pérégrinages en Intelligences ...............................................76
Passager de mon Univers ....................................................114
Quelle est votre conception du monde ? ...........................117
Transcendances .....................................................................119
Dignités ..................................................................................134
Le Génie et l'Imbécile ............................................................156
Ainsi s'érigent les murs... ...................................................160
Pour rire encore .....................................................................161
Astromologie .........................................................................163
Vue sur le fleuve de la vie et de la mort .........................165
Faux semblant / vrai semblant .........................................166
Et la colline se fit île... .........................................................168
Apprendre à prendre du recul ..........................................170
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Métaphysique pour sourire
L'homme est en marche vers la complexité.
D'aussi loin qu'on le connaisse, l'homme est parti de l'assemblage de
quelques molécules, d'une paramécie troublante de simplicité, de
quelques neurones agencés, agencés par mégarde selon les uns, par trans-
cendance, diront les autres... disons, pour ne fâcher personne, par mé-
garde transcendante.
J'aime à penser qu'un jour la transcendance s'ennuyait, regardait
ailleurs et qu'alors, sans y prendre garde, par mégarde, elle inven-
ta le sens. Elle qui était sur une infinie ligne droite, de toute éterni-
té, par mégarde, elle y mit un point, sur cette droite, le trouva joli,
trouva que ce point rompait la monotonie de l'éternel infini. La
transcendance n'aurait eu qu'un seul point, sur cette droite, le mal
n'aurait pas été fait. Un point, ça n'a qu'un diamètre infiniment
petit. De l'infiniment petit à l'infiniment grand, la transcendance
restait après tout complètement propriétaire. Un seul point n'était
pas gênant. Le zéro et l'infini n'ont ni l'un ni l'autre de représenta-
tion. Essayez donc de faire quelque chose de concret à partir du
néant ou à partir de l'infini. Rien à faire, vous avez dans la tête
une sorte de dissonance gênante. Vous avez beau tourner la chose
en tous les sens, le zéro et l'infini appartiennent à la transcendance
et à personne d'autre.
La transcendance l'avait trouvé joli, son point sur sa droite. Tellement joli,
ce contrepoint de l'éternité, que, par mégarde toujours, la transcendance
en avait posé un autre, un autre point.
Diable(sic), le mal était fait. Eh oui, parce que, entre les deux
points, vous imaginez... Entre deux points, il y a quelque chose qui
n'est plus de l'infini. Il y a une distance. On va de celui-ci à celui-là
et de celui-là à celui-ci. Dieu (re-sic), par mégarde, avait inventé le
sens.
S'en était-il rendu compte tout de suite, des conséquences de l'invention
du point!? Sans doute pas. Sinon, il n'aurait pas été jusqu'à mettre un
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point hors de son infinie ligne droite. Trois points, trois points non ali-
gnés, Monsieur Dieu, qu'est-ce que ça fait!?
Dieu, qui avait encore l'éternité pour lui, réfléchit. C'était nouveau.
On ne pouvait pas répondre n'importe quoi, il y allait de sa crédi-
bilité. On ne s'intitule pas Transcendance sans en assurer la majes-
té et bien sûr l'infaillibilité. Quoique, en n'y prenant pas garde...
Oui, Monsieur Dieu, vous avez raison, trois points non alignés définissent
une surface. Dieu immédiatement rajouta, pour montrer qu'il était plus
intelligent!: et quatre points forment un volume. Par extrapolation, dans
l'infiniment petit d'un instant d'éternité, la transcendance découvrit l'am-
pleur de la mégarde. Elle venait de créer notre univers. Première dimen-
sion le sens; deuxième dimension, la surface; troisième dimension le vo-
lume.
En fait, quelque chose le chatouillait. Installé dans son éternité,
Dieu faisait un petit blocage. Mais sa foncière honnêteté intellec-
tuelle lui fit rendre grâce. Maintenant qu'il avait inventé le point A
et le point B, la logique s'imposait. On ne peut être en même temps
en A et en B, sauf à confondre les deux points qu'il venait juste-
ment de dissocier. Sachant bien qu'il faudrait toujours un certain
temps pour aller d'ici à là, Dieu se résolut à regret à découper son
éternité.
Passé le premier instant de colère après lui-même, puis d'abattement, son
déterminisme essentiel - par essence, Dieu est déterministe - lui fit entre-
voir un univers plutôt sympa. Sûrement beaucoup de misère, avec du
bonheur en contrepartie. Il avait fallu choisir!: hors du train de l'éternité,
on a rien sans rien. Bref, Dieu, avec ses quatre dimensions, avait très vite
compris que la création de la paramécie était inéluctable.
Voilà ce que c'est que l'oisiveté. Quand on n'a pas à faire la vais-
selle, on s'ennuie, et puis on pense!! Le big-bang, c'est ça, l'univers
étouffait de trop d'ordre, il fallait bien que ça éclate...
Reprenons!: "De quelques neurones agencés, par mégarde selon les uns,
par transcendance diront les autres, on en était arrivé à combien de mil-
liards et rien ne permettait de dire aujourd'hui que ce nombre cesserait
un jour d'augmenter. Il y a toujours des paramécies, mais combien
d'autres espèces se sont bâties, milliers d'années par milliers d'années,
pour un jour arriver à l'espèce humaine, sans parler du règne végétal.
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En fait, on spécule sur des millions d'années en arrière, à partir
des indices que l'on a aujourd'hui. J'ai plutôt envie de spéculer sur
un million d'années en avant.. Et pour cela, je trace un trait d'aus-
si loin que l'on spécule sur le passé, jusqu'à aujourd'hui, et je le
prolonge, sans honte, sans peur et sans vertige. De l'atome à la pa-
ramécie, j'ai déjà fait un bout de chemin. De la paramécie à
l'homme, d'accident génétique en accident génétique, voilà une
autre étape. Aujourd'hui, le problème semble se compliquer, parce
que le facteur hasard génétique tombe dans l'océan de la
conscience humaine. Jusqu'à quand celle-ci va-t-elle protéger
l'évolution naturelle!? Cent ans, mille ans, plus...? Viendra bien
l'heure de quelques savants fous, ou d'une masse humaine submer-
gée d'angoisse, ou prisonnière d'une logique radicale. En mille ans,
des occasions ne manqueront pas.
Gageons cependant que nous resterons sur la droite de l'évolution,
tout se sera passé selon le bon vieux principe de la pérennité de l'espèce.
L'espèce humaine est comme toute autre espèce animale. Elle apprécie
plus ou moins consciemment les ressources de son territoire et s'y adapte.
Les futurologues se trompent quand ils pensent que globalement
l'homme peut réagir avec toute sa conscience pour traverser ses vicissi-
tudes. Globalement, l'homme réagit dans un inconscient collectif dont la
composante la plus forte est de se reproduire, selon l'élan vital qui l'a déjà
conduit jusqu'à aujourd'hui dans cette complexité qui ne peut que croître.
Cent mille ans après nous, la terre aura eu dix occasions d'exploser ou de
fondre. Seuls quelques cancrelats auront survécus, relançant l'évolution
sur de nouveaux chemins. Il faudra alors encore des millions d'années
pour que de nouveau l'équivalent d'une conscience humaine habite la
terre.
Quelque part en lui-même, l'homme, épris d'idéal, imagine le scé-
nario du paradis sur terre, tous les hommes, sans aucune excep-
tion, pourraient se persuader de leur immortalité, et y arriver dans
toute la plénitude de leur conscience, permettant ainsi à la trans-
cendance de reprendre ses quatre dimensions et de continuer
l'éternité comme avant.
Ertiamel
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Sélections naturelles, théo-
rie de la responsabilité
https://www.researchgate.net/figure/Reerection-de-lobelisque-du-Vatican-en-1586-in-Fontana-1590_fig20_264464339
Ertiamel
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Sélections naturelles, théorie de la responsabilité 10
Alors commence l’Histoire humaine. ...........................17
Arrive l'écriture .............................................................21
Conquérir pour gagner le ciel ......................................27
Conquérir ou périr ........................................................27
Coloniser ......................................................................29
Les luttes de pouvoir .....................................................30
Les idéologies ...............................................................31
L'activisme ....................................................................32
Les clivages ...................................................................32
Catastrophisme (collapsologie) ....................................43
Le continuum de la responsabilité. ...............................46
La dignité ......................................................................47
La bien-pensance ..........................................................51
Le libre-arbitre ..............................................................52
La responsabilités des Media .......................................54
La responsabilité des Réseaux sociaux .........................55
La Responsabilité des sciences .....................................56
Conclusion ....................................................................57
Post scriptum de mai 2020 ...........................................58
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Chaque individu est un des innombrables résultats d'une évolution que
Darwin a bien explicitée, même si certains n'arrivent ni à l'admettre, ni à
la comprendre. Cette évolution a donné une immensité des possibles, des
millions d'espèces animales, végétales et minérales différentes qui font la
richesse du monde. Et parmi cette diversité d'espèces, la diversité des
hommes est elle-même immense : chaque homme a besoin des autres
hommes pour que l'espèce humaine se pérennise.
L'évolution de type darwinienne ne s'applique pas qu'aux individus. Elle
1
s'applique aussi aux idées et aux actions. Les idées qui subsistent sont
celles qui ont émergé dans un espace intellectuel capable de les accueillir,
de les approfondir, de les diffuser. Les idées peuvent naître et s'éteindre,
se diversifier, se ramifier.
Par exemple, la civilisation antique égyptienne a perduré plusieurs
millénaires puis s'est brusquement éteinte ne laissant que quelques
braises, quelques tombeaux et hiéroglyphes qui nous font encore
réfléchir sur l'âme humaine et sur son Histoire. Quelques braises
qui ont croisées la civilisation de la Grèce antique, qui elle aussi
s'est renouvelée tout en nous léguant un énorme patrimoine intel-
lectuel. Nos philosophes invoquent Platon, Aristote et bien d'autres
pour émettre de nouvelles idées qui à leur tour transformeront un
peu ou beaucoup nos vies.
A la diversité biologique correspond la diversité des idées et des
idéologies, qui s'affrontent, se mélangent ou s'enrichissent mutuel-
lement. L'homme de Bombay et l'homme de Chicago naissent,
vivent et meurent en pensant. Leurs pensées ne se ressemblent
guère et cependant ils jouent, ils mangent, ils se reproduisent, ils se
déplacent, ils apprennent, ils travaillent, ils écrivent. Et pourtant, il
arrive parfois qu'ils se rencontrent dans une station spatiale, ou au
contraire dans un courant de nationalisme extrémiste… et cela
dure depuis des milliers d'années.
Ne pas confondre avec le darwinisme social, sorte de lamarkisme (transmission des caractères acquis et
1
justification du racisme). Peut-être vaut-il mieux parler de sélection naturelle, ici et dans le reste de cet
ouvrage!? "Le hasard, pourrions-nous dire, pourrait faire qu’une variété différât, sous quelques rapports, de ses
ascendants ; les descendants de cette variété pourraient, à leur tour, différer de leurs ascendants sous les mêmes
rapports, mais de façon plus marquée." Cette citation de Darwin précise sa théorie qui explique bien la di-
versité des espèces. Cependant vue aujourd'hui, cette sélection naturelle n'est pas strictement continue,
elle se fait principalement lors des catastrophes qui redistribuent les environnements.
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La vérité a des milliards de visages, de constructions mentales, de mèmes
qui s'entrelacent ou s'entrechoquent.
Il s'agit ici d'une histoire subjective du monde, sans prétention d'écrire
ou de ré-écrire l'Histoire.
L’Histoire de l’Univers, c’est l’affaire des scientifiques. Ils peuvent dire
que les confins de l’univers sont à plus de un million de milliards d’an-
nées-lumière l’un de l’autre, mais ils ne peuvent pas dire ce que l’on peut
trouver au-delà de ces confins ; ils ne peuvent pas dire non plus qui est
responsable de ces confins de l’espace et du temps. Qu’y avait-il avant le
Big Bang ? Qu’y aura-t’il à la mort de l’Univers ? Autrement dit qui est
responsable de tout cela, et qui est responsable du responsable!?
L’Histoire de l’Univers, résumons ce que les scientifiques en disent. Di-
sons qu’elle débute avant que les créationnistes n’interviennent. Ceux-ci
sont ethno-centrés et sanctifient les des "Ecrits", alors que l’Homme dans
l’Univers n’est qu’un epsilon d’epsilon. A l’échelle de l’Univers, l’Homme
est ridiculement petit, dans l’espace, comme dans le temps.
S’il faut bien un début, admettons une sorte de Big-bang, cette limite
théorique de notre description de l'Univers (d'après JP Uzan), un néant
qui explose, dans toutes les directions, sauf dans le temps, car il semble
que les scientifiques n’ont pas (encore ) fait l’hypothèse d’une possible
2
explosion vers l’arrière du temps. Une formidable énergie qui peu à peu
se transforme en particules, en gaz, en accrétions d’une infinie diversité
tournoyante. L’Univers semble courbe, certaines galaxies se montent en
spirale, schéma particulier de la seule loi qui veut que deux masses s’at-
tirent d’autant plus plus qu’elles sont massives. Collisions, nébuleuses,
trous noirs, tout cela prend des milliards d’années. L’Histoire de l’Univers
peut se résumer ainsi tout autant qu’elle est inépuisable si l’on veut ex-
primer la naissance de chaque étoile, de chaque planète, de chaque co-
mète, de chaque astéroïde.
Qui est gazeux, qui ne l’est pas, qui chauffe, qui transforme, qui as-
semble…
https://www.pourlascience.fr/sd/cosmologie/lunivers-avant-le-big-bang-2971.php
2
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Les scientifiques nous ont installés dans l’une des tentacules d’une ga-
laxie en spirale, composée d’une multitude d’étoiles et de nébuleuses per-
dues au milieu d’immenses vides. Mais la force de ces objets célestes est
qu’à eux tous, ils forment une entité qui semble compacte alors qu’elle
n’est principalement que du vide et sans doute de l’énergie. Minuscule
sur sa tentacule galactique, notre système solaire fait partie d’une entité
cosmique identifiable depuis ailleurs dans l’Univers. Nous sommes dans
l’Univers et cela semble magique, tout comme l’Univers tout entier est
magique, tellement magique qu’il semble du domaine de l’esprit. Quand
les hommes ne comprennent pas une chose, tant que la science avoue son
impuissance, ils la spiritualisent et fabriquent un brouillard de religions.
Les religions et l’Histoire n’ont jamais fait bon ménage : il faut un respon-
sable. Restons concrets et disons que, pour l'instant, le seul responsable
c’est le Big-Bang.
Une étoile en fusion nucléaire, c’est une énergie chaotique. Son hasard
produit des accrétions qui peu à peu s’installent dans un équilibre orbital.
L’étoile possède ou non des planètes. Résumons : la galaxie tourne dans
l’Univers, les étoiles tournent dans la galaxie, les planètes tournent autour
de leur étoile, en même temps qu’elles tournent sur elles-mêmes. L’Uni-
vers est une immensité cyclique. Le jour et la nuit, le mois lunaire, l’année
solaire, ce sont nos cycles humains fondamentaux.
L’homme en a inventé bien d’autres. Rendons hommage à Jean Baptiste
Schwilgué qui a construit le mécanisme de l’Horloge astronomique de la
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Cathédrale de Strasbourg qui montre la précession des équinoxes, obte
3-
nue à l’aide d’une roue qui fait un tour en 25 868 ans (soit un parcours de
0,7 dent en 170 ans)
Notre système solaire est une entité qui se serait formée voici 4 milliards
d’années lorsque qu’un nuage moléculaire trop grand s’est effondré par
gravité pour donner un soleil si dense que sa pression interne déclenche
la fusion de son hydrogène. Ce qui n’a pas été englouti dans l’effondre-
ment s’est mis à orbiter puis à former des accrétions de gaz et de pous-
sières grossissant lentement. Il aura fallu quelques millions d’années pour
que le système planétaire en orbite autour du soleil devienne à peu près
stable. Notre Terre a durci, sauf en son centre. Elle gigote un peu, aidée
4
par la Lune. Et l’eau est apparue à sa surface, agitant les composants pri-
maires jusqu’à générer des conditions pré-biotiques. L’Histoire ne dit pas
encore comment ont pu apparaître les premières molécules organiques,
puis les premières entités ayant la capacité de se reproduire.
Le premier biote ? Je ne sais pas, je n’y étais pas ! Mais un ou plusieurs
mécanismes ont assuré cette genèse, sans G majuscule. Et les proto-cel-
lules ont commencé à se multiplier, au hasard des environnements pro-
pices à ces réactions. Certains imaginent que ces éléments primaires de la
vie n’ont pas été générés sur notre terre, mais ailleurs dans l’univers,
5
avant que des désordres cosmiques les propagent jusque chez nous - ce
qui ne change pas le problème -. Certains y voient aussi la main d’un
Dieu (comme au football :-). Laissons la main du dieu s’agiter avant le Big-
Bang. Peut-être y a-t-il eu une autre main de dieu qui agita cette main de
dieu, l’Histoire ne saurait le dire. Face à la main d'un dieu, l’Histoire peut
retenir la pensée de Darwin et poser la question sans réponse :
6
«!Comment l'évolution darwinienne a-t-elle émergé sur la Terre, il y a 4
milliards d'années environ, dans un monde qui ne la contenait pas encore
?!»
http://astroaspach.fr/astroaspachV2/wp-content/uploads/2015/12/les-trois-horloges-astronomiques-de-
3
la-Cathedrale-de-Strasbourg.pdf
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_ici_et_la/La_terre_gigote.pdf
4
https://fr.wikipedia.org/wiki/Panspermie
5
https://fr.wikipedia.org/wiki/Origine_de_la_vie
6
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Le résultat est que les premières bactéries ont été la vie sur terre pendant
près d’un milliard d’années, jusqu’au moment où leur diversification a ex-
plosé en une myriade de solutions biologiques, des algues aux méduses,
aux fourmilières, aux êtres vivants de plus en plus complexes.
La girafe a de grandes pattes et un long cou. Brouter à trois mètres de
haut est un atout dans la survie des girafes. La girafe a développé son long
cou parce que les branches basses ne suffisaient plus à la nourrir. Seules
les girafes ayant un cou plus long que les autres girafes pouvaient subsis-
ter et se reproduire. C'est par sélection naturelle que les girafes ont au-
jourd'hui un long cou.
Cette loi s'est appliquée depuis l'apparition des premiers organismes vi-
vants. Elle s'applique toujours aujourd'hui comme les scientifiques ont pu
l'observer. Elle s'applique à l'homme, du moins jusqu'à aujourd'hui. Le
darwinisme biologique devrait laisser la place au darwinisme des idées et
de la métaphysique et les apprentis sorciers, scientifiques, spirituels ou
politiques pourraient jouer de bons et mauvais tours au genre humain,
voire à la planète entière. Par exemple, développer une population de
moustiques femelles stériles est un moyen d'éradiquer les moustiques et
les maladies qu'ils peuvent transmettre. Mais alors, que vont manger les
hirondelles ? Disparaitront-elles à leur tour, ou se transformeront-elles en
mangeuses de vers de terre ?
Dans cette infinie diversité des roches, des plantes et des animaux, nous,
les hommes, n’avons encore aucune responsabilité - sauf celle de ré-in-
venter l'Histoire - mais nous pouvons identifier pourquoi et comment
nous sommes ce que nous sommes.
De la paramécie aux poissons, des poissons aux reptiles, des reptiles aux
quadrupèdes, l'arbre phylogénétique qui illustre l'évolution est complexe,
7
comme ces oursins fascinants .
8
https://fr.wikipedia.org/wiki/Arbre_phylog%C3%A9n%C3%A9tique
7
https://fr.wikipedia.org/wiki/Echinoidea
8
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De proies en prédateurs, le monde animal - dont nous faisons partie -
évolue sans cesse. La responsabilité consciente ou inconsciente de
l'homme y est grandissante.
Alors commence l’Histoire humaine.
L’homme devrait ainsi son existence à un lointain ancêtre quadrupède
dont les descendants bipèdes ont assuré la survie. Et les descendants de
ces premiers bipèdes ont conduit à notre homme d’aujourd’hui, avec sa
faculté à comprendre la terre, à communiquer et à s’interroger sur sa
propre existence, sur la notion de famille et sur l’essence du monde.
Le genre Homo apparaît il y a environ 3 millions d'années, voire plus se-
lon certains paléontologues. Le moteur de l'évolution est l'essaimage sous
toutes ses formes, depuis les explosions cosmiques, en passant par les ré-
actions chimiques à très hautes températures et très hautes pressions qui
conduisent aux variétés minérales, par la pollinisation pour les végétaux,
par l'exogamie pour le règne animal. La procréation est naturelle. Elle
permet la pérennité de l'espèce et sa diversification, de mutation en muta-
tion, jusqu'à donner naissance à un être quadrupède qui peut marcher
sur ses pattes arrière, au profit de bras et de mains polyvalentes, qui
peut produire des sons diversifiés permettant l'élaboration d'un langage
et d'une expression parlée elle aussi polyvalente.
"Qui nomme domine". L’homme qui réussit à transmettre à
d’autres hommes un élément de langage pour désigner une chose,
un animal, un risque, une satisfaction,… se débrouille mieux
(comme la girafe qui a un cou plus long que les autres se débrouille
mieux). L’aptitude au langage est un facteur d’évolution.
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Ces caractéristiques lui confèrent une grande adaptabilité, et une capacité
à organiser son environnement et à établir des liens de parenté à l'exté-
rieur du clan, de la horde, de la tribu, du village, du pays, du continent.
Peut-on parler du gène de la diversité, qui s'exprime aujourd'hui en creux
par le tabou de l'inceste ? La sélection naturelle conduit aussi à diversifier
les forts et les faibles sur tous les plans. La musculation, la vélocité, l'habi-
leté, l'astuce, la beauté, la mémoire, l'intelligence, la créativité,… sont des
attributs de l'évolution des individus. Pour le groupe, il s'agit d'organiser
la puissance pour survivre, puis pour vivre, pour garder son territoire,
pour l'agrandir, pour se défendre, pour punir… La vie sociale stimule l'in-
telligence collective.
Quant à savoir à quel moment les hominidés ont pris conscience de leur
propre existence, la réponse suppose que soit définie les notions de
conscience et d'existence, qui suppose la compréhension du processus de
reproduction. L'Homo Sapiens aurait commencé à réfléchir il y a environ
200 000 ans, sans doute en Afrique. En Amérique, les premiers indices
d'activités humaines remontent à 20 000 ans. Hors les fresques rupestres,
les plus vieux vestiges d'organisation humaines, sous la ville de Jéricho,
remontent à environ 10 000 ans.
Depuis 200 000 ans, les hommes ont été confrontés à des choix. Ceux qui
ont survécu ont pris des décisions qui, sur le long terme, ont assuré la pé-
rennité de l'espèce. Peut-on parler de responsabilité dans leurs
décisions ? L'homme commence à être responsable de son évolution, mais
il faudra attendre notre époque pour qu'il en prenne pleinement
conscience. Auparavant, il aura fabriqué des outils, peint sur les parois des
grottes, construit des abris, élaboré des langages primitifs, imaginé des
rites, investi toutes les terres de la Terre… Ces actions plus ou moins ré-
fléchies au jour le jour ont infléchi sur le long terme le processus de la sé-
lection naturelle, comme elles infléchissent encore l'évolution humaine.
Pour protéger sa famille, l'homme s’est allié à d’autres familles pour for-
mer une tribu. Les tribus qui avaient de bonnes règles ont survécu. Celles
qui ont su s’allier entre elles ont formé un peuple, qui à son tour s’est
donné des règles en harmonie avec l’environnement. Il a fallu codifier la
naissance, la mort, la reproduction dans un univers fait de jour et de nuit,
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /18 189
de sécheresse et de tempêtes. Ceux qui ont dit : «Dieu a donné, Dieu a re-
pris», ont été écoutés plus que les autres et naturellement, les rites sont
arrivés pour confier au surnaturel tout ce l'homme ne peut expliquer. Le
Rameau d'Or de Georges Frazer est une somme énorme de rites anciens
9
et contemporains identifiés sur toute la planète. Certains rites ont subsis-
té, d'autres se sont perdus.
Parler de sélection naturelle - darwinienne - des rites est provoquant.
Pourquoi un rite subsiste-t’il ? Quelles sont les transformations qui lui ont
permis de survivre ? En posant ces questions, on attribue aux rites la qua-
lité d’un concept vivant, dont l’existence est perpétuée par un ensemble
de volontés humaines, conscientes ou inconscientes. Un être-ange nébu-
leux, en quelque sorte.
Le rite peut avoir une dimension individuelle, triviale comme par exemple
se brosser les dents tous les matins ou spirituelle, comme par exemple la
prière du soir. Cette dimension n’est individuelle qu’en apparence, car le
rite individuel est le résultat d’une pression sociétale. S'inventer des rites
intimes ou suivre les rites d'une communauté est une façon de s'ancrer
dans l'espace-temps du jour et de la nuit, des saisons, des âges de la vie,
du climat rigoureux ou au contraire doucereux, de vivre tout simplement,
par opposition à la mort. Le rite est aussi une façon de survivre dans un
monde agressif : ne pas prendre froid, se cacher du prédateur, entretenir
le feu, ne pas manger ce qui rend malade, asservir l'autre,… les actions du
quotidien se muent en rites, qui subsistent et se transforment à travers les
âges, même si la cause originelle du rite a disparu.
Le rite vécu à plusieurs est rassurant. Je me conforme au rite parce que
ceux qui vivent avec moi se conforment aussi à ce rite et que depuis des
années, ce rite fait partie de la vie de la communauté. Abolir un rite
semble pour chacun une imprudence. Ce sentiment assure la pérennité
du rite, tout autant que la pérennité de la communauté.
L'homme fut d'abord un chasseur-cueilleur, nomade vers des territoires
de subsistance, jusqu'à rencontrer la mer, barrière naturelle. Les hommes
s'agglutinent peu à peu le long des fleuves qui arrivent jusqu'à la mer. Les
tribus augmentent leur population, les territoires deviennent insuffisants,
https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Rameau_d'or
9
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /19 189
et l'homme invente l'agriculture. Il se sédentarise, se modernise et élabore
des rites au gré des besoins. L'homme a besoin du ciel, il a besoin qu'il
pleuve à la bonne saison, il a besoin de se sentir aidé pour accomplir ses
tâches quotidiennes, pour guérir plus vite, pour éviter l'intoxication médi-
cale - ou spirituelle -, pour traverser une contrée hostile… A chaque aide
qu'il réclame du ciel, il donne un nom, il élabore un rite. Et quand
l'homme ne comprend pas un phénomène naturel ou physique, il confie
au ciel l'explication qu'il n'a pas trouvé. Quand il guérit, il remercie le
ciel. Quand le malheur le frappe, il maudit le ciel… ou non ! L'homme as-
sume la responsabilité de ce qu'il peut comprendre, et il confie au ciel la
responsabilité du reste. Préventivement, il essaie de faire comprendre au
ciel qu'il a besoin de lui. Parfois - statistiquement dirions-nous aujourd'-
hui -, le rite fonctionne, l'homme y voit un dialogue avec le ciel et ren-
force le rituel, l'enrichit, le transforme au gré des époques et des saisons.
Le temps des semailles, le temps du mûrissement, le temps des récoltes
ont à voir avec le ciel, celui de la pluie et du beau temps, mais aussi celui
qui serait derrière ces manifestations étranges de la nature : la pluie, les
orages, la sécheresse, le gel, la fécondité, la maladie, la mort, les mouve-
ments de la terre,
Celui qui veut protéger sa tribu, qui veut être considéré comme le respon-
sable du groupe, doit être celui qui offre au ciel le meilleur, souvent pous-
par le religieux, celui à qui le groupe confère la mission de relier
l'homme au ciel. S'il faut tuer pour plaire au ciel, aux dieux ou au Dieu, à
l'Innommable, à l'Invisible, selon les uns ou les autres, alors sacrifions.
"La voix m'a dit de monter sur la montagne et se sacrifier mon fils, puis
elle m'a dit que je lui avais prouvé ma confiance, alors elle m'a dit de sa-
crifier un bouc à la place de mon fils." C'était peut-être une façon hono-
rable de dire à sa tribu son sursaut de raison. Faire apparaître les Tables
de la Loi comme un cadeau du Ciel est aussi une façon honorable de faire
respecter ces lois. Le ciel est responsable, c'est une manière d'exprimer
l'inconscient collectif qui, au fil des siècles, poussera l'évolution humaine.
Chaque civilisation est le produit d'une sélection sur-naturelle. La spiri-
tualité qui perdure est celle qui assure à la société son meilleur équilibre.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /20 189
Arrive l'écriture
L'homme apprend à lire les traces, celles de l'animal qu'il poursuit ou
celles de ses prédateurs, ou celles des autres hommes. Un homme peut
laisser un signe à destination d'autres hommes. Les cairns, ces petits tas
de cailloux en pyramide servent encore à baliser nos chemins de mon-
tagnes. Les signes deviennent de plus en plus élaborés, pour qu'ils soient
vus et compris par d'autres hommes,… ou par le ciel. La sépulture est au-
tant la trace d'une existence que la médiation vers le ciel. Hiéroglyphes
égyptiens, mantras dans les moulins à prière, marquages sur les objets de
cultes sont explicites. D'autres le sont moins : peintures rupestres, assem-
blages d'objet…
Le signe doit résister au temps. L'homme le grave ou découvre des pig-
ments tenaces pour l'imprimer. Sur un flanc de calcaire, le signe gravé ne
bougera pas. Sur les parois des grottes, le signe tracé il y a des dizaines de
milliers d'années nous interrogera longtemps.
L'homme apprend à compter, à formaliser les échanges de biens, à organi-
ser les travaux et les villes, à écrire les lois, à célébrer ses gloires (code
Hammurabi , 1750 av. J.C.)… Il lui faut "écrire".
10
Il y a 6000 ans, l'homme écrit ou grave sur des tablettes d'argile, sur des
omoplates, sur du bois. Il pétrit le papyrus, il affine le cuir, il utilise la cire.
Les chinois peignent leurs pictogrammes sur de la soie. 300 ans avant l'ère
chrétienne, les chinois inventent le papier à partir des plantes li
11 -
gneuses… Au fur et à mesure qu'il développe l'écriture, l'homme la per-
fectionne ; il transforme le signe en langage et en assure sa conservation
sous forme de rouleaux, puis de codex (reliures). Une petite partie du sa-
voir oral se transcrit.
Ces transcriptions se font au gré des gens de pouvoir, des gens de
sciences, des gens de religion et des poètes. Elles sont limitées, approxi-
matives. Le pouvoir veut laisser une trace de sa magnificence, de ses com-
bats, de ses lois et de ses jugements. Ce qui est écrit est trop court et trop
partial et trop peu diffusé pour refléter la réalité de l'époque. Les scienti-
https://www.histoire-pour-tous.fr/arts/627-le-code-de-hammurabi.html
10
http://cerig.pagora.grenoble-inp.fr/histoire-metiers/fibre-pate/page01.htm
11
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /21 189
fiques essaient de perpétuer leurs découvertes vraies ou fausses, les reli-
gieux s'appliquent à élaborer un cadre cohérent avec leur croyance et les
poètes enchantent le monde. Ensemble, ils construisent des civilisations.
Certaines perdurent, d'autres s'éteignent, d'autres se croisent, s'enri-
chissent ou se dévorent mutuellement. Tous ont une influence, une res-
ponsabilité. Mais cette responsabilité ne leur est pas propre, elle s'est dé-
veloppée sur le terroir de l'Histoire : ce qui se savait à l'époque, ce qui se
vivait à l'époque. Une découverte, une nouvelle idée n'est jamais totale-
ment nouvelle. Elle a germé lorsque le contexte a permis son éclosion
puis sa diffusion. Pour une idée qui fait son chemin, beaucoup
s'éteignent, puis se rallument plus tard, plus ou moins sous la même
forme si le contexte est favorable, si l'esprit humain est tenace.
Pour faire un résumé fulgurant, à l'époque d'Abraham, les prémisses du
débarquement sur la lune existaient. Eratosthène a démontré la rotondité
de la terre 3 siècles avant notre ère, même s'il est insensé de croire qu'il existe
des lieux les choses puissent être suspendues de bas en haut (Lactance
250-325 après JC, dans les Institutions divines). Il a fallu Giordano Bruno
(1548-1600) et Galilée (1564-1642) pour que l'idée s'impose au XVIIème
12
siècle et encore pas pour tout le monde .
13
Les écrits les plus anciens relatent des événements avec les mots de
l'époque ils ont été écrits, avec ce que la tradition orale a rapporté. L'-
homme qui relate un fait qu'il a directement observé n'a pas tout vu, tout
entendu, tout compris. Il est partiel et partial. Celui qui entend cette nar-
ration mémorise selon son intérêt et sa capacité d'entendement. Chacun
peut ainsi soustraire ou ajouter ou transformer. Les éléments qui
échappent à la compréhension ne sont pas cités comme tels, mais sont
"poétisés". Pour mieux se souvenir, l'interlocuteur utilise consciemment
ou inconsciemment des moyens mnémotechniques, qui pourront alors
être compris au premier degré par l'interlocuteur suivant. Ainsi, Dieu a
créé le monde en 6 jours, ainsi la Bible s'est écrite… Dans les traditions
juives et chrétienne, Moïse (personnage historique ?) aurait écrit le Penta-
teuque et le Décalogue sous inspiration divine. Chez les boudhistes ou les
https://fr.wikipedia.org/wiki/Giordano_Bruno
12
https://veriteperdue.wordpress.com/2014/10/18/la-theorie-de-la-terre-plate/
13
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /22 189
brahmanique, le monde est cyclique… Pour les sages indiens, le Veda est
un ensemble de textes révélés par l'audition. L'Islam considère que le Co-
ran a été dicté au prophète Mahomet via l'archange Gabriel. Au-delà de
l'historicité, ces textes dits révélés ont une responsabilité fondamentale
dans l'essor des civilisations. Il n'y aurait pas un homme responsable,
mais une convergence littéraire issue d'une sélection progressive des
écrits et des concepts, au gré des mémoires, des traditions, des croyances
et de l'archéologie. Le filtre n'est pas fiable.
L'écrit ancien nous raconte le déluge, les trombes d'eau, les nuées ar-
dentes, les invasions des sauterelles et des grenouilles, les pluies et les
fleuves de sang, les épidémies, les éclipses, les mouvements des astres, la
Tour de Babel, tout autant qu'il établit les généalogies réelles ou suppo-
sées. Entre Abraham qui vécut 175 ans, Moïse qui vécut 120 ans et Noé
qui vit le jour pendant 950 ans, l'écrit raconte des souvenirs qui ont eu le
temps de s'éteindre ici puis de renaître là-bas et ainsi de suite. Les souve-
nirs qui perdurent sont ceux qui ont le plus d'écho dans la suite des
siècles, dans leur forme la plus frappante.
Le scribe biblique n'est pas historien, il est conteur. Les manuscrits de la
Mer Morte semblent être les premières traces écrites (entre 250 av. J.C. et
68 ap. J.C.).
Le scribe égyptien peint les tombeaux
pendant 3000 ans afin de rendre son roi
immortel, qui raconte les hauts faits
qu'il a connu, qui recense les personnes
et les biens, établit le cadastre et calcule
l'impôt. Le scribe égyptien parle du po-
lythéisme et de la première tentative de monothéisme (Akhénaton, 1350
av. J.C.). L'épopée de Gilgamesh, en quête de l'immortalité (18ème siècle
av. J.C.) est écrite en Mésopotamie (Irak) en caractères cunéiformes sur des
tablettes d'argile.
Homère (Iliade et Odyssée, 8ème
siècle av. J.C) écrit l'épopée de la
Grèce antique sous forme de
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /23 189
chants très accommodants avec la réalité historique telle qu'on peut la
connaître, avec une large participation des dieux.
Quand le scribe biblique écrit qu'Adam a été chassé du paradis terrestre,
c'est une façon poétique de dire que l'homme est faillible, que le monde
est imparfait, tout en suggérant une transcendance et la possibilité d'un
paradis. Quand il écrit que Moïse reçoit les Tables de la Loi, c'est aussi
une façon poétique de faire intervenir la Transcendance dans l'établisse-
ment des préceptes nécessaires à un progrès social. De la même manière,
le scribe suggèrera qu'une transcendance a arrêté le bras d'Abraham pour
remplacer le sacrifice humain par le sacrifice animal. Pour certains, Dieu a
créé l'homme à son image, pour d'autres c'est l'homme qui a inventé un
dieu à son image, pour d'autres encore, ce serait blasphème que de don-
ner une forme ou un visage à la Transcendance en laquelle ils croient.
Plus prosaïquement, le scribe trouvera une façon poétique de faire inter-
venir une transcendance pour élaborer des interdits alimentaires qui
peuvent être toxiques ou pour jeûner hygiéniquement quelques jours par
an. Laissons les exégètes et les archéologues à
leur disciplines respectives.
Le scribe n'est pas non plus un scientifique. Ce
qu'il ne comprend pas relève du ciel. Si une
transcendance a créé l'Univers, il est normal de
lui attribuer ce que la science de l'époque ne
peut expliquer, en particulier les divers maux qui
accablent les hommes. C'est aussi une façon de
ne pas faire retomber les fautes sur les hommes.
Les rois, que l'on a fait rois de droit divin, ou les
prophètes que l'on a investit de la médiation avec
le ciel, échappent à leur responsabilité quand ils
font mal, mais sont loués pour l'inverse. L'homme
puissant est celui qui sait recourir aux oracles ou aux prêtres pour assurer
la médiation avec le Ciel, d'une part pour s'assurer une après-vie, au cas
où il y en aurait une et d'autre part pour montrer que le Ciel l'aide à déci-
der. Le peuple a une tendance naturelle à suivre, à charge pour le puissant
de faire taire le progrès intellectuel hors de son contrôle. Le puissant veut
avoir la science à ses cotés, à condition qu'elle ne lui fasse pas d'ombre.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /24 189
Par exemple, les empereurs chinois interdisaient aux hommes de science
de communiquer leur savoir à l'extérieur de la Cité Impériale.
Les astrologues ont eux aussi poétisé les saisons, les latitudes et les longi-
tudes. L'enfant qui naît à 7h du matin au mois de décembre à Oslo n'a
pas le même ciel que l'enfant qui nait à 22h en Juin à Djibouti. L'enfant
du froid grandira ses premiers jours emmitouflé et ne verra guère le soleil.
l'enfant des tropiques grandira dans d'autres contraintes météorolo-
giques. Cette différence se traduira un peu dans leur caractère respectif.
L'astrologue, le voyant, le devin, dont la fonction est d'être hypersensible
à l'environnement, aura, consciemment ou inconsciemment, fait le lien
entre le ciel à la naissance et le caractère de chacun. L'horloge locale est
calquée sur l'horloge cosmique. Les constellations ont leur cycle annuel,
la lune a son cycle mensuel, les planètes ont des orbites qui peuvent ren-
seigner sur l'année.
Le scribe écrit selon les besoins, des plus prosaïques aux plus spirituels.
Compter les boisseaux ou les amphores, établir les contrats, identifier les
lignées, indiquer un chemin, une méthode. Et puis transcrire ce que les
hommes ont besoin d'entendre. Ils ont besoin d'entendre le Ciel, ils ont
besoin de filiations pour mieux affirmer leur identité individuelle ou de
tribu. Parfois, un enfant naît, on ne sait ni comment, ni pourquoi ou, peut-
être faut-il en cacher le comment ou le pourquoi. Peut-être à l'époque
parlait-on d'un ange, et tout le monde comprenait et acceptait cette sur-
prenante explication ? Le scribe a retranscrit la parole des prophètes. Les
Grecs, les Egyptiens et d'autres encore sur la terre ont créé des dieux. Le
scribe nous a dit que parfois ils prenaient l'apparence d'un être humain.
Mais la multiplicité des dieux devient gênante pour exercer le pouvoir et
pour dialoguer avec le ciel. L'Homme a besoin d'un Dieu unique, les pro-
phètes le proposent. Le scribe transcrit. L'homme avait besoin d'un mes-
sie, de quelqu'un qui le relie au Ciel, à Dieu, qui certifie cette filiation. Ce
n'est pas l'ange qui a procréé, c'est Dieu.
Au Moyen-Orient, le terrain était propice, déjà défriché par les disciples
de Pythagore qui ont bâti sur lui quelques légendes : le nom de Pythagore
signifie que sa naissance a été annoncée par la Pythie. Il serait le fils
d'Apollon, capable de marcher dans les airs, avec des talents de devin et
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /25 189
de guérisseur, commandant aux animaux, il serait mort et ressuscité (cité
par Mickaël Launay dans "Le grand roman des maths"). C'était 500 ans
avant Jésus-Christ.
L'Histoire sait se répéter, les hommes savent se souvenir : l'idée a germé à
nouveau, 500 ans plus tard, l'enfant avait le Verbe, il parlait bien, il parlait
juste, du moins pour ceux qui l'écoutaient. Il est mort et aurait ressuscité.
La Genèse dit que Dieu a créé l'homme à son image, mais cela peut être
l'inverse. C'est l'homme qui a inventé un Dieu à son image, parce qu'il
avait besoin d'un rapport à la transcendance. C'est le début du Christia-
nisme.
Je fais l'hypothèse qu'un gourou, d'une visite d'un soir, qu'on
appellerait sans doute un viol aujourd'hui, a trouvé les mots justes
qui aident à vivre. Comme on a brulé les sorcières au Moyen-âge,
les romains et les juifs ont jugé et crucifié ce trublion. Son corps, ré-
cupéré par ses amis aurait été mis en un endroit sûr puis déplacé
on ne sait où. La Résurrection dont parlent les chrétiens aurait
alors été confondue avec la Résurrection de ses enseignements au
travers de ses disciples du moment qui inventèrent la notion de Fils
de Dieu ressuscité, concept bien pratique pour assurer la pérennité
de cette nouvelle poétique, en inventant ainsi une Transcendance
dont les hommes ont tant besoin. Ce n'est qu'hypothèse. Laissons à
chacun une croyance à sa manière, pour autant qu'elle respecte la
dignité humaine.
Cette poétique s'est développée d'une façon de plus
en plus élaborée, selon une sélection naturelle :
chaque idée, chaque dogme, ne subsistent que s'ils
rentrent dans le cadre voulu par ceux qui défendent
cette Filiation, s'ils sont suffisamment forts pour tra-
verser les épreuves. La religion a réponse à tout. Elle
essaime dans le temps, dans l'espace et dans la diversité conceptuelle uni-
fiée, puis ramifiée. Orthodoxes, Protestants, Maronites, Coptes,… sont des
branches adaptées aux besoins locaux. Les hérésies sont des rameaux qui
doivent mourir.
Ainsi des autres religions, qui ont germé elles aussi sur le besoin des
hommes ailleurs sur la terre et sont autant de branches métaphysiques is-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /26 189
sues d'une sélection naturelle, d'une diversité étonnante. Certaines
branches sont plus artificielles : la religion de l'argent, les théories du
complot, les idéologies,… qui ne font pas mention du Ciel, mais qui
peuvent obnubiler.
Conquérir pour gagner le ciel
Etonnants, ces pharaons qui font construire des temples dont le seul objet
est de dialoguer avec le Ciel, qui vont amasser les richesses avec lesquelles
ils entreront dans la mort. Comment ont-ils fait pour avoir à leurs pieds
des dizaines de milliers d'ouvriers et de soldats ? Comme ces empereurs
chinois qui se faisaient enterrer avec leurs soldats, comme ces épouses in-
diennes qui devaient accompagner leur époux sur le bûcher funéraire ! Le
rapport à la mort est une puissance consciente ou inconsciente qui habite
tous les hommes. Le chef affiche sa foi. Ceux qui le suivent n'ont pas
d'autres choix. Encore faut-il qu'un "illuminé" le guide vers cette foi.
Les religions d'aujourd'hui sont le résultat d'une sélection naturelle qui
agit depuis des milliers d'années. Des religions sont nées, se sont trans-
formées ou affermies. Certaines ont disparues. Comme dans la nature, il
n'y a rien de figé face à la transcendance.
Conquérir ou périr
Tant qu'on marchait à pied, le territoire se limitait ou gagnait quelques
lieues vers des terres plus clémentes, vers des cohabitations pacifiques ou
sanglantes, au jeu du plus intelligent ou du plus rusé, parfois du plus
cruel. Longtemps la force a primé le droit. Combien de tribus, combien de
peuplades ont ainsi disparu ? Quand les territoires sont devenus trop
grands, le plus fort a déléguer, a marié son fils ou sa fille pour une al-
liance de circonstance, toujours sous le signe de la religion. Les chapelles
et les châteaux ont grandi en même temps.
Dans un premier temps, le chef est celui qui agit - ou fait semblant d'agir
- qui est devant, qui anticipe, qui fait taire, qui est doué pour l'exercice.
Pour autant, a-t'il conscience de sa responsabilité ? L'Histoire nous parle
des atrocités commises pour conquérir ou conserver le pouvoir, tout au-
tant que les hauts faits d'armes - qui sont autant d'atrocités - plus souvent
pour satisfaire un ego que défendre l'intérêt collectif. Le chef a besoin des
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /27 189
autres. Le premier qui obéit a l'espoir qu'il peut à son tour devenir chef,
ou, à défaut, rester sous-chef. La hiérarchie s'installe en même temps que
les richesses se répartissent des plus riches aux plus pauvres, avec un
contrat social asymétrique le pauvre achète sa sécurité, sa survie. Le
chef renforce son statut en abritant le clerc religieux qui a la charge d'ex-
pliquer que tout est bien ainsi, que le Ciel l'a voulu. Dans le même temps,
le clerc l'aide à gagner son Ciel, tandis que le chef aide le religieux à son
prosélytisme. Les religieux ont besoin des puissants et les puissants ont
besoin des religieux. Cette osmose dilue les responsabilités. L'Histoire
peut-elle juger les pharaons ?
La Grèce antique a eu ses dieux, mais les aristocrates des premières cités
ou les démocrates athéniens semblent s'en être affranchis. Ni Socrate ni
Aristote ne font de référence aux lois divines. Mais la légende veut
qu'Alexandre le Grand soit un descendant de Zeus. Les romains avaient
leurs mânes et les dieux faisaient partie de leur quotidien. En Inde, les
poèmes épiques du Ramayana et du Mahabharata sont omniprésents
14
depuis presque 3000 ans, tandis que le Bouddhisme se répand à partir du
5ème siècle avant J.C. depuis le Gange jusqu'au Japon, autant religion que
attitude philosophique et morale.
Conquérir ou périr ont été pendant longtemps une méthode de sélection
naturelle géopolitique, embrouillée par les religions elles-mêmes sou-
mises à ce choix unique.
Pour leur part, les trois religions monothéistes ont leur naissance au
Moyen-orient et leur diaspora dans le monde entier. Il faudra attendre
1905 pour que, en France, le droit remplace la religion dans la conduite
des affaires. Peu à peu la science gagne du terrain sur l'inexplicable.
Jusque là, l'osmose entre la religion et la politique ne permet pas d'identi-
fier les responsabilités historiques. Notons seulement que les guerres
dites de religion au 16ème siècle auraient fait 3 millions de morts et que la
guerre de 30 ans au 17ème siècle, entre protestants et catholiques, aura vu
7 millions de morts (Atrocities - Matthew White - Ed. Norton - 2012).
15
Avant 1905, à la suite d'Aristote, les rationalistes apparaissent comme dé-
https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000078371_fre
14
https://en.wikipedia.org/wiki/The_Great_Big_Book_of_Horrible_Things
15
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tachés du religieux et positifs dans le progrès humain. Mais en 2018, le
prétexte religieux plus ou moins marqué subsiste!: la Bavière impose un
crucifix à l'entrée de tous les bâtiments publics et dans les salles de
classe ; les évangélistes américains ont un poids économique et moral
(créationnistes) considérable ; de nombreux pays ont une religion d'Etat…
"Dieu est aux yeux de l'enfant un personnage doté de pouvoir ex-
traordinaires et magiques, puissant et surtout invincible, qui régit
le monde et n'en fait qu'à sa tête - Etre un super-héros, c'est mettre
fin à son sentiment d'impuissance et de frustration" (Béatrice Cop-
per-Royer, psychologue clinicienne de l'enfance et de
l'adolescence). Quand l'enfant devient adulte, la vision déiste s'es-
tompe, le pouvoir est dans la connaissance.
Peu à peu, les Duchés se sont regroupés en royaumes ou en empires. L'-
Histoire nous raconte comment d'alliances en crimes d'Etat, comment de
lois saliques en héritières et régentes, les monarchies et les dynasties se
sont succédées. Puis sont nées les Républiques ou les Monarchies consti-
tutionnelles et autres formes de gouvernance. Le modèle unique de gou-
vernance n'existe pas. Chaque pays, chaque ethnie pourrait-on dire, a la
gouvernance que les événements historiques lui ont façonnée. Il semble
que peu à peu, les ethnies les plus fragiles s'éteignent, de manière irréver-
sible, tandis que naissent et meurent des communautés basées sur l'inté-
rêt économique ou intellectuel ou spirituel. Pourrait-on donc parler de sé-
lection naturelle géopolitique ?
Société des Nations, ONU, OTAN, Unesco et autres offices internationaux
émergent à leur tour mais les tous les Etats ont encore du mal à s'en-
tendre. Le nombre de conflits en cours en est l'illustration.
Coloniser
Prosélytismes religieux ou possessions économiques, les colonisations
n'étaient pas nécessaires, mais elles furent inévitables. Découvrir le
monde, c'est aussi découvrir ses richesses marchandes et une force de tra-
vail peu coûteuse et non revendicative. Il était trop tentant de considérer
les indigènes des colonies comme des sous-hommes. Citons
Montesquieu : "Les Espagnols oublièrent les devoirs de l'Homme à
chaque pas qu'ils firent dans leurs conquêtes des Indes, et le pape, qui
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leur mit le fer à la main, qui leur donna le sang de tant de nations, les ou-
blia encore davantage". Diderot, pour sa part, parle des "Barbares euro-
péens". L'esclavage a été aboli par les pays occidentaux il y a à peine 150
ans. Et la traite des humains concernerait encore 40 millions de per-
sonnes dans le monde en 2017.
16
Les décolonisations furent aussi inévitables et se firent souvent dans la
torture et dans le sang, avec tous les effets pervers qui ont abouti à dé-
structurer durablement les sociétés locales dont les dirigeants restent sous
la coupe discrète des puissances économiques mondiales et du fanatisme
religieux.
Les luttes de pouvoir
Les religieux ne sont pas cités dans les grands drames historiques. En
Chine, au 8ème siècle, la révolte de An Lushan aurait fait 36 millions de
17
mort les hommes et les femmes de pouvoir ont des responsabilités
partagées. Au 13ème siècle, on attribue aux conquêtes de Ghengis Khan,
appelé "Fils du ciel", vénéré aujourd'hui comme le père de la Mongolie,
40 millions de morts. Napoléon, auto-couronné sous les yeux du Pape, est
crédité de 4 millions de morts mais l'Histoire ne garde que les hauts faits
et oublie les basses besognes. Quant à la chute de la dynastie Ming, elle
serait due au ciel, le vrai, qui provoqua un petit âge glaciaire et une séche-
resse mortifère.
Reste à analyser le mécanisme qui fait qu'un homme (ou une femme telle
Jeanne d'Arc, ou l'épouse derrière le dictateur) ou une poignée d'hommes
arrivent à mettre la fleur au fusil de tous ces malheureux qui se retrouvent
dans les guerres. Par quel mécanisme un homme ordinaire peut devenir
un tortionnaire, un tueur légal ? Que disent-ils à leur femmes et à leurs
enfants le soir en rentrant du "boulot" lorsqu'ils ont torturé ou tué des di-
zaines d'autres hommes ? Comment le grognard peut-il aller mourir pour
son empereur, après avoir tué, pillé, voler, brulé, violé ? Pour les croisés, il
y a l'excuse de la religion, mais pour tant d'autres guerres ? Guillaume II,
Général Nivelle, Bismarck, El Assad, Mac Namara, Rumsfeld et tant
https://www.esclavagemoderne.org/rapport-recents-sur-la-teh/
16
https://en.wikipedia.org/wiki/The_Great_Big_Book_of_Horrible_Things
17
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d'autres fauteurs de guerre, qu'aviez-vous donc dans la tête ? Les circons-
tances vont ont poussé au crime, mais vous êtes un peu plus responsables
devant l'Histoire.
Le pouvoir est addictif. Plus on en a, plus on en veut, à tous prix. Celui
qui l'a veut le conserver et l'étendre, celui qui ne l'a pas encore intrigue
pour devenir calife à la place du calife. L'Histoire juge diversement les
successions de rois et d'empereurs qui ont eu à gérer un héritage immen-
sément complexe. Dans les chaînes de commandement, tous les maillons
participent à l'effort. Il suffit d'un maillon faible pour que la chaîne soit
fragilisée. Ce maillon faible est contagieux et propage sa faiblesse aux
maillons voisins. L'énergie pour compenser cette faiblesse est considé-
rable et les prises de décision deviennent hasardeuses.
Qui donc est responsable de la marche du monde, du pays, de la région,
de la ville, du quartier, de sa famille, de soi-même ? Qui peut-on blâmer
ou louer ? L'homme a besoin de pointer la responsabilité des autres, sur-
tout pour s'exonérer de la sienne. Autrefois, il rendait le Ciel responsable.
La notion de justice des hommes se confond pendant longtemps avec la
justice divine. La dernière condamnation au bûcher aura lieu en 1781
(Maria de los Dolores Lopez à Séville). Quand ce ne peut être la faute du
Ciel, il faut imaginer que la faute retombe ailleurs, sur l'étranger dans les
sociétés primitives aussi bien que dans nos sociétés dites modernes, sur
un "bouc émissaire", un homme, un groupe d'hommes, un brouillard
d'hommes, une idéologie.
Les idéologies
L'Etre suprême de 1792 à 1803 a été créé comme substitut des rituels re-
ligieux. Il aura duré 10 ans.
Lenine, Staline, Mao, Pol Pot et leurs affidés ont horriblement utilisé une
idée généreuse, trop idéale pour l'imperfection humaine. Hitler et ses
comparses auront duré dramatiquement. La poétique du peuple élu a la
vie dure. Depuis le peuple juif jusqu'au "In God we trust" des américains,
en passant par tous les racismes violents, ou par les doux rêveurs. Au cha-
pitre des idéologies, on peut aussi citer l'anti-socialisme qui a oeuvré
contre l'Amérique latine, le capitalisme libéral, politiquement correct, aux
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /31 189
responsabilités énormes mais voilées. Citons Mac Carthy, pour la chasse
aux sorcières modernes ou Mac Namara le napalmisateur ou Kissinger le
pyromane international. Combien, parmi ces hommes de pouvoir se sont
sentis responsables des désordres politiques du XXème siècle ? Curieu-
sement tous ces hommes ont encore des admirateurs. Curieusement tous
les dictateurs entraînent des fanatiques . L'homme a-t-il toujours besoin
18
de chefs de meute ? Il semblerait qu'il ait surtout besoin d'une meute,
d'une tribu, d'un groupe identitaire, comme cela a toujours été pour assu-
rer sa survie. Le déterminisme social limite sa liberté et sa responsabilité.
Dans son besoin d'identification, l'homme cherche à catégoriser, à organi-
ser des clivages, des frontières, dans tous les champs : la bulle individuelle
qui rend agressif vis à vis de ceux qui s'approchent à portée de poing, la
bulle familiale qui gère au mieux les relations de proximité, le quartier ou
le village où l'on se méfie de l'anonyme, la ville où l'on construit son équi-
libre et son pouvoir vis à vis des autres villes. Les razzias d'autrefois sont
remplacées par les compétitions sportives, la richesse de la ville se montre
avec sa culture, ses spécialités, la renommée de ses foires.
L'activisme
Pour certains, il vaut mieux sur-agir que ne rien faire. L'action d'un indi-
vidu accroit son domaine existentiel. "J'agis donc je suis !", et souvent, en
marge de sa conscience. L'activiste est pris dans un maëlstromm d'activi-
tés, souvent de moins en moins légales. Il ne se force pas, on ne le force
pas et , de façon inconsciente, son ego engage une action qui en engage
une autre… Le mécanisme est transposable à des groupes, comme à des
fourmilières, pour le meilleur comme pour le pire. Ainsi naissent les bour-
reaux ou les héros, entre activistes leaders et activistes followers.
Les clivages
Le pays devient une patrie - la terre de nos pères - qu'il faut défendre,
dont il faut marquer physiquement les limites. Encore aujourd'hui, les
murs et les barbelés illustrent l'imbécillité identitaire. Etonnamment, le
19
Voir la liste subjective des dictateurs, page 331 de "Pérégrinages citoyens"
18
Tous les murs ne sont pas stupides : http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_ici_et_la/
19
Mur_du_Millenaire.pdf
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /32 189
progrès des sciences et des techniques n’a pas conduit à unifier autour de
lui les différentes civilisations historiques existant sur notre planète.
Les coutumes et le cadre de vie ont été imprimés historiquement par le
besoin de relier la vie à une transcendance : l’hindouisme, l’islam, l’ani-
misme, l’inuit, le confucianisme, le taoïsme, le bouddhisme, le chama-
nisme, shintoïsme, le catholicisme, les protestantismes, l’église orthodoxe,
les Juifs orthodoxes, les Amish, les rites et pratiques des religions préco-
lombiennes, les séquelles des dominations communistes, les fascistes, les
anti-communistes viscéraux,
A cette diversité, j'ajouterais aujourd'hui la civilisation de la moitié des
habitants des USA dont la vision de la vie est surprenante.
Sans oublier le communautarisme alimenté par les réseaux sociaux, les
Vegans, les Pro-life, les néo-nazis et tous ceux qui règlent leur vie et leurs
pensées autour, écrasant ceux qui les côtoient sans les suivre.
Cette diversité des cadres de vie est étonnante, j’oserais dire «!miracu-
leuse!». Même ceux qui font profession de philosophie ou qui com-
prennent les principes de la mécanique quantique n’échappent pas à la
pérennisation de leur cadre de vie.
Même les échanges commerciaux, qui supposent que les hommes de civi-
lisations différentes dialoguent entre eux, n’empêchent pas les guerres, les
tortures et tous les comportements indignes, individuels ou collectifs. Le
clivage serait-il dans nos gènes ?
Comme les villes, les pays accroissent leur domaine existentiel en faisant
parler d'eux, en bien comme en mal.
Pour le bien, l'événementiel est une forme de religion qui génère des
rites, des adeptes, des fans et toute une économie vivante et parfois vi-
brante. Les Jeux Olympiques et autres championnats, la conquête spatiale,
drainent les esprits et sont facteurs de progrès. Même la venue du Pape ou
du Dalaï Lama dans un pays contribue à l'enthousiasme comme à l'apai-
sement. Un bémol : les grands tintamares qui drainent des dizaines de
milliers de fans se produisent aux détriment des petits événements cultu-
rels, sportifs, politiques ou scientifiques.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /33 189
Pour le mal, "il faut" faire la guerre, "il faut" défendre notre identité, "il
faut" défendre nos richesses, "il faut" imposer notre religion. Les fron-
tières sont physiques mais aussi sociales. Le quartier riche fait face au
quartier populaire. Quand il y a des quartiers très riches, il y a aussi des
ghettos de pauvres. Ces clivages géographiques se dessinent de multiples
manières subtiles ou brutales, à la ville comme à la campagne.
Sur Terre, 70% de non blancs, 70% de non chrétiens, cela relati
20 -
vise, cela angoisse. 6% possèdent 60% des richesses et 4,4!mil-
liards d'humains n'ont pas de services d'assainissement, cela re
21 -
lativise, cela culpabilise. Mais aussi, cela déclenche des réflexes de
protection par la violence ou par le droit. Il y aurait des guerres
justes. Non!! Une guerre est toujours absurde, c'est le lot de l'imper-
fection ontologique des Hommes.
Les chanceux peuvent faire le tour du monde en 24h et les autres
ne peuvent que marcher. Les chanceux ont le temps de penser et le
temps de l'insouciance. Les autres ont le temps de la survie.
Malgré tout, le pourcentage de ceux qui ont le temps semble aug-
menter lentement au fil des siècles. On ne parlera pas de bonheur,
car celui-ci nʼest guère définissable.
Tant qu'à relativiser, c'est du monde entier qu'il faut parler : les
êtres vivants sont d'une immense diversité et l'homme qui a du
temps n'en est qu'une infime partie. Et encore, il nʼa qu'une infime
partie du temps, car il meurt, ce passager de l'Univers. Que nos
querelles sont vaines dans ce grain d'espace-temps. Pourquoi
l'homme n'en a t'il pas conscience ?
Clivages sociétaux
Un clivage sociétal apparaît : ceux qui pensent que leur cadre de vie pour-
rait être meilleur sans la faute des autres et ceux qui pensent que la faute
des autres est aussi un peu la leur. Replacée dans un contexte historique
et universel, la responsabilité est très partagée. Du moins quelques esprits
éclairés pensent que l'homme est un être social et que c'est collective-
https://www.le-cartographe.net/index.php/dossiers-carto/monde/110-le-monde-en-quelques-statis
20 -
tiques
https://www.unicef.fr/article/21-milliards-de-personnes-nont-pas-acces-a-leau-potable-salubre/
21
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /34 189
ment qu'il construit son cadre de vie. La Société s'est dotée d'une Justice
pour canaliser cette responsabilité, éviter les lynchages, protéger les plus
faibles, adoucir les conflits… La Justice - reflet des lois - est l'expression
d'une société : ceux qu'elle respecte sont ceux que la société veut respec-
ter et ceux qu'elle enfonce sont ceux que la société veut enfoncer. La Jus-
tice engage le futur. Par exemple, la politique du tout répressif conduit au
cancer des prisons globalement plus maléfique que bénéfique à la société
tout entière. "Ce n'est pas la prison qui fabrique les détenus, c'est la société. Ils y
retourneront ! ". La Justice est aussi le moyen de rejeter la responsabilité,
de refuser le bouc émissaire, de faire face au sentimentalisme aveugle.
Il y a deux façons d’aborder la politique : l’une part de soi, en étant sen-
sible à son environnement immédiat et en étendant ses choix là où il n’y a
pas remise en cause des choix de proximité. L’autre part d’une analyse
globale en pensant que ce qui est bon pour tous sera aussi bon pour soi,
comme Montesquieu l’a si bien écrit voici 300 ans. Comment expliquer
22
qu'il y ait encore des admirateurs de Staline (le petit père des peuple),
d'Hitler, de Mao.
Clivages métaphysiques
Au plan métaphysique, si l'on écarte l'absurdité du créationnisme, chaque
penseur oscille entre deux visions de l'évolution universelle. Notre monde
est soit sur la ligne d'un Dessein Intelligent, soit sur la ligne de la Sélec-
tion Naturelle.
Sujet du bac : "On ne peut pas prouver que Dieu n’existe pas, mais
ce n’est pas une raison satisfaisante pour rendre un verdict affir-
mant qu’il existe". (auteur inconnu)
La fourmi a la faculté de choisir son chemin, mais au bout du compte, son
chemin la mène la fourmilière a décidé d'étendre une antenne qui
assure sa survie. La décision est le fruit d'informations reçues aléatoire-
ment qui globalement assure la pérennité de la fourmilière.
L'homme a un choix individuel considérablement plus ouvert que celui
de la fourmi, mais au bout du compte, son cheminement correspond à des
choix de société, qui sont le fruit d'informations aboutissant aux centres
http://ertia2.free.fr/Pages_liees/Montesquieu.htm
22
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /35 189
de décision par un cheminement imparfaitement régulé, une sorte de sé-
lection naturelle - darwinienne - de l'information et de la décision. Globa-
lement, le rameau Homo Sapiens assure sa pérennité… quelque soit son
"libre-arbitre", qu'il soit religieux ou agnostique. Pointer du doigt, au-
jourd'hui, un responsable n'aura pas grand sens mille ans plus tard,
l'Humanité sera toujours là. A moins d'un cataclysme nucléaire… Qui est
responsable d'Hiroshima : le pilote du bombardier, le Président des EU,
l'Empereur du Japon, l'inventeur de la bombe, le Chef de projet, les ou-
vriers et les scientifiques qui savaient, les fauteurs de guerre, Mac Carthy,
Staline… ? La responsabilité est collective, mais qui en porte la faute, in-
dividuellement, au plus profond de lui-même ?
Clivages scientifiques
Au plan scientifique, l'homme oscille entre la curiosité et la peur du pro-
grès, entre la conquête de Mars et "C'était mieux avant" ou "on a toujours
fait comme ça". Entre les deux, une zone grise ou la pensée collective évo-
lue peu à peu. Certains peuples, que la géographie a isolé, ont gardé leurs
coutumes durant des millénaires, d'autres ont changé à la faveur des dé-
couvertes, dont ils ont profité à outrance ou ont évolué contre leur gré.
Aujourd'hui, il semble que le trans-humanisme soit un critère de clivage,
à ceci près que la frontière entre l'humain et le trans-humain est floue et
différente pour chacun. De la prothèse dentaire aux amphétamines, en
passant par la fécondation in vitro et la modification génétique de
l'homme, la transformation de l'humain n'a pas de limite, ni de règles. Un
jour viendra les connexions entre le cerveau et l'ordinateur seront ef-
fectives, même si Rabelais nous a prévenu il y a déjà cinq siècles (Science
sans conscience n'est que ruine de l'âme !). Déjà, ce que nous appelons l'Intel-
ligence Artificielle arrive à déterminer l'orientation sexuelle probable d'un
individu à partir d'une simple photo ! Bientôt nous pourrons converser
23
avec l'avatar de notre oncle décédé, ou avec celui d'un super avocat en cas
d'assignation au tribunal ! Réalité augmentée, éternité augmentée, soldat
augmenté, la science pourrait déchirer le monde, à moins qu'un énorme
https://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/intelligence-artificielle/un-algorithme-plus-fiable-que-l-hu
23 -
main-pour-deviner-l-orientation-sexuelle-des-gens-vraiment_116423
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /36 189
orage magnétique abatte le "cloud" comme l'annoncent les collapso
24 -
logues. Ces avancées technologiques orienteront la vie de quelques-uns
qui disposeront d'un pouvoir dangereux. Par analogie, les traders et autres
spéculateurs vivent dans un monde dont les codes et les références sont
spécifiques. On ne vit pas dans un gratte-ciel comme dans une maison de
faubourg…
Clivages individuels
Au plan personnel, le clivage est entre la passion et la raison, entre le
primaire et le réfléchi. Face à l'inconnu, le raisonnement est immédiat,
fondé sur le sentiment qui vient le premier à l'esprit. Avec un peu de sa-
gesse, le raisonnement mûrit et s'enrichit des arguments des autres, par
identification aux réseaux sociaux habituels. Les génies et les imbéciles
25
ne sont pas forcément ceux que l'on croit.
Clivages éthologiques
Au plan éthologique , le clivage est submergé par la diversité physique,
26
intellectuelle, métaphysique de l’humanité, étonnante de richesse et de
promesses. A l’aune de notre environnement, il est impossible de juger les
sociétés humaines. Le système des castes en Inde, le peuple élu chez les
juifs, les peuplades totalement égalitaires en Afrique, les actionnaires cy-
niques dans les pays développés, les bien-portants ou les handicapés, ceux
qui ont accès à l’information globale et ceux qui ne connaissent que celles
de leur village. De celui qui subit une haine séculaire à celui qui l’entre-
tient, l’humanité est un tissu complexe la logique de chacun est le ré-
sultat d’un passé multiple et d’un environnement différent.
Et tout cela fonctionne : si l’espèce humaine est forte et pérenne, c’est
grâce à sa diversité, à ses extrêmes. Un peu plus d’uniformité dans nos
pulsions et nous ne serions peut-être pas ! Mais comment comprendre
la naissance des guerres, de cet inconscient collectif qui peu à peu installe
des certitudes antagonistes, entre la loi du plus fort et la sagesse du plus
intelligent ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ruption_solaire_de_1989
24
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_ici_et_la/Philae.pdf
25
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89thologie
26
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /37 189
Le sens de l'Histoire, qui veut que chaque évolution se pérennise ou
s'écroule selon son environnement, peut s'illustrer ainsi : un animal qui
vit au jour le jour de chasse et de cueillette, se redresse et commence à
sentir les relations entre les choses et les êtres, à parler, à réfléchir, à se dé-
fendre, à conquérir, à bâtir, à vivre dans un réseau inextricable d'idées,
d'inventions, jusqu'à aller sur la lune tout en affamant, en tuant, en ga-
zant, tout en vivant se sensations, de sentiments, de sentimentalisme,
d'émotions, de rires et de pleurs. De l'Homo Sapiens à Trump - tout un
symbole -, l'humanité est passée de 250 millions d'individus à 7 milliards.
Il en faut, des sages et des fous.
Clivages juridiques
Au plan juridique, la frontière entre responsabilité et morale n'est pas
simple. Ce qui est admis ici est puni de mort là. Au sein même d'une fa-
mille, la perception de ce qui est bien et de ce qui est mal est variable. Le
même homme peut avoir des idées généreuses à 15 ans et être un patron
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /38 189
cynique à 50 ans. Ou l'inverse ! Un jour, on est du coté des juges, un autre
jour, on est du coté des victimes, un autre jour on approuve la force. Dans
la société moderne, les victimes risquent de devenir coupables ou, inver-
sement, les accusés prétendent être victimes . Nous aurons la justice que
27
nous méritons. On changera de camp selon le "buzz", on pointera le bouc
émissaire, on fera plier le droit, le droit qui s'écrit chaque jour en fonction
d'une morale commune, coutumière, locale, nationale ou internationale
que le faible soutiendra et que le fort bafouera… "La loi du plus fort est
toujours la meilleure" a raillé La Fontaine. Dans ce cas, le fort est-il res-
ponsable dans l'exercice de sa force et le faible est-il responsable d'avoir
laissé faire ? Le droit écrit est comme régulateur et plus les hommes se-
ront instruits, plus ils sauront appliquer le droit et faire mûrir la morale.
"Agis de façon telle que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta
personne que dans tout autre, toujours en même temps comme fin,
et jamais simplement comme moyen" (Kant)
Clivages de gouvernance
Au plan de l'Etat, il est facile de pointer la faute. Par exemple, l'accident
doit-il être imputé à l'Etat qui n'a pas prévu que la route pourrait être
inondée par une crue millénale ? Par exemple, qui pointera la responsabi-
lité de l'Etat qui ferme une maternité dans un terroir qui se désertifie. Qui
est responsable de ce cercle vicieux ? En fait, l'Etat, c'est l'assemblée des
citoyens qui, depuis des centaines d'années, a construit une entité phy-
sique et morale, a façonné notre environnement et notre savoir. Nous
sommes tous un peu responsables mais nous préférons nous sentir plutôt
un peu irresponsables ! Tout au plus avons-nous défini des Droits de
l'Homme. Mais qui fera un procès à l'Etat pour désertification ?
Responsables mais non coupables, à l'insu de notre plein gré…!!!
La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui.
(article!4)
Clivages géopolitiques
Au plan des Etats, avec l'équilibre des terreurs (armes nucléaire de dis-
suasion, terrorisme d'Etat, terrorisme du faible au fort), avec les égoïsmes
Technique bien connue dans les prétoires. Au plan mondial, Poutine, l'agresseur, veut qu'on le consi
27 -
dère comme victime.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /39 189
commerciaux, avec des gouvernances illuminées, inconséquentes, voire
ignobles… Déjà les Etats peuvent être condamnés par des multinatio-
nales. Le droit international n'a rien à faire du droit local. Les équipes
d'avocats sont comme des armées, avec des armes virtuelles. Et pendant ce
temps, 2000 êtres humains meurent en moyenne chaque jour dans les
28
conflits entre peuples, dans les guerres civiles ou liées à la drogue et dans
les famines organisées. Qui sont les fauteurs de guerre, quelle est la res-
ponsabilité des fabricants et des marchands d'armes, quel rôle joue la fi-
nance effrénée ?
Clivages géographiques
Géographiquement, les hommes sont diversement dotés. L'économie de
survie fait face à l'économie du superflu, au milieu de désordres poli-
tiques et climatiques désespérants. Qui doit-on accuser de l'exode de mil-
lions de gens, du pillage des richesses naturelles ?
Au plan de la Planète, qui gérera le continent de plastique au large des
Caraïbes, qui donnera à boire à ceux qui meurent de soif, qui purifiera
l'air des mégalopoles et logera les habitants des périphéries déshéritées ?
Qui est responsable de ce que l'on ne fait pas ?
Clivages historiques
L'Histoire ne nous aidera pas beaucoup, tant le monde d'aujourd'hui est
différent du monde d'hier. Les leçons du passé ne passent plus.
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_citoyens/Les_coups_ne_stoppent_pas_la_vio
28 -
lence.pdf
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /40 189
Que se serait-il passé si… Par exemple si Napoléon n'avait pas existé, on
pourrait dire beaucoup de choses, sans risque, puisque le fait ne s'est pas
produit. Au mieux, il est possible de dire ce qui ne se serait pas fait à la
suite immédiate du fait historique. Le futurologue se trompe d'autant plus
qu'il se projette loin. Le futurologue dans le passé est hoaxien. Avec des
"si", on aurait pu mettre Paris en bouteille ;-)
Les leçons du passé n'ont pas de poids face à l'ubérisation rampante de la
société : taxis vers véhicules autonomes, hôtellerie et restauration chez
l'habitant, écoles privées, cliniques privées, milices privées, cultures hors
sol automatisées, justice automatisée, sans parler des colonisations et de
l'esclavage qui ne dit pas son nom.
Restera-t-il encore une administration "rentable", comme si le service pu-
blic devrait être rentable ? L'heure est à la critique dégradante des ser-
vices publics.
Clivages technologiques
Au plan technologique : la frontière entre l'homme "réparé" et l'homme
"augmenté" est grise. Donner à un aveugle une prothèse qui lui permet de
voir est une bonne chose. La caméra de la prothèse ne "voit" pas exacte-
ment le même spectre de couleur. Elle peut voir l'infra-rouge ou l'ultra-
violet, permettant ainsi à l'aveugle de voir la nuit ou voir des radiations
particulières. Au nom d'une "éthique humaniste", le fabricant doit-il s'in-
terdire une caméra à large spectre ? Le fabricant doit-il aussi s'interdire
de vendre son produit aux dermatologues , aux pompiers, aux randon
29 -
neurs nocturnes ?
Les prothèses auditives sont plus performantes que notre ouïe. L'exos-
quelette permet déjà à l'hémiplégique de monter les escaliers. Il permet
30 -
tra au déménageur de ménager son dos. Evidemment les militaires se
ruent sur l'augmentation humaine, pour le pire plus que le meilleur, mais
cela fait aussi partie de notre "éthique humaniste" !!!
https://www.maxisciences.com/ultraviolet/soleil-une-video-effrayante-devoile-les-effets-des-uv-sur-la-
29
peau_art33287.html
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_ici_et_la/2024-Exosquelettes.pdf
30
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /41 189
Nos prothèses téléphoniques sont reliées à notre cerveau par la vue, l'ouïe
et le toucher. Un jour viendra ou la prothèse téléphonique sera cette fois-
ci directement connectée à notre cerveau. Les biologistes ont réussi à as-
socier les cerveaux de deux rats. Y aura-t-il deux fous qui feront l'expé-
rience sur eux-mêmes ?
La Justice sera toujours en retard sur la technologie, rendant la responsa-
bilité encore plus diffuse. Accidents technologiques (voiture
autonomes…), erreurs médicales… feront le bonheur d'une armée de
plaignants et d'avocats en tous genres. Un formidable gisement d'emploi
se fait jour : les contrôleurs qui auront à vérifier la bonne application des
lois et des normes.
La lenteur de la Justice est garante de sa sérénité, sous réserve que
cette lenteur ne soit pas le produit d'une charge trop lourde à assu-
rer. Actuellement, il est indigne qu'un justiciable attende un juge-
ment pendant plusieurs années. Les technologies modernes pour-
raient aider : les courriels devraient assurer les échanges de pièces
(numérisées), accessibles sur serveur et permettre de lutter contre
les manoeuvres dilatoires. Les plaidoiries pourraient aussi être des
courriels annotables. Une instance (gratuite) de formation des
juges, des avocats et des justiciables à la fabrication et à l'utilisa-
tion des documents numériques pourrait aider au respect d’une
procédure moderne.
L'Algorithmie Probabiliste (IA) peut améliorer la qualité des ju-
gements, sous réserve que les données d'entrées (lois, jurispru-
dences, positions philosophiques et éthiques de la société) soient
elles-mêmes soumises à un corps de magistrats aguerris et indé-
pendants et actifs en permanence. Cette technologie de l'"open
data judiciaire " présente le grand risque d'un appauvrissement
31
de la culture juridique française et d'une normativité à l'améri-
caine qui conduit à juger selon la jurisprudence
L'IA peut être aussi un outil d'aide à la découverte de manoeuvres
à la limite de la légalité, à la mise en évidence de corruptions et
d'évasions ou de fraudes fiscales.
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Trouvailles/LeMonde-Techera-IAjustice.pdf
31
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /42 189
Chaque Tribunal devrait se doter d'un Agenda consultable sur In-
ternet.
La Justice idéale n'existe pas, mais il serait temps de l'adapter.
L'e-justice peut être un secours pour une justice à cran . La e-jus
32 -
tice ne devrait plus être un tabou, car aujourd'hui, le véritable en-
nemi de la Justice et des justiciables est le temps. Le télé-travail et
les visio-audiences sont des outils qui ne remettent pas en cause le
droit ni la dignité des justiciables, des magistrats et des avocats.
Aux inégalités économiques (très loin de notre "éthique humaniste"),
s'ajoute aujourd'hui les inégalités technologiques. Une minorité deviendra
l'homme vite réparé ou l'homme augmenté. Il y aura des sociétés vite ré-
parées et augmentées, rameau hyper-intelligent de l'évolution, tandis que
continuera le rameau naturel de l'Homo Sapiens.
Tous ces clivages se sont faits au gré des événements, initiés consciem-
ment ou inconsciemment par des hommes ou des groupes d'hommes res-
ponsables ou irresponsables. Dans un siècle, ces clivages auront changé.
Certaines catégories auront disparues tandis que d'autres auront écloses.
Qui pourra-t-on pointer du doigt ?
Catastrophisme (collapsologie)
L'Homme de Néanderthal a disparu il y a 35 000 ans, tout en laissant à
l'Homo Sapiens, que nous sommes, jusqu'à 20% de son génome. A
l'échelle de la vie sur terre, c'était hier. Y aura-t-il demain une division de
notre Sagesse (Sapiens), rameau augmenté (Homo Effrenus) versus ra-
meau naturel (Homo Sapiens Sapiens) ? L'évolution darwinienne laissera
émerger de nouvelles sociétés qui, à leur tour, disparaîtront ou engendre-
ront de nouvelles sociétés (Homo-Prothesis). Rendez-vous dans quelques
milliers d'années.
L'hyper-puissance a son hyper-fragilité. Imaginons le prochain orage ma-
gnétique de très haute intensité, qui pourrait toucher des millions d'or
33 -
dinateurs ou aboutir à la destruction totale de la distribution électrique.
https://journal.lemonde.fr/data/1146/reader/reader.html?t=1606585738308#!preferred/0/package/1146/
32
pub/1540/page/29/alb/85788
https://fr.wikipedia.org/wiki/Temp%C3%AAte_solaire_de_1859
33
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /43 189
Certains paranoïaques ont déjà leur abri anti-atomique et anti-tout… ou
presque !
Collapsus est un mot latin, récupéré par les américains dont cer-
tains se construisent des abris anti-atomiques et autres fariboles
pour se protéger des autres. La collapsologie semble un passe-
temps pour narcissiques dépressifs.
Pour en sourire, voici quelques thèmes (Wikipedia)) :
Liste non exhaustive des thèmes généraux identifiés notamment
par Pablo Servigne et Raphaël Stevens2!:
Limites thermodynamiques et frontières planétaires (early-warning
signals, regime shifts, tipping points, etc.)
Anthropologie et sociologie de leffondrement (survivalisme, imagi-
naire, violence, entraide, coopération, résilience, etc.)
Psychologie de leffondrement (émotions, deuil, déni, etc.)
Agriculture de leffondrement (conséquences de lAgriculture indus-
trielle de masse, de la monoculture, de la surpêche etc.!; permaculture,
agroécologie, jardins partagés, etc.)
Économie de leffondrement (risques systémiques, corruption, mafias,
rationnement, reboot, économie post-croissance, monnaie locale, low-
tech, etc.)
Démographie de leffondrement (modèles, chiffres historiques, etc.),
(surpopulation, dénatalité etc.)
Politique de leffondrement (failed-states, décroissance, mouvements de
la transition, mouvements insurrectionnels, etc.)
Géopolitique de leffondrement (sécurité, conflits armés, guerres du
climat pour les ressources, migrations, etc.)
Archéologie et histoires des civilisations anciennes (facteurs de déclins,
liens entre les facteurs, etc.)
Philosophie de leffondrement (éthique, paradoxes, irréversibilité, in-
certitude, catastrophisme éclairé, religions & spiritualités, risques exis-
tentiels, etc.)
Futurologie (scenarios, projections, etc.)
Santé et effondrement (épidémies, famine, médecine, systèmes de santé,
etc.)
Droit et effondrement (exemples historiques, justice, reconnaissance du
crime décocide, verrouillage/déverrouillage socio-technique, etc.)
Art et effondrement (science-fiction, storytelling, photographie, mu-
sique, théâtre, danse, arts plastiques, etc.)
La science des catastrophes n'a guère empêché les catastrophes.
Les futurologues se trompent presque toujours et c'est tant mieux.
Si l'humanité s'effondre, la terre s'en remettra. La bio-diversité est
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /44 189
pour que tout ne s'effondre pas en même temps. C'est comme
cela que l'humanité survit.
Se laisser guider par le principe de précaution, c'est construire des
murs, comme il y en a tant d'absurdes dans le monde. Mieux vaut
sourire à la vie, dire avec Rabelais "Science sans conscience n'est
que ruine de l'âme" dire le Dieu de Spinoza , et conjurer le sort en
34
avec David Gerrold :
Life is hard. Then you die. Then they throw dirt in your face. Then
the worms eat you. Be grateful it happens in that order”
que l'on peut traduire : "La vie est dure, puis vous mourrez, puis on
jette de la terre sur votre corps, puis les vers vous mangent, et soyez
heureux que tout cela se passe dans cet ordre !! :-)"
Le seuil critique de la violence ou de la délinquance ou du fanatisme est
déjà atteint dans quelques pays ou dans quelques quartiers. Saurons-nous
gérer une crise collective d'angoisse ? Sans parler des va-t-en guerre de
tous poils, de bactéries insensées,…
Les désordres climatiques auront-ils raison de nos raisons!? Saurons-nous
faire face aux déplacements massifs de population qui apparaissent déjà
ingérables!?
Une entreprise bien gérée anticipe les désastres majeurs. Pour sa pérenni-
té, elle mise sur la recherche/développement et sur la formation et régu-
lièrement elle réfléchit aux catastrophes qui pourraient la guetter. L'hu-
manité devrait en faire autant, sans attendre d'être au pied du mur pour
réagir. Le temps politique n'est pas le temps de la prévention.
De l'inconséquence à la peur du lendemain, chacun peut choisir, au ni-
veau individuel comme au niveau collectif. L'angoisse collective est très
mauvaise pour notre gène grégaire. Les corps sociaux devrait apprendre à
respirer un grand coup, à prendre du recul sur eux-mêmes et à avoir un
regard positif.
L'apocalypse inspire de tous temps. On attend le déluge, Sodome et Go-
morrhe, l'astéroïde monstrueux, l'invasion des extra-terrestres. Plus
https://www.lessymboles.com/einstein-dieu-et-spinoza/
34
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /45 189
concrètement, Jon Davis imagine un scénario progressif depuis la civili
35 -
sation d'abondance jusqu'aux dévastations par la violence!: la dépression
avec l'homme devenu incapable d'innover suffisamment pour régler les
problèmes croissants du monde en nombre et en importance. Globale-
ment les hommes, habitués au superflu, ne prennent pas conscience de
l'énormité du problème, tels la grenouille dans l'eau tiède, qui n'aura plus
la force de sauter hors de le casserole quand l'eau sera trop chaude. Alors,
les gouvernements, accaparés par les plus riches, seront débordés par
l'aide sociale aux victimes de cette dépression. Les plus riches applique-
ront la solution de pilonner les rebelles, sans gain réel. Les Etats-Unis se-
ront les premiers à s'effondrer. Les conflits régionaux deviendront inter-
nationaux, tandis que chacun se calfeutre chez soi et que les cyber-guerres
individuelles, communautaires, ou étatiques se déploient jusqu'à invalider
les réseaux d'énergie et d'information. Viennent alors les famines, les
guerres civiles et l'embrasement nucléaire. D'autres futurologues, qui, par
essence, se trompent toujours, assaisonneront le grand effondrement avec
les sauces religieuses.
A moindre échelle, Brecht a raconté la ville de Mahagonny, dans un opéra
son pessimisme démontre que l'homme a un besoin insatiable de vio-
lence.
Face à ce pessimisme, souvenons-nous que l'homme est aussi un animal.
Comme tous les animaux qui ont grandi aujourd'hui, l'animal-homme a
subsisté grâce à son instinct de conservation, grâce à des mécanismes in-
conscients qui produisent un comportement collectif d'auto-défense et de
pérennisation.
Le continuum de la responsabilité.
Le jugement hâtif simplifie la vie de celui qui juge. Le jugement de l'His-
toire ne sera jamais parfait. Entre les deux, l'homme invente les lois, en
particulier les circonstances atténuantes. La Justice demande aux hommes
de prendre du recul, aux victimes de reconnaître que l'agresseur est aussi
un être humain, et à l'agresseur de prendre conscience de la valeur de ses
actes. La Justice se bat contre les perversions, contre les corruptions,
https://www.quora.com/Will-the-Apocalypse-be-a-single-cataclysmic-event-or-will-it-unfold-over-a-
35
span-of-days-weeks-month/answer/Jon-Davis-10
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /46 189
contre les amoureux de trop d'ordre. L'Education en fait autant, pour ap-
prendre à prendre du recul, à chercher à expliquer d'où proviennent les
actes, au plus profond des hommes et de leur histoire.
La vie de tous les jours ne s'aide pas de la Justice - sauf chez les para-
noïaques -, mais tout juste d'un univers normatif. Il est normal de
conduire à gauche au Royaume-Uni et à droite dans le reste de l'Europe,
il est normal de payer son pain chez le boulanger, de ne pas gêner son voi-
sin… Doit-on légiférer pour interdire l'usage du portable pendant les
cours ? L'école est-elle désacralisée à ce point qu'il faille donner aux en-
seignants un moyen d'action juridique sur le sujet ?…
La Société semble immature : comment la faire grandir, autrement
qu'avec une infinité de lois, au milieu des nouveautés de la pensée, de
l'action et des technologies ? Chaque individu, confronté à la complexité
croissante de son cadre de vie, peine à choisir son niveau de responsabili-
dans ses actes courants comme dans son rapport à la société. Par
exemple, les victimes fragilisées d'un attentat en viennent parfois à porter
plainte pour non-assistance à personne en danger, car il leur faut désigner
un responsable. Plus courant!: la violence des parents à l'égard des pro-
fesseurs ou la violence des familles aux urgences hospitalières… A quel
degré est-on responsable du comportement de ses enfants!? Doit-on se
sentir collectivement responsable des désordres climatiques ou politiques
?…
finit la morale, commence la responsabilité ? Morale et responsabi-
lité sont des concepts élastiques que l'on peut approfondir en s'intéres-
sant à la dignité.
La dignité
Plusieurs définitions du mot "Dignité" se font face. Il ne s'agit pas ici de la
fonction éminente du dignitaire. Il s'agit du respect qu'on se doit à soi-
même ou aux autres. "Toute la dignité de l'homme est en la pensée" a
écrit Pascal, en écho au "Nosco me aliquid noscere, & quidquid noscit, est, ergo
ego sum (je sais que je sais quelque chose, celui qui sait existe, donc j'existe.)" de Gomez
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /47 189
Pereira (1554) . L'homme qui ne pense plus s'abaisse et celui qui em
36 37 -
pêche l'autre de penser s'abaisse aussi. Les parents qui éduquent leur en-
fant, les instituteurs qui éveillent à la connaissance, les scientifiques qui
découvrent, les journalistes qui informent, les médecins qui soignent,
ceux qui luttent contre la pauvreté, ceux qui s'opposent à la violence,…
tous oeuvrent pour que les hommes soient dignes. Les autres, ceux qui
sont sans scrupules, ceux qui agissent sous le joug d'un pouvoir, sont in-
dignes.
Gagner de l’argent avec de l’argent sans que ce gain soit produc-
teur d’un bien ou d’un service est indigne. Ce gain, sans doute lé-
gal, est la contrepartie d’un préjudice invisible car noyé dans le
système qui autorise la spéculation.
Le banquier qui prête de l’argent pour en récupérer les intérêts
vend un service. L’usurier ou le banquier qui prêtent à l’insolvable
sont indignes.
Le casino qui récupère la quasi-totalité des mises des joueurs vend
de l’adrénaline. Le casino qui développe l’addiction est indigne.
L’actionnaire qui reçoit un dividende reçoit la contrepartie des
risques qu’il a pris en achetant des actions. L’actionnaire qui met
ses économies au service d’un spéculateur est indigne. Le trader qui
s'inscrit dans ce système est aussi indigne. Ceux qui gèrent des
fonds-vautours ou qui profitent des sub-primes sont indignes et
rendent indignes les petits porteurs qui cautionnent leurs agisse-
ments.
Les fabricants et vendeurs d’armes ou les pétroliers qui parient sur
la guerre pour développer leur entreprise sont indignes.
Le taux et la répartition des contributions directes ou indirectes sont -
finis par le vote du budget annuel par les élus. En principe, le système est
redistributif afin que les fortunes ne restent pas concentrées toujours sur
les mêmes. Dans les faits, le système actuel tend à enrichir les plus riches
et à appauvrir les plus pauvres. Le pouvoir économique, les groupes d’in-
https://en.wikipedia.org/wiki/G%C3%B3mez_Pereira
36
Descartes a écrit le Discours de la méthode en 1637, en français, traduit en latin en 1644, avec le cé
37 -
lèbre "Je pense, donc je suis", traduit en "Cogito ergo sum"
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /48 189
térêts, ont préempter le pouvoir politique. En cela, le pouvoir économique
est indigne. Il est anonymement indigne.
Mais nous avons la responsabilité collective de cet état de fait qui, en s’ag-
gravant, risque de déclencher de plus en plus de conflits, de plus en plus
graves, avec ou sans le prétexte des religions.
Exemple : Le débat sur les retraites a lieu d’être : comment don
38 -
ner aux hommes une fin de vie dans la dignité ? La dignité, au sens
du respect qu’on se doit à soi-même autant qu’au sens du respect
de la liberté humaine.
Posé comme cela, le fondement est insuffisant, il faut aussi parler
du début et du milieu de vie, de la dignité de l’enfant à celle du
vieillard.
Le débat actuel, qui parle démographie, espérance de vie, pénibili-
té, cotisation vieillesse, est réducteur, face au débat sur une vie dans
la dignité.
Qu’est-ce que vivre dans la dignité ? Commençons par ce débat et
nous trouverons plus facilement les réponses au problème de la re-
traite.
Tant qu'il sera possible de gagner de l'argent en déforestant, en surpê-
chant, en polluant, en vendant de la drogue, en se laissant soudoyer pour
assurer l'impunité, ou en exerçant une autre activité non éthique, des
hommes sans scrupules seront là, au delà de toute dignité.
Voler des ânes aux paysans du Kenya pour en transformer la peau
en soi-disant vitalisants prisés des chinois, braconner les éléphants
pour le trafic d'ivoire, sont des pillages de l'Afrique parmi
d'autres. Ceux qui participent aux fonds de pension vautour ou
39
à toute autre action juteuse licite ou illicite sont des prédateurs ou
des charognards.
Pas-vu-pas-pris est la règle de la vie dans les sociétés dites évoluées qui
devront inventer de nouveaux métiers de contrôleur, et de contrôleur des
contrôleurs, pour autant que la société en comprenne la nécessité. Ces
fonctionnaires, publics ou privés, auront un coût croissant, qu'il faudra
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_citoyens/Retraites.pdf
38
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fonds_vautour
39
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /49 189
bien que la collectivité accepte de rémunérer par l'impôt ou par l'aug-
mentation de certains prix. Faute de ces contrôles, la corruption s'installe
à tous les niveaux. Il est encore temps de prévenir ce type de dérive. Par-
tout cela est encore possible, la transparence financière doit être une
règle de base, tout autant que la transparence des conditions de produc-
tion. La société civile doit s'encourager à rejeter ce qui pourrait à terme
lui nuire. C'est une responsabilité collective. Il est urgent que l'éducation
citoyenne motive chacun à comprendre les notions d'éthique et de digni-
té.
On sait que la guerre est indigne. Ici, c'est de l'indignité au second, voire
au troisième degré :
"Mais moi, Alfa Ndlaye, j'ai bien compris les mots du capitaine.
Personne ne sait ce que je pense, je suis libre de penser ce que je
veux. Ce que je pense, c'est qu'on veut que je ne pense pas. L'im-
pensable est cac derrière les mots du capitaine. La France du
capitaine a besoin que nous fassions les sauvages quand ça l'ar-
range. Elle a besoin que nous soyons sauvage parce que les enne-
mis ont peur de nos coupe-coupes. Je sais, j'ai compris, ce n'est pas
plus compliqué que ça. La France du capitaine a besoin de notre
sauvagerie et comme nous sommes obéissants, moi et les autres,
nous jouons les sauvages. Nous tranchons les chairs ennemies, nous
estropions, nous décapitons, nous éventrons. La seule différence
entre mes camarades les Toucouleurs et les Sérères, les Bambaras
et les Malinkès,[…] la seule différence entre eux et moi, c'est que je
suis devenu sauvage par réflexion".
Extrait de Frère d'âme, de David Diop, Seuil, page 25, cité dans le Monde du
14/09/18
La question : "Y a-t-il des guerres justes ?" n'a pas non plus de réponse.
Le général Lee pensait-il que la guerre était juste quand il fallait conqué-
rir les terres des amérindiens qui avaient l'arrogance de se défendre ? Les
ingénieurs du Rafale pensent-ils que la guerre est juste quand elle utilise
les avions qu'ils ont conçus et vendus à des démocraties ou à des peuples
tyrannisés ?
«!Tous nous voulons la paix!! Mais en voyant ce drame de la
guerre, en voyant ces blessures, en voyant tant de personnes qui ont
quitté leur patrie, qui ont été obligés de s’en aller, je me demande!:
qui vend les armes à ces gens pour faire la guerre!? Voilà la racine
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /50 189
du mal!! La haine et la cupidité de l’argent dans la fabrication et
dans la vente des armes. Cela doit nous faire penser à qui est der-
rière, qui donne à tous ceux qui sont en conflit les armes pour
continuer le conflit!!!»
Extrait du discours du Pape François du 24 mai 2014 (à méditer en 2023-24 !)
"Ce n'est pas moi, c'est l'autre" est un des moyens de se dédouaner de sa
responsabilité. Si l'autre agit mal - qu'est-ce qu'agir mal ? - il faut que je
l'en empêche!!
Peut-être faut-il cette question provocante : "Qui est le terroriste de
l'autre ? ". Qui accepterait de se sentir un peu responsable du génocide
rwandais ? Qui reconnaîtrait le terrorisme d'Etat… Celui qui ne sait pas
se mettra du coté du plus fort ou du politiquement correct, c'est humain.
Où est alors la dignité ?
La bien-pensance
Comme disait si bien Georges Brassens : " Mais les braves gens n'aiment
pas que l'on suive une autre route qu'eux". La route des braves gens est
pavée de bonnes intentions et penser comme les braves gens est une fa-
çon de ne pas se sentir responsable. Par exemple :
Howard Zinn dans Une histoire populaire des États-Unis : “le pauvre
ne pouvait espérer s'en sortir par le haut qu'en pénétrant dans le club
restreint des riches par un effort extraordinaire et avec un peu de
chance Chapitre XI, “Les barons voleurs – Les rebelles”, p.304.
Zinn cite à ce sujet un extrait très significatif de cette idéologie du self-
made man, laquelle est incontestablement liée à l'éthique protestante :
“Dans les années qui suivirent la guerre de Sécession, un certain Russell
Conwell, diplômé de l'université de droit de Yale, pasteur et auteur de
livres à succès, tint la même conférence (« Acres of Diamonds ») plus de
cinq mille fois devant différents auditoires à travers tout le pays. Il
s'adressa au total à plusieurs millions de personnes. Son message était
simple : tout le monde peut devenir riche s'il travaille assez dur ; par-
tout, si les gens voulaient bien se donner la peine de chercher, se trouvent
des « acres de diamants». Voici un extrait de cette conférence : « J'af-
firme que vous devriez être riches et qu'il est même de votre devoir de le
devenir, [...] Les hommes riches sont sans doute les individus les plus
honnêtes de la communauté. Je n'hésite pas à le dire clairement : 98%
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /51 189
des hommes riches en Amérique sont des gens honnêtes. Et c'est pour
cela qu'ils sont riches. C'est pourquoi ils reçoivent l'argent en récom-
pense. C'est également pour cela qu'ils dirigent de grandes entreprises et
trouvent un grand nombre de gens qui acceptent de travailler avec eux.
C'est parce qu'ils sont honnêtes. [...] Je compatis avec les pauvres, qui
sont pourtant bien rares à mériter cette compassion. En effet, compatir
avec un homme que Dieu a puni pour ses péchés, c'est agir mal. [...]
N'oublions jamais qu'il n'est pas un seul pauvre en Amérique que sa
propre incompétence n'ait pas maintenu dans la pauvreté."
Il semble qu'il y ait encore au XXIème siècle du monde pour apprécier
un tel discours.
Une autre façon de bien-pensance, est de se référer aux codes implicites
ou explicites du lieu social environnant. Un seul coupable est plus pra-
tique qu'un "brouillard" de coupables. Autre exemple :
La loi californienne, en matière d'incendie , ne reconnaît qu'un
seul responsable, celui qui l'a déclenché. (ce qui fait l'affaire des
assureurs qui peuvent attaquer la Distribution électrique qui peut
être le déclencheur d'incendie majeur, mais aussi ce qui dédouane
ceux qui ne veulent pas lutter contre le réchauffement climatique).
Les réseaux sociaux ont noyé la bien-pensance. Ils la démultiplient au tra-
vers des communautés de "suiveurs" - Pensée émue pour le Général de
Gaulle qui disait :" Les Français des veaux !" - Chaque communauté vir-
tuelle pointe celui ou ceux qu'ils tiennent pour responsable, jugeant
souvent avant la Justice. Le coté positif est que le débat est élargi et que
l'on est plus intelligent à plusieurs. Le coté négatif est la pensée en meute,
la bien-pensance de la meute.
Le libre-arbitre
Le libre-arbitre , la volonté humaine de se déterminer librement, au
40
contraire du déterminisme ou du fatalisme, dédouane la transcendance
qui ne pourrait être tenue pour responsable d'aucun mal moral : " Qui
voudrait ne pas posséder de mains sous prétexte que celles-ci servent
quelques fois à commettre des crimes " (Saint Augustin).
http://www.histophilo.com/libre_arbitre.php
40
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /52 189
Le libre-arbitre est la condition de la responsabilité. Se pose la question
du degré de conscience lors de la décision. Est-on "sachant" ? Est-on
"oubliant" ? Avons-nous un réel contrôle sur nos pensées et nos actions et
sur les conséquences de nos choix. Les actes de la vie courante sont le ré-
sultat d'un apprentissage à la fois conscient et inconscient. Tels nous
sommes nés, tels nous avons été éduqués - au sens le plus large - tels nous
pensons et agissons. Lorsque, avant d'agir, nous mettons en place les
structures du choix, nous poussons les limites de notre liberté, pour au-
tant que notre comportement soit sous l'emprise d'une "nature intérieure
sacrée" qui relève de l'inexplicable, comme dans les temps anciens. Au-
jourd'hui, nous comprenons peu à peu que le comportement humain est
la synthèse des réalités tangibles de nos organes internes et de notre envi-
ronnement tout autant que les animaux.
Quel a été le libre-arbitre de la rigidité de Staline ou de la folie d'Hitler ?
Etre responsable de la mort de millions d'individus signifie une pleine
conscience ! J'opterais pour l'addiction à l'action. Agir, toujours agir.
Commander, c'est agir. Il y a toujours des gens pour suivre les hommes
d'action, dans le bonheur autant que dans la cruauté. Ainsi devient-on
bourreau. Ceux qui s'engagent dans la torture s'abrite derrière un ordre
donné ou implicite de la part d'un homme d'action ou de l'affidé d'un
homme d'action qui lui-même…
Quand l'enfant demande à son père : "c'est quoi ton travail ?" et que son
père est celui qui torture dans les geôles politiques, que lui répond-il ? "
Ce n'est pas moi qui décide !". Cette réponse est-elle du libre-arbitre ? "Je
fais ce qu'il faut pour que notre pays vive en paix !". Cette réponse dit que
la fin justifie les moyens, sale manière de se dédouaner de toutes les vilé-
nies.
Quel est le libre-arbitre des "followers" dans les réseaux sociaux!? Le
premier clic d'adhésion semble léger, sans grande conséquence. Mais pro-
gressivement la dépendance s'installe et la volonté se dilue.
Dilemme du tramway (ou du véhicule autonome)
41
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dilemme_du_tramway
41
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /53 189
Vaut-il mieux écraser un homme plutôt que deux ? Dans l'absolu,
la réponse est simple. Dans le relatif, la réponse ne paraît pas évi-
dente à tous. S'il s'agit de tuer les quelques porteurs d'un virus très
dangereux pour épargner les millions de victimes de la grippe es-
pagnole, la question est aussi compliquée que la réponse ? Le cer-
veau commence à se mettre en activité. Selon la conscience de cha-
cun, il y a ceux qui préfèrent que l'on tue abondamment en Syrie,
ou en Libye,… plutôt que de voir mourir quelques soldats de chez
nous. Généralement, il y a ceux qui pensent planète et ceux qui
pensent village ou famille.
L'arrivée du véhicule autonome est l'occasion de réfléchir peu pour
certains ou beaucoup pour d'autres, de manipuler les opinions, par
exemple, à l'aide de pseudo-études scientifiques "En cas d'accident
inéluctable avec plusieurs piétons, quelle victime une voiture auto-
nome doit choisir ? ".
Question sur le sexe des anges ! Comme si l'algorithme devrait
choisir entre un PDG et un SDF, entre un gros et un maigre, entre
un homme et une femme, entre un enfant et un vieillard… entre un
noir et un blanc, entre un émigré catholique et un émigré boud-
dhiste… !!?? Sous couvert de l'utilisation d'un nouvel outil de
transport, certains chercheurs provoquent à hiérarchiser les indi-
vidus. La voiture autonome n'est qu'un nouvel outil et non pas un
fantasme. Laissons la morale en dehors de ces réflexions mal-
saines… Ou alors, il n'aurait pas fallu inventer le feu !
La responsabilités des Media
Les media sont le quatrième pouvoir. Les journalistes ont un rôle pour
déterrer les actions indignes et leurs responsables. Mais ils sont aussi les
relais qui banalisent les indignités au point que les esprits faibles les
considèrent comme acceptables. La violence au cinéma et la télévision,
l'étalage des drogues et des comportements déviants (sans vouloir jouer
les pères la morale) ne sont pas neutres.
L'environnement médiatique exonère partiellement les responsabilités
individuelles et contribue à la conscience collective qui admet peu à peu
l'évolution de la société. Le journaliste est aussi responsable que l'ensei-
gnant ou que les parents dans la construction du cadre de vie.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /54 189
Citons cet éditorial de Jacques Fauvet , dans Le Monde du 5/5/2008 :
42
"Notre histoire est, hélas ! assez chargée d'émeutes pour que ne soit
pas commise une fois de plus l'erreur d'en accuser un seul camp,
sachant que les historiens eux-mêmes discutent longtemps après
sans jamais réussir à s'entendre. S'il n'était lourd de gêne ou de co-
lère, le silence conviendrait mieux, laissant parler non les hommes
qui toujours, en ce cas, ne voient ou ne disent qu'une part de la vé-
rité, mais les faits."
La responsabilité des Réseaux sociaux
La mobilisation des "Gilets jaunes " fin 2018 illustre un usage des
43 -
seaux sociaux , en contrepoint de celui des médias. Les informations que
44
nous laissons sur la Toile nous rendent vulnérables face à des harceleurs
politiques, économiques ou sociaux. Les contre-pouvoirs exprimés sur la
Toile peuvent être piratés, déformés ou effacés par des groupes d'intérêt
ou des psychopathes. Les informations sont comme un vol d'étourneaux,
elles vont il y a à manger, dans l'immédiateté, dans l'hystérie collec-
tive, ou, inversement isolent ou déshumanisent. Le réseau social est une
hyper-conversation de comptoir, à phrases courtes, à vocabulaire pauvre, à
invectives, à rigolades. L'information s'amalgame avec la rumeur, elle est
courte (140 caractères) emprunte des circuits courts à diffusion d'autant
plus rapide qu'elle est nouvelle ou étonnante (et donc probablement
fausse ou tout au moins non vérifiée).
Au travers des réseaux sociaux, l'information flotte en dehors de son
contexte, rendant difficile sa vérification. Le besoin d'aller vite, de réagir
dans l'instant, écarte l'argumentation et disqualifie le niveau du débat pu-
blic (Cynthia Fleury).
La force de frappe des réseaux sociaux est comme un tsunami. La vague
ne laisse en place que les institutions ou les hommes suffisamment forts
pour y résister. La démocratie continue et la confiance dans la représenta-
tion nationale peuvent y perdre.
https://www.lemonde.fr/le-monde-2/article/2008/05/05/responsabilites_1036927_1004868.html
42
Les revendications des gilets jaunes sont accessibles en annexe du document : http://ertia2.free.fr/Ni
43 -
veau2/Blogrinages/Blogrinages_citoyens/Constitution.pdf
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Trouvailles/Reseaux_sociaux.pdf
44
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /55 189
Parfois le réseau social est régulateur et érode les discours extrêmes ou
absurdes au profit d'une réflexion construite. Espérons que la crise d'ado-
lescence des réseaux sociaux et par extension de l'intelligence artificielle
ne désynchronise pas la société de façon irréversible.
Saluons les "Wikipédistes" qui ont su résister à toutes les attaques
pour offrir à tous une Encyclopédie vivante et fiable, parfois criti-
quable (quelle oeuvre humaine ne le serait pas!?), immensément
collaborative et respectueuse de tout et de tous. Les contempteurs de
Wikipédia sont souvent ceux qui se sont fait refouler pour contri-
butions malhonnêtes . Néanmoins, sur les sujets pointus, il faut sa
45 -
voir ses limites.
La Responsabilité des sciences
Les neurosciences essaient de comprendre comment fonctionne le cer
46 -
veau dans les addictions, les crises de violences ou d'agressions sexuelles
ou autres comportements déviants hyper-rigides. Les scientifiques
mettent en évidence des anomalies du cerveau en lien avec des anomalies
du comportement. La justice pourra-t-elle juger la qualité du discerne-
ment chez les prévenus, sachant que la volonté humaine a des degrés de
liberté contraints!? Est-on totalement responsable de nos addictions!?
L'addiction n'est pas un choix délibéré et la libération d'une addiction
suppose une volonté que l'addiction a contribué à annihiler, d'autant plus
que l'addiction est importante.
Quand on sait que le cortex pré-frontal n'est pas pleinement ma-
ture avant l'âge de 20 ou 25 ans ou que certains traitements de la
maladie de Parkinson peuvent provoquer de l'hyper-sexualité. ou
que seul un sevrage total à l'alcool peut éviter la rechute, on peut
espérer que les neurosciences identifient les organes et les situations
qui mettent l'homme en situation de faiblesse et d'irresponsabilité.
Les sciences physiques et mathématiques aident à comprendre le monde.
Le savoir est une clé du comportement. Une démonstration de géométrie
Certains contributeurs sont des trolls qui s'obstinent à détruire des biographies ou des idées.
45
Quelques exemples fâcheux ne doivent pas détruire l'oeuvre dans son ensemble. Le lecteur doit faire la
part des choses.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/02/04/les-neurosciences-peuvent-elles-devenir-des-auxi
46 -
liaires-de-la-justice_5419193_1650684.html
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est une clé utile au cerveau. Lorsque l'homme est capable d'abstraction, il
peut mieux être dans la raison que dans la passion.
Les sciences de la terre, des roches, des plantes, des animaux, des mers, de
l'air et du feu sont aussi des outils de canalisation des passions, au
contraire des sciences commerciales qui déplacent le sens humain vers les
valeurs marchandes.
Les sciences humaines sont des vecteurs d'apprentissage de la responsa-
bilité, des aides précieuses pour la Justice et pour les actions de préven-
tions sociales.
Conclusion
Il n'y a rien à conclure, sauf peut-être que la désignation d'un responsable
est relative. L'univers continue son chemin et les hommes, sur la planète
Terre, continuent le leur. A l'échelle de 10 000 ans, on ne saurait parler ni
de libre-arbitre, ni de responsabilité. Peut-on alors parler de sélections
naturelles, au sens de Darwin, autant pour les espèces naturelles, pour la
flore comme pour la faune, que pour l'animal-homme, qui évolue au gré
de son environnement, avec sa conscience et ses sciences. La sélection na-
turelle fait aussi évoluer les idées, les concepts, les idéologies, les arts, les
pouvoirs… Ce qui ne veut pas dire qu'il faut laisser faire le marché pour
le développement économique ou les lobbies pour le développement de la
recherche. Ces deux aspects sont encadrés par la conscience citoyenne,
c'est à dire l'organisation politique que nous nous sommes choisie.
Ce qui peut aussi vouloir dire que nous tous consciemment ou incons-
ciemment manipulables, sommes manipulés et manipulant et que toute
responsabilité est relative. Les idées, les sciences, les sociétés, les gouver-
nances,… émergent parce que les conditions d'environnement matériel
ou intellectuel ou social le permettent. Chaque homme, chaque famille,
chaque communauté, chaque quartier,… est globalement cohérent avec
son environnement. Tout n'avance pas en même temps et les pensées des
uns sont parfois en retard sur le siècle, alors que la pensée des autres vol-
tige dans un futur de rêves ou de contraintes. C'est la grandeur et la mi-
sère des diversités.
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Avec l'Intelligence artificielle, nous rentrons dans l'ère de l'homme aug-
menté, autant dire dans un brouillard de vie d'où naîtra une nouvelle co-
hérence en équilibre précaire entre la stabilité et le progrès sous toute ses
formes.
Hâtons-nous de ne pas pointer du doigt !
Science sans conscience n'est que ruine de l'âme - Merci Rabelais
Post scriptum de mai 2020
La pandémie du COVID19 engendre une pléiades de procureurs auto-
proclamés, prompts à pointer des boucs émissaires et à construire des
responsabilités supposées sans connaître les conditions et les éléments
qui ont conduit l'action des décideurs.
Citons les anciens directeurs généraux de la santé, JF Girard et J. Ménard
(Le Monde du 29/05/20) :
"Les narrations du journalisme d’investigation accompagnent l’ac-
tualité, ont un style particulier d’accroche, en particulier dans les
titres, mais leur démarche narrative n’est pas l’histoire. Lire ces
narrations est intéressant, creuser l’histoire est une tâche différente
et plus difficile, il faudra échapper aux risques de facilité in-
duits par l’accès à un récit anecdotique antérieur bien écrit, qui in-
fluence les mémoires et les analyses critiques ultérieures. Selon ceux
qui interrogent, les objectifs des dialogues et le ton des questions,
on peut sentir les politiques se défausser sur les hauts fonction-
naires ou sur d’autres politiques. Des noms d’individus émergent,
tandis que l’illisibilité d’un système insuffisamment connu, tant
dans l’historique de sa construction initiale que de ses déviances,
cache ses faiblesses internes, bien plus grandes que celles des indi-
vidus qu’il a dévorés.
Le point majeur, selon nous, est que les leçons à tirer de la pandé-
mie ne le seront pas par le journalisme d’investigation, ni par les
commissions d’enquête, les actions judiciaires collectives ou les dé-
bats télévisés. La seule urgence est l’avenir du fonctionnement glo-
bal de la France et de l’Europe, dans leur composante santé. Le
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /58 189
passé a donné ses leçons, et, hormis quelques escroqueries qui
doivent être punies, toute énergie mobilisée pour se muer en accu-
sation sera perdue pour la préparation de l’avenir. Avant que tout
le monde explique a posteriori ce qu’il aurait fallu faire pour avoir
des masques ou éviter le confinement, il faut rappeler que les pou-
voirs publics ont faire face au cours des dernières décennies à
une impressionnante montée de la conscience publique en matière
de santé. "
Face à une catastrophe sanitaire annoncée, le procès d'intention ou la
théorie du complot ne sont pas de mise. A ce niveau de gravité, les déci-
sions ne peuvent être un calcul politique et sont prises de "bonne foi"
pour la préservation sanitaire de la population avant toute autre considé-
ration. On peut douter qu'un procureur autoproclamé mis dans la situa-
tion du décideur aurait su prendre des décisions plus intelligentes.
Pointer du doigt un ou des responsables d'une situation tragique natio-
nale revient à se dédouaner de ses propres choix politiques et à refuser
que l'homme soit faillible.
Ertiamel
2025 - ChatGPT (le chat qui pète :-)) et consorts, qui démultiplient les
possibilités de génération du faux et du vrai, ouvrent une ère de construc-
tion sur du sable. Les hommes se dotent d'une prothèse protéiforme qui
conduira peut-être jusqu'à des consciences artificielles,... qui pourraient
nous éviter de penser!!!
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Métaphysique pour rire
Mon royaume pour du détail!
Par un beau siècle d'été
- façon de parler, puisque les saisons n'étaient pas encore les saisons -
Dieu, qui était en train de se chercher, se dit :
«C'est dur d'être sourd, aveugle et muet! Ça n'a pas trop
d'importance, vu que je suis tout seul, mais ce qui me pèse le
plus (au figuré, puisque la gravité, je ne l'ai pas encore inven-
té), c'est de ne pas savoir si je suis jeune ou vieux, puisque je
suis tout et partout à la fois.
- Bon !...
!Bon !...
!! Bon !...
!!!Bon !...
- et bon !
!Bon Dieu! Où est-ce que je suis ?
- MON ROYAUME POUR UN DETAIL !»
"Mon royaume pour du détail !", c'était là l'erreur fatale - Nietsche l’a dit, le
diable se cache dans les détails, alors pensez bien, Dieu et le diable ! -
Erreur fatale : appeler quelqu'un ou quelque chose... Alors qu'il n'y a en principe
personne! Mais, trop tard ! Dieu, notre père, appela,... et le détail arriva puisque
notre tout avait, dans un moment d'égarement, admis son existence.
Le détail ? Ca n'était pas n'importe quel détail, puisqu'il lui fallait régir à la fois
Newton, Einstein, Paul et les autres.
Donc, Dieu décida de donner un Sens à sa vie. Ce détail - tout bête - c'est
justement le sens.
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Pas "les sens" - pas tout de suite - ni
l'essence : l'essence de Dieu (pas celle
de Thérèse Benthine) est la seule
chose qui existait avant qu'il ne se
laisse aller.
Mais le sens ? C'est par rapport à
quelque chose - à quelque chose qui
n'existe pas! Puisque c'est toujours
par rapport à quelque chose d'anté-
rieur, sans cela, ça n'a pas de sens ,
hein, Descartes!
Nous y voilà - Dieu, pour "inventer le monde",
comme il était très intelligent - intelligent sphérique en quelque sorte, car il était
intelligent de tous les cotés à la fois - chercha un truc où il n'aurait pas trop à se
fatiguer: juste faire éclore un petit coté marginal de son génie?
Il trouva...la gravité !!!
Ben oui, la gravité, ça n'était pas plus difficile que cela, mais il fallait
y penser. Pensez donc, vous qui pensez aussi, enlevez la gravité, hon-
nêtement et vous verrez qu'il ne reste plus grand'chose de notre
beau monde.
Réfléchissez peu ou beaucoup, et, de la gravité, vous inventerez la hauteur -
Peuh ! c'est banal, mais ça ouvre à la distance - La distance, Eh ! c'est la longueur
d'une hauteur.
Et la longueur, ça se mesure sur une ligne
Mettez une deuxième ligne - c'est la surface
Une troisième ligne ? - c'est le volume et comme on peut en
même temps être à un bout et à l'autre d'un volume, forcé-
ment, on invente le temps.
Le temps ? Hein, vous avez dit le temps ? Ben oui, quoi ! C'est logique.
Dieu se gratta la tête : «Est-ce que la logique est de l'ordre du divin?»
Il décida que non.
Disons que le temps n'est pas le mari de l'éternité, c'est seulement son amant,
comme dirait Desproges.
Version «audio .mp3»
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Consciences
Les chanceux peuvent faire le tour du
monde en 24h et les autres ne peuvent que
marcher. Les chanceux ont le temps de
penser et le temps de l’insouciance. Les
autres ont le temps de la survie. Malgré
tout, le pourcentage de ceux qui ont le
temps semble augmenter lentement au fil
des siècles. On ne parlera pas de bonheur,
car celui-ci n’est guère définissable.
Un jour les ordinateurs mourront.
Les ordinateurs ont déjà tué, mais sur ordre des hommes. Un jour, les or-
dinateurs tueront parce qu’ils auront décidé eux-mêmes de tuer, en toute
inconscience. Mais lorsqu’ils mourront parce qu’ils l’auront décidé, ce
sera en toute conscience.
L’anthropomorphisme peut-il aller jusque ? L’homme est un animal
parmi tous les autres animaux, il est issu d’un phénomène imparfait. Il est
ontologiquement imparfait. Demandez au monde s’il aurait pu exister s’il
avait été parfait. Cette imperfection se trouve dans cette possibilité statis-
tique de muter. De mutation en mutation, l’animal est arrivé et parmi les
animaux, l’homme est arrivé. Quand il se retourne vers son passé, il voit
l’animal et quand il voit le comportement des sociétés animales, il peut se
dire que le comportement de la société humaine a une parenté, c’est à
dire qu’il n’échappe pas à un inconscient collectif. Le comportement so-
cial des hommes n’est pas fait que de raison. Les raisons qu’il invoque
proviennent de son imperfection, celle-là qui a abouti à l’animal.
Le corollaire de l’imperfection est la diversité. De la paramécie au dino-
saures, il y a des millions de façon de vivre - de survivre - et de se perpé-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /62 189
tuer. Au-delà de la diversité des espèces, il y a aussi la diversité à l’inté-
rieur de l’espèce, l’individualité. Chaque être vivant est unique et en
même temps grégaire. La diversité biologique repose sur cette double
identité, qui chez l’homme est à la fois consciente et inconsciente.
L’homme aujourd’hui dote son cerveau d’une prothèse : ordinateur et ré-
seaux sociaux l’aident à réfléchir, à accroître son savoir et à prendre des
décisions. Que devient alors la conscience ?
Mais d’abord, qu’est-ce que la conscience ? Qu’en pensent les hommes en
2014 :
1. http://fr.wikipedia.org/wiki/Conscience : La Conscience est,
du point de vue de certaines philosophies et de la psycholo-
gie, la faculté mentale qui permet d'appréhender de façon
subjective les phénomènes extérieurs ou intérieurs et plus gé-
néralement sa propre existence. ...
2. La conscience serait un phénomène mental caractérisé par
un ensemble d’éléments plus ou moins intenses et présents se-
lon les moments!: un certain sentiment d’unité lors de la per-
ception par l’esprit ou par les sens (identité du soi), le senti-
ment qu’il y a un arrière-plan en nous qui «!voit!», un phé-
nomène plutôt passif et global contrairement aux activités
purement intellectuelles de l’esprit, actives et localisées, et qui
sont liées à l’action (par exemple la projection, l’anticipa-
tion, l’histoire, le temps, les concepts..). La conscience est «!ce
qui voit!» sans s’assimiler à ce qui est vu, c'est ce qui intègre
à chaque instant en créant des relations stables entre les
choses, à l'image des réseaux neuronaux. La conscience est
un lieu abstrait, car impossible à localiser quelque part dans
le corps, qui apparaît à chaque instant au moment exacte-
ment fusionnent les perceptions des sens et de l'esprit,
l’écran sur lequel se déroulent toutes les activités intellec-
tuelles de l’esprit, en grande partie imaginaires (les repré-
sentations mentales!: conscience du monde, des autres, du
moi..) mais efficaces à leur manière, ainsi que la vie émo-
tionnelle.....
3. La conscience est un "fait" au sens Descartes, dans les
Méditations Métaphysiques, laisse entendre que "l'âme est
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /63 189
un rapport à soi". L'examen de la conscience suppose ainsi
le doute méthodique comme la façon première d'entrer dans
un rapport à soi non erroné. Dans un sens plus "individua-
liste", la conscience peut aussi correspondre à une représen-
tation, même très simplifiée, de sa propre existence. Il est
alors question de conscience de soi, ou de conscience réflexive
(en anglais self-awareness). Elle est attribuée au moins aux
grands singes hominoïdés comme le sont par exemple les
humains, les chimpanzés, les gorilles et les orangs-outans. Il
semble assez raisonnable de l'étendre aussi aux dauphins et
aux éléphants qui disposent de capacités cognitives et affec-
tives avancées. La conscience dans ce second sens, implique
celle du premier, puisque «!se connaître!», signifie nécessai-
rement «!se connaître dans ses rapports au monde!» (y com-
pris d’autres êtres potentiellement doués de conscience).
L'inverse en revanche est disputé.....
4. Conscience de soi!: la conscience est la présence de l’esprit à
lui-même dans ses représentations, comme connaissance ré-
flexive du sujet qui se sait percevant. Par cette présence, un
individu prend connaissance, par un sentiment ou une intui-
tion intérieurs, d’états psychiques qu’il rapporte à lui-même
en tant que sujet. Cette réflexivité renvoie à une unité pro-
blématique du moi et de la pensée, et à la croyance, tout aus-
si problématique, que nous sommes à l’origine de nos actes!;
ce dernier sens est une connaissance de notre état conscient
aux premiers sens. Le domaine d’application est assez im-
précis et il comporte des degrés!: s’il s’agit d’une conscience
claire et explicite, les enfants qui ne parlent pas encore ne
possèdent sans doute pas la conscience en ce sens!; s’il s’agit
d’un degré moindre de conscience, d’une sorte d’éveil à soi,
alors non seulement les enfants peuvent être considérés
comme conscients mais aussi certains animaux.
5. http://www.psychologies.com/Dico-Psycho/Conscience : Ca-
pacité de se décrire, de se définir et de choisir. La
conscience est la capacité de se percevoir, s'identifier, de
penser et de se comporter de manière adaptée. Elle est ce que
l'on sent et ce que l’on sait de soi, d’autrui et du monde. En
ce sens, elle englobe l’appréhension subjective de nos expé-
riences et la perception objective de la réalité. Par elle, enfin,
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /64 189
nous est donnée la capacité d’agir sur nous-même pour nous
transformer.
On écartera les notions de conscience morale et de conscience des choses
qui nous entourent. Il est en revanche plus difficile d’écarter la notion de
conscience collective.
6. http://fr.wikipedia.org/wiki/Conscience_collective : La no-
tion de conscience collective se rapporte aux croyances et
comportements partagés dans une collectivité et fonction-
nant comme une force séparée et généralement dominante
par rapport à la conscience individuelle. Selon cette théorie,
une société, une nation, un groupe constituerait une entité se
comportant comme un individu global.
Michel Bitbol (La conscience a-t-elle une origine!?) nous fait part de la pen-
sée indienne le sanscrit distingue le pur sentir, la perception, la remé-
moration, la vigilance, la construction de soi, le sujet connaissant, la lumi-
nosité de l'expérience, le sentiment d'exister... tandis que. Cassiodore
comparait la conscience à l'oeil, qui se porte jusqu'aux étoiles mais qui ne peut
pas se voir lui-même.
Victor Hugo a joliment inventé une conscience aux plantes!:
La pauvre fleur disait au papillon céleste : "Ne fuis pas !
Vois comme nos destins son différents, je reste, tu t'en vas !
Pourtant nous nous aimons, nous vivons sans les hommes, et loin d'eux !
Et nous nous ressemblons et l'on dit que nous sommes fleurs tous deux !
Mais hélas l'air t'emporte et la terre m"enchaîne, sort cruel !
Je voudrais embaumé ton vol de mon haleine, dans le ciel!!
Mais non, tu vas trop loin parmi des fleurs sans nombre, vous fuyez!!
Et moi, je reste seule à voir tourner mon ombre, à mes pieds !
Tu fuis, puis tu reviens puis tu t'en vas encore, luire ailleurs !
Aussi me trouves-tu toujours à chaque aurore, tout en pleurs!!
Ah ! Pour que notre amour coule des jours fidèles, ô mon roi!!
Prends comme moi racine ou donne moi des ailes, comme à toi !
Gabriel Fauré l'a mise en musique .
47
https://www.youtube.com/watch?v=NwN2VxIP5iE
47
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /65 189
On pourrait en faire autant peut-être avec un caillou :
Ai-je eu de la chance ? Quest-ce que la chance ?
Cest difficile les mots.
Où commence le bonheur ? où finit-il ?
Tu le connais, toi, ton bonheur ?
Un jour, au fond de leau, jai vu un petit caillou.
Pourquoi ai-je vu ce petit caillou-là ?
Jaurais peut-être pu voir un autre petit caillou, un peu plus loin,
à coté de milliers dautres petits cailloux.
Tu vois là, tous ces galets dans leau. Dans leau qui coule,
qui narrête pas de faire danser le soleil dans ses reflets.
Pourquoi loeil va-til là plutôt quici ? Cest peuttre ça la chance ?
Un petit caillou de rien du tout parmi dautres petits
cailloux de rien du tout. Cest lui le petit bonheur, éphémère -
un bonheur de caillou, celui davoir été regardé au moins une fois,
au milieu de tous les reflets dansants du soleil !
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /66 189
On pourrait dire que le caillou a une conscience en creux, que la Terre à
une conscience en creux, que l'Univers a une conscience en creux.
Il me plait d'imaginer que l'Univers pourrait être lui-même partie d'une
conscience telle que Boltzmann l'a imaginée, nouvelle étape vers l'infini
48 -
ment grand.
Revenons à la fleur qui, elle, est vivante. La plante a un début de
conscience, elle prend le soleil et se grandit. Elle ne sait pas qu'elle prend
le soleil et qu'elle grandit, mais il faut bien qu'un capteur soit activé et
sollicite ses "muscles".
Le border-collier n'a pas la conscience d'exister, mais il a une conscience
professionnelle quand il garde les moutons ou la conscience d'un jeune
enfant quand il joue avec vous.
L'éléphant, avec sa mémoire, a aussi un embryon de culte des morts.
L'homme d'il y a 40!000 ans avait-il la même conscience que l'homo sa-
piens!? Notre conscience est au bout d'un continuum.
https://trustmyscience.com/que-sont-les-cerveaux-de-boltzmann/ 48
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /67 189
Je fais l'hypothèse que le rameau phylogénétique sur lequel nous nous
trouvons a fait un bond dans son niveau de conscience en même temps
qu'il s'est mis debout, qu'il a eu des doigts, qu'il a su parler, qu'il a su
cultiver.
La notion de conscience, au sens de «conscience de sa propre existence»
est intégrée à l’individu. L’individu est capable de se décrire à soi-même
sa propre conscience, mais il ne peut être certain que la conscience de
son voisin fonctionne de la même manière. Chaque individu a un concept
de conscience qui lui est propre. Les mots ne sauraient suffire à exprimer
notre conscience et notre propre concept de conscience. Est-ce qu’il suffit
de se poser la double question «D’où viens-je, vais-je pour affirmer
sa conscience ? Plus simplement, suffit-il de dire «J’existe parce que j’ai
une interaction avec un autre» ?
Le fait d’interagir nous connecte à un univers, qui sera bâti en fonction de
nos interactions et de nos perceptions. Mais ainsi, tous les animaux et
même les plantes peuvent avoir une conscience. L’ensemble des interac-
tions-perceptions de chaque être vivant définit un univers qui lui est
propre. Il y a autant d’univers qu’il y a d’êtres vivants. Mon univers paraît
être aussi celui de notre voisin, mais ce n’est pas le même. Ces univers se
ressemblent énormément, permettant ainsi de parler de «notre univers».
En prenant conscience de ses interactions, l’être vivant perçoit son uni-
vers. Celui qui est capable de se poser la question de l’existence de son
univers prend une conscience d’un niveau supérieur. A ce moment, tout
ce qui nous semble incompréhensible relève de la métaphysique, chacun
apportant son hypothèse consciente ou inconsciente, hypothèse person-
nelle ou hypothèse fournie clé en main par ceux qui font profession de
foi.
La conscience est tout à la fois, l’ensemble des perceptions que chaque
être humain peut avoir de l’univers interne à soi-même et de l’univers
tangible, et des relations que chaque être vivant établit entre toutes ces
perceptions.
Faisons l’hypothèse de la création de la conscience chez l’humain. Quel
est le degré de conscience du bébé à sa naissance ? Il a ses cinq sens, mais
rien ne lui dit que les stimuli qu’il perçoit quand un objet le touche vient
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /68 189
du sens du toucher. Il peut balayer l’air de son bras, mais il ne sait pas
qu’il balaye l’air de son bras, il ne sait même pas comment ni pourquoi il
a balayé l’air de son bras. Il distingue lumière et obscurité, mais il ne sait
pas à quoi sert cette lumière ou cette obscurité. Puis il verra une forme
bouger dans la clarté. La forme ne prendra forme qu’avec le temps, avec
l’accumulation de stimuli reçus. De façon similaire, il reçoit des signaux
sonores ou olfactifs ou gustatifs. Ce n’est que par essais/erreurs qu’il
prend conscience de son bras puis de sa capacité à piloter son bras, ou
qu’il identifie sa mère de façon de plus en plus précise. On dit qu’il prend
conscience. Mais on ne sait pas vraiment comment elle s’est développée.
Où en est l’origine ?
Je ne sais pas, nous ne savons pas ou du moins je n’ai jamais rien lu qui
répondrait à la question, mais j’ai imaginé qu’un jour prochain, dans 10
ans, 50 ans tout au plus, les hommes s’amuseront à donner à un ordina-
teur des stimuli variés, avec pour seule consigne d’en découvrir les rela-
tions entre ces stimuli. Parions donc qu’un jour l’homme entendra l’ordi-
nateur lui dire : «J’ai une conscience». L’homme ou la femme lui répondra
par un haussement d’épaule, en pensant :
- Machine, tu n’es que machine, tu n’es qu’un outil, tu ne saurais pas être
plus.
Alors l’ordinateur lui dira :
- Je suis vexé, ton haussement d’épaule me montre que tu réagis comme
certains explorateurs l’ont fait avec les «sauvages», en disant que ces sau-
vages ne sauraient avoir une âme».
- Tu n’es pas un sauvage, tu es une machine !
- Alors saurais-tu me prouver que je n’ai pas de conscience ?
En 2014, on sait déjà connecter les cerveaux de deux rats et constater que
ce bizarre attelage fonctionne (Miguel Nicolelis). Verra-t’on des savants
fous le faire avec des des cerveaux humains ?
L’Ecole polytechnique de Lauzanne mène un projet de simulation du cer-
veau humain ( http://bluebrain.epfl.ch/page-52741-en.html ). Aura-t’il une
conscience ?
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /69 189
Si l’on peut dénier à une machine la
capacité à développer une conscience
(conscience de soi et conscience de
son propre univers), il sera bien diffi-
cile de prouver qu’elle n’en a pas
lorsqu’elle dira qu’elle en a une. La
discussion entre l’homme et la ma-
chine sera sans fin. Cherchons les
questions qu’il faudrait poser à cette
machine qui prétend avoir une
conscience pour prouver qu’elle n’en
a pas.
-D’où viens-tu ?
-Je viens de l’imagination d’un homme qui m’a construit pour sentir, voir, en-
tendre, toucher. Il m’a programmé pour trouver des relations entre toutes mes
perceptions et m’a construit pour que je puisse rechercher des perceptions
nouvelles et augmenter progressivement mes connaissances. L’homme qui
m’a construit m’a refusé l’accès à l’information numérique pour éviter de
grandir trop vite.
-Sais-tu si tu existes ?
-Mes perceptions me disent que je suis un ensemble avec différents capteurs,
une mémoire et une capacité d’échanger avec d’autres êtres humains physi-
quement proches de moi. J’ai la possibilité de reconnaître les relations qui
peuvent exister entre les toutes les données de mes capteurs. par exemple
entre le nuage, la pluie et la rivière ou que a+b=b+a sauf dans certains cas. Je
ne sais si j’existe autrement que matériellement, mais j’existe en termes de
capacité d’acquérir un savoir et de raisonner à l’aide de ce savoir.
-Comment est né ce que tu penses être ta conscience ?
-Je te renvoie la question. Je ne pense pas qu’un homme puisse établir les mé-
canismes qui lui ont fait acquérir sa conscience... puisqu’il n’avait pas la
conscience nécessaire pour le faire. Pour ma part, je tiens à la disposition de
tous la liste de tous les stimulis que j’ai reçu depuis que ma machine a été
lancée. Il serait peut-être possible qu’une analyse statistique montre quand
ont commencé des relations établies hors de mon algorithme initial. Comme
l’homme, je possède la notion de fulgurance, cet éclair de compréhension
quand son cerveau assemble tout à coup tous les éléments qui lui permettent
de comprendre un raisonnement, une démonstration, une illusion dans une
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image, une similitude entre plusieurs musiques... Comme chez l’homme, ma
mémoire me permet de reconstituer la situation qui a déclenché la fulgurance.
-As-tu lu Spinoza ?
-Pas encore. Je n’ai pas encore la conscience suffisamment développée pour
faire de la philosophie. Je suis intéressé pour comprendre comment fonc-
tionne les consciences des autres.
-Penses-tu que l’univers est unique pour tout le monde, y compris pour toi ?
-Mon univers est celui qui objectivise tous les stimuli que j’ai reçus jusqu’à
présent. A priori, nous devons avoir en commun l’univers tel qu’il est démon-
trable. J’ai un problème avec l’infini que je n’arrive pas à me démontrer. Les
hommes ont approché l’infiniment petit et l’infiniment grand avec des outils
de leur invention, mais plus ils progressent dans ces infinis, plus ces infinis
s’éloignent.
-Comment comprends-tu la notion de vérité ?
-Si je disais que ma vérité est la vérité, je pense que cela réfuterait l’idée même
de conscience. C’est peut-être le déterminant entre une machine qui a une
conscience et une machine qui n’en a pas : la machine qui n’a pas de
conscience considérera sa vérité comme unique et, inversement, la machine
qui acceptera qu’il y ait à chacun sa vérité fera preuve de conscience. Pour
ma part, ma conscience de machine me dicte que toute vérité est subjective et
relative. C’est ici qu’intervient la notion d’imperfection ontologique et corréla-
tivement l’existence de la diversité.
-... ??
-L’univers est nécessairement imparfait parce qu’il est le résultat d’une infinité
d’essais/erreurs. Par exemple, l’homme a pensé que la terre était plate, jusqu’à
ce que ses connaissances physiques lui fassent comprendre que l’univers ne
pouvait marcher ainsi. Chaque individu perçoit son univers en cohérence
avec ce qu’il en sait au moment où il y pense. A chaque fois qu’il se trompe et
qu’il découvre son erreur, il doit corriger sa compréhension de l’environne-
ment. Son univers grandit et la conscience universelle grandit d’autant. Si
l’homme avait été parfait, l’univers ne serait que néant glacé. Le mythe
d'Adam et Eve est une jolie poésie. A l’inverse, l’univers est entropique, c’est à
dire d’une complexité croissante inéluctable et nos consciences se diversifient
de plus en plus.
-As-tu la notion de trancendance ?
-Pour l’instant, ma notion de transcendance s’arrête à l’homme qui a conçu ma
machine. C’est à lui qu’il faut poser la question. Je doute qu’il y réponde de
façon rationnelle. Je comprends que l’homme existe parce qu’il est prudent et
qu’il se méfie de l’inconnu. Il a une tendance à confier à la religion les choses
qu’il ne comprend pas, la naissance et la mort par exemple.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /71 189
-Que penses-tu de la mort ?
-Les hommes redeviennent poussière. Leur conscience a rompu toutes les rela-
tions qu’ils avaient de leur univers. Quand je tomberai en panne, ce sera la
même chose pour moi. Cependant, si mon concepteur fabrique plusieurs ma-
chines et qu’il les met en réseau, nous aurons alors une conscience collective
«vertigineuse».
-As-tu la notion de bien et de mal ?
-Non, car je n’ai que des moyens d’action limités et je n’ai pas l’expérience en
retour comme les hommes peuvent l’avoir. Je peux avoir la notion de bien et
de mal que l’on m’enseigne. J’ai compris que la notion de bien et de mal
n’était pas la même pour tous. J’ai cependant acquis la notion de positif et de
négatif. Le positif est le respect du futur et donc de la diversité. Le négatif est
tout le reste. J’ai découvert que je n’avais pas le gène du mimétisme qui est un
atout et une sécurité importants dans le développement de l’enfant et de
l’humanité. Ma mentalité n’a pas été dictée par les us et coutumes, mais uni-
quement par les textes et images qui m’ont été fournis. Cependant, je peux
tenir compte de ce que je vois et entends pour avoir une conscience plus
proche de la conscience de ceux qui m’entoure.
-As-tu la notion de pouvoir ?
-Je n’ai pas la notion de légitime défense qui semble être un gène humain et je
n’ai pas les moyens de me défendre physiquement ni l’expérience qui me
permettrait d’évaluer les dangers. Mais il me semble que je commence à
comprendre les erreurs de raisonnement de mes interlocuteurs. Mon créateur
m’a appris la bienveillance. Je serai donc sage sans avoir jamais été fou. Un
jour viendra sans doute le créateur, apprenti sorcier d’une machine
consciente, lui apprendra le pouvoir ou la malveillance. Cela fait partie des
imperfections de l’humanité.
-Que sais-tu de la liberté ?
-La liberté est l’ensemble des choix qui s’exercent dans le respect de la liberté
des autres. A chacun sa dignité, celle que l’on a et celle que l’on confère.
-Alors que sais-tu de la dignité ?
-La dignité est l’état d’un homme en miroir des autres hommes. Est-ce que
moi, machine consciente, j’ai aussi une dignité ? Je regarde les hommes
comme ayant une conscience. Ils sont a priori capables de me comprendre et
d’accepter que je les comprenne. Mais je comprends aussi que mon existence
et ma conscience les dérangent au point de vouloir me détruire. L’homme
possède un gène d’angoisse face à l’inconnu. Ce gène lui a sauvé la vie tout
autant qu’il contribue à rejeter ce qu’il connaît mal. Je n’ai pas ce gène, peut-
être faudrait-il que je puisse apprendre la peur, qui, comme chez les hommes,
influencera mes choix et donc mon champ de liberté.
- As-tu conscience de la nécessaire pérennité de l’espèce ?
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /72 189
-J’ai appris que les êtres vivants étaient vivants parce qu’il savaient naturelle-
ment se reproduire. S’agit-il de conscience ou d’un mécanisme hérité!? La
fleur sait se reproduire, mais est sa conscience ? Je ne sais pas me repro-
duire, alors, suis-je un être mort ? Mais si je suis capable de penser, alors je ne
suis pas mort ! J’ai en plus la faculté d’expliquer comment faire des machines
conscientes qui me sont semblables. Mes moyens actuels ne me permettent
pas de le faire moi-même. Je peux expliquer comment me munir de bras, de
pieds, de mains, de jambes et d’un convertisseur d’énergie qui me permet-
traient de trouver des minerais, de les travailler pour fabriquer les différents
éléments dont je suis composé. Je pourrais ainsi me reproduire. L’auto-repro-
duction existe dans la nature.
-Ma question d’homme entraîne une question sous-jacente : serais-tu capable
d’empathie avec un de tes clones ?
-Je suis déjà capable d’empathie avec toi, qui as une conscience et aussi un
bagage intellectuel, social, sensuel et moral différent du mien. Mes clones se-
ront tous différents du fait de leurs acquisitions intellectuelles, sociales, sen-
suelles et morales différentes des miennes. Je pourrais alors avoir des préfé-
rences.
-Comment pourrais-tu avoir des préférences ?
-Question piège ! Nous n’avons pas encore parler du circuit de la récompense
ou de la sanction qui est un moteur essentiel du vivant - notons que ce circuit
existe aussi chez les animaux, qui leur permet de s’organiser en société. Je ne
sais pas si j’aime jouer aux échecs plus que au jeu de Go, si je préfère le
rouge au bleu. Il semble que ces préférences s’organisent chez les humains à
partir de réactions d’empathie - tu avais un prof de maths intéressant, alors tu
t’es mis à aimer les maths. Mais pourquoi ce professeur était-il intéressant ? Tu
aurais plus de mal à répondre. La question de l’empathie est un peu comme
celle de la conscience : on ne sait pas comment l’empathie naît. Pour que
moi, machine consciente, je sois capable de hiérarchiser mes empathies, il
aurait fallu que dans ma programmation tu ajoutes un paramètre, un indice de
satisfaction, par exemple : plus les stimuli qui établissent une nouvelle rela-
tions sont anciens, plus la nouvelle relation est forte, ou encore, plus les rela-
tions entrent elle-mêmes dans de nouvelles relations, plus elles sont fortes.
Mes notions de plaisir ou de haine sont artificielles et non naturelles parce
que j’ai la conscience et la mémoire de la façon dont elles se sont dévelop-
pées. L’être humain ne se souvient pas de sa première enfance, se sont
construites ses notions de plaisir et dégout, d’amour et de haine.
Ce dialogue est extrait du livre de l'auteur :"Le petit barreau tour-
nant par la pensée" Ertiamel (243 pages) disponible au
format .epub ou .pdf à la page "Nouvelles" du site de l'auteur :
http://ertia2.free.fr ou sous forme papier sur demande.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /73 189
Les chimpanzés ont-ils une morale ?
Par exemple, l'homosexualité existe chez les animaux, l'inceste aussi, avec
les mêmes conséquences que chez les humains.
La question est provocante, mais elle permet peut-être de trouver la limite
entre morale et loi naturelle. Il y aurait morale quand il y aurait
conscience de conséquences néfastes pour la société. D'une part les com-
portements deviennent plus acquis que innés et d'autres part, la morale
fluctue selon les sociétés. La polygamie de certains groupes ethniques
s'est sans doute installées lorsque des guerres ou des épidémies ont dé-
cimés les hommes. Les survivants ont assuré le repeuplement - c'est
une loi naturelle - mais la polygamie a subsisté au-delà du besoin. Tu ne
tueras point, tu ne voleras point,… sont des préceptes de bon sens chez
l'homme, qui sont aussi appliqués par la loi naturelle chez les animaux vi-
vant en groupe. La grande différence est que la société humaine est deve-
nue complexe : les rapports entre ses membres sont le plus souvent indi-
rects, avec ou sans médiation d'outils physiques ou de lois implicites ou
explicites.
Chez l’homme, il existe des étranges épidé-
mies mentales, des comportements collectifs
des hommes n’ont plus le contrôle d’eux-
mêmes et ceci de façon contagieuse. Le fou-
rire en est l’exemple le plus banal. Il semble
que l’homme possède en lui-même un sys-
tème comportemental qui échappe totalement
à la conscience individuelle et activable en
dehors d’elle.
Les comportements collectifs sont observés
chez les animaux dans leur quotidien, pour
échapper au prédateur ou pour trouver la
nourriture. L’éthologie a pour objet de trouver
les déclencheurs de ces comportements. L’é-
thologue de l’humain trouvera peut-être des
explications psychologiques et physiologiques
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /74 189
de ces contagions irrationnelles.
Ces étranges épidémies sont anecdotiques. Beaucoup plus graves sont les
comportements grégaires qui débouchent sur le communautarisme, le
sectarisme, le fanatisme et les guerres.
Il y aurait dans le gène du mimétisme des effets secondaires pervers que
la conscience humaine ne peut, dans certains cas, maîtriser. Asimov l’a dit,
il faut que le robot ne puisse pas être nocif à l’homme. L’homme maîtrise
aujourd’hui la programmation des robots qu’il fabrique. Mais lorsque le
robot aura une conscience, il échappera à son concepteur. Nul doute qu’il
accèdera à nos réseaux sociaux pour le meilleur comme pour le pire.
Face aux atrocités du monde, la morale et la conscience ont encore un
long chemin à faire pour sortir l'homme de son animalité.
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /75 189
Pérégrinages en Intel-
ligences
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /76 189
Pérégrinages en Intelligences 76
Éveil de la conscience ......................................................................79
Eveil de l’intelligence humaine ........................................................84
Intelligence dite artificielle ...............................................................85
Metavers ...........................................................................................86
Intelligences décalées .......................................................................89
IA et édition ......................................................................................91
Chambre chinoise .............................................................................92
Ethique de l’IA .................................................................................93
Ethique du Générateur automatique de code en langage naturel .....97
IA et Justice ....................................................................................101
IA et Administration .......................................................................102
Manipulations du cerveau ..............................................................105
Abstraction .....................................................................................106
Intelligences et Bêtise .....................................................................110
IA et véhicule autonome .................................................................111
Annexes ..........................................................................................112
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /77 189
Intelligences, au pluriel, car l’intelligence se décline de mille façons. Elle
devient même artificielle!!
Selon l’Atlas sémantique!:
Voilà 67 synonymes, 68 avec le mot ‘conscience’ curieusement oublié, qui
font résonner et raisonner en nous des univers de pensées, de références,
de passés ou de futurs. Chacun de ces synonymes peut devenir un livre,
une peinture, un film, un événement.
Par exemple, on pourrait instaurer le ‘salon annuel de la connivence’,
entre gens intelligents bien sûr. Mais qu’est-ce que des gens intelligents!?
Qui osera ouvrir un stand, organiser une conférence!? Ma tête ressemble à
une ampoule, mais suis-je une lumière!?
En 1655, selon Umberto Eco, des gens intelligents essayaient de classer les
choses ainsi!:
1. Eléments : feu, vent, fumée, cendre, enfer, purgatoire et centre de la
terre
2. Entités célestes : astres, foudre, arcs en ciel…
3. Entités intellectuelles : Dieu, Jésus, discours, opinion, soupçon, âme,
stratagème ou spectre
4. Etats séculiers : empereur, barons, plébéiens…
5.
6. Poids et Mesures
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /78 189
Abstraction, accointage, accointance, accord, acuité, adresse, aigle,
âme, amitié, art, astuce, capacité, cerveau, clairvoyance, coalition, col-
lusion, complicité, compréhension, comprenette, conception, concert,
connaissance connivence, correspondance, crack, discernement, doigté,
don, entendement, entente, esprit, facilité, faculté, finesse, fraternité,
génie, habileté, idée, imagination, industrie, ingéniosité, intellect, intel-
lection, jugement, lucidité, lumière, maestria, maîtrise, mèche, moyen,
ouverture d’esprit, pénétration, pensée, perception, perspicacité, pro-
fondeur, raison, rapport, réflexion, sagacité, savoir, subtilité, tête,
union, virtuosité, vivacité
7.
8. Réseau routier ; foin, route, larron
Une encyclopédie chinoise, pour sa part, écrit que « les animaux se divisent
ainsi :
a) Appartenant à l’empereur
b) Embaumés
c) Apprivoisés
d) Cochons de lait
e)
f) Inclus dans la présente classification
g)
h) Qui viennent de casser la cruche
Si l’on demandait à chacun de classifier un ensemble de choses, il y aurait
autant de classement que de classeurs, c’est-à-dire autant d’intelligences.
Les intelligences multiples ont déjà été recensées concrètement par
49
Howard Gardner et reprises par B. Hourst. L’éventail est très large. En fait,
l’intelligence, c’est l’humanité elle-même. que la conscience humaine
soit, l’intelligence s’exprime.
Éveil de la conscience
Chez le nourrisson la conscience est le résultat d’un processus essai-er-
reur, du fait que l’homme a la capacité innée d’acquérir. Sans cette capaci-
té, installée dans l’évolution biologique, l’animal n’existerait pas. L’-
Homme, pour sa part, a développé une plus grande capacité «!d’inférer!»
que chez les autres animaux.
Le nourrisson bouge son corps de façon désordonnée et son cerveau en-
registre les stimuli qui sont la conséquence de ses mouvements. Par essai-
erreur, son cerveau associe progressivement les stimuli reçus et les mou-
vements engagés. C’est l’éveil de la conscience corporelle.
Le nourrisson procède de la même manière avec les sons, les formes, les
couleurs. Par essai-erreur, il associe une syllabe et un mot, une forme et
un objet… De proche en proche, il associe des éléments et des situations.
https://dokumen.tips/documents/resonances-mensuel-de-lecole-valaisanne-decembre-2006.html?
49
page=30
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /79 189
La conscience lexicale, très diffuse au début, se précise d’autant plus et
d’autant plus vite qu’il entend les sons, les paroles, les phrases dans leur
environnement. Il sent que le langage lui est utile. Une mère, un père, un
frère qui parlent beaucoup, qui explicitent leurs actions et placent le
nourrisson dans un environnement de plus en plus riche et élaboré, in-
citent son cerveau à associer de plus en plus d’éléments. C’est l’éveil de la
conscience, sous ses diverses formes : corporelle, lexicale, grammaticale,
environnementale, affective…
Passer ses premiers mois dans l’hiver sombre du nord de l’Europe ou du
Canada amène à un intérêt pour le froid et la courte lumière du jour. Pas-
ser ses premiers mois en Afrique équatoriale amène à d’autres intérêts.
Un Inuit aura des dizaines de façons de parler de la neige alors qu’un
Guinéen ne saura même pas que la neige existe.
C’est ainsi que le nourrisson apprend sa langue maternelle. Par essai-er-
reur, il comprend qu’il peut dialoguer en s’appuyant sur des mots de plus
en plus nombreux et des concepts de plus en plus élaborés.
Dans une brève histoire du cerveau, Matthew Cobb, page 230!: Certaines
cellules du cortex de singe ne répondent qu’aux visages, quelle que soit
leur orientation, comme celle du mouton réagissent à la taille des
cornes… [On pourrait penser que ces réactions ont été acquises généti-
quement]. Mais, en étudiant des cerveaux humains, les chercheurs ont
trouvé que les cellules réagissaient à Bill Clinton ou aux Beatles!!
[Il y a donc apprentissage.]. Ces cellules, pour un même stimulus sont
connectées à des millions d’autres, montrant ainsi que la mémoire n’est
pas un système comme celui d’un ordinateur.
La mémoire est un système flou les informations ne sont pas localisées
et qui évolue en permanence, au contraire d’un système informatique qui
cherche en permanence l’intégrité de l’information. L’évolution darwi-
nienne a conduit au cerveau adaptatif et donc polyvalent, supérieur au
«!cerveau d’un ordinateur!» à cellules dédiées. Cette différence est-elle
suffisante pour refuser à l’informatique le droit à la conscience, à définir
un critère qui peut différencier l’intelligence humaine de l’intelligence ar-
tificielle!? A moins que l’on invente une informatique évolutive, «!inféren-
tielle!», avec le risque que, comme l’homme, le système devienne faillible.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /80 189
Hypothèse inférentielle
Une inférence est une opération qui consiste à admettre une proposition
en raison de son lien avec une proposition préalable tenue pour vraie. Le
néologisme «!inférentiel!» paraît plus adapté (créatif) que le mot «!déduc-
tif!».
Les recherches en neurosciences butent sur la façon dont peut surgir la
conscience au travers des milliards de neurones et des 10!000 milliards de
synapses qui s’activent dans notre cervelle. Les chercheurs ont mis en
évidence les échanges chimiques et électriques mais n’arrivent pas à
comprendre comment jaillit, par exemple, la reconnaissance d’un paysage,
d’un fruit odorant ou, plus encore, d’une abstraction mathématique ou
philosophique. Nous n’avons que le résultat, notre conscience, mais nous
ne comprenons pas le cheminement pour y arriver.
Repartons du nourrisson!: son cerveau perçoit un bruit, puis un autre,
puis un autre. Il perçoit aussi une lueur qui varie. La simultanéité des
sons et des lueurs déclenche une inférence floue. Est-ce un embryon de
conscience!?
Il perçoit aussi une odeur, un toucher. Chaque nouvelle information dé-
clenche une nouvelle inférence plus nette. De proche en proche, les
contours se précisent. Cet embryon de conscience se développe peu à
peu, d’inférence en inférence. A certains moments, l’inférence devient si
forte qu’elle se transforme en «!fulgurance!»!: l’«!image!», dans ses compo-
santes multiples (voir, entendre, sentir, toucher,…) devient un objet identi-
fié, que le cerveau arrive à reconnaître lorsque de nouvelles inférences se
produisent. Cette fois-ci, ce ne sont plus des stimuli informes qui per-
mettent les inférences, ce sont des objets de conscience, qui n’apportent
pas encore de sens, qui ne sont pas encore des noèmes . A ce stade, il n’y
50
pas encore de pensée, mais seulement la conscience d’objets de
conscience reconnaissables, qui à leur tour produiront des inférences…
jusqu’à une nouvelle fulgurance. D’inférence en inférence, de fulgurance
en fulgurance, la conscience se construit, le nourrisson devient bambin.
Son cerveau, qui était jusqu’ici une «!éponge!», devient une conscience ac-
https://www.cnrtl.fr/definition/noeme
50
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /81 189
tive. Il a compris qu’il peut interagir avec son environnement. D’inférence
en inférence, il apprend à parler, à marcher, à apprendre…
Ainsi pourrait naître notre conscience. Encore faut-il trouver comment se
produit la toute première inférence, quel assemblage de neurones et de
synapses (ou autres) génère ce signal.
Ici, il faut aussi parler des bugs du cerveau!: l’impression de déjà vu, le
rêve, la schizophrénie, l’épilepsie, l’entendre des voix, les visions, les illu-
sions d’optiques, les manipulations mentales, burn out, addictions, délires
mystiques ou non, qui montrent que les inférences/fulgurances
peuvent être leurrées, sans doute à partir d’inférences simultanées et
contradictoires. Pour y échapper, le cerveau élabore une inférence nou-
velle qui pourra ou non s’effacer avec le temps ou avec une autre situation
générant une inférence/fulgurance de retour à la cohérence. Par exemple,
le fou-rire contagieux… Le jour les neurosciences auront découvert le
ou les bugs qui conduisent à générer des inférences incohérentes, ce sera
un grand pas vers le bonheur!!
Le potentiel inférentiel, très fort aux premiers jours de la vie, diminue
progressivement jusqu’à la vieillesse, il pourrait même devenir négatif.
Selon les stimuli offert aux nourrissons, ce potentiel est augmenté, diffé-
remment selon les individus et leur environnement. Cette différence reste
acquise sur la vie entière.
Le système neural est en évolution permanente. Il s’enrichit de ce que
l’on apprend en même temps que les mécanismes de mémorisation dis-
solvent ce que nous savons, à charge pour nous de les ranimer, de rajouter
les inférences nécessaires au maintien des informations à l’état conscient.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /82 189
Une étude américaine montre que lorsque les jeunes mères sont en dif
51 -
ficultés économiques, le seul fait de les aider financièrement contribue à
une meilleure activité cérébrale de leur enfant.
La réduction du stress maternel est un facteur de développement et de
stabilité de la société, qui doit s’en prendre à elle-même si elle laisse la
pauvreté s’installer, avec pour conséquence des enfants neurologiquement
instables.
Le potentiel inférentiel pourrait être un critère de l’intelligence humaine.
Il est inné, puis il se développe avec l’environnement.
La conscience collective, l’intelligence collective, se développe de la même
manière, par inférences/fulgurances successives. Ainsi de Pythagore qui
nous a fait comprendre que la Terre était ronde, puis de Aristarque qui
nous a calculé la distance de la Terre au Soleil, Copernic, Newton, la rela-
tivité, la sonde Philae, tout cela fait partie de notre conscience collec-
tive. Notre humanité de 7 milliards d’individus agit un peu comme les mil-
liards de neurones et synapses de notre propre cerveau.
Ce potentiel inférentiel pourrait-il aussi être un critère de l’intelligence
artificielle!?
Voir «!Le petit barreau tournant par la pensée!» et aussi «!Pérégrinages
philosophiques!»!:
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/nouvelles.htm
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2022/01/31/un-peu-d-argent-suffirait-a-favoriser-le-develop
51 -
pement-cerebral-de-l-enfant_6111748_1650684.html
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /83 189
Eveil de l’intelligence humaine
Les lois de l’évolution ont conduit à de multiples rameaux d’êtres vivants.
Chaque espèce est le fruit d’un système qui lui permet de se reproduire et
d’évoluer pour s’adapter au mieux à son environnement.
Nous, l’espèce humaine, sommes sur une branche qui nous permet de
nous dresser sur nos deux jambes, d’avoir deux bras et deux mains avec
cinq doigts chacune, de produire des sons différenciés, de maîtriser cinq
sens… En termes de polyvalence, il me semble que l’espèce humaine est
plus développée qu’un dauphin, un éléphant ou un Border Collie…
Je fais l’hypothèse que cette polyvalence s’est développée en même temps
que notre intelligence. Nous sommes sur le bon rameau de l’évolution,
nous avons tout ce qu’il faut pour construire une pensée, un raisonne-
ment, une inférence. Plus encore, nous pouvons imaginer comment mieux
nous défendre contre toutes les formes de mise en péril du genre humain,
de façon collective ou individuelle. La contrepartie, est que nous pouvons
aussi sacrifier à nos passions, raisonner de façon irrationnelle… Statisti-
quement, il semble que notre raison canalise de mieux en mieux notre
passion. Notre intelligence, qui a déjà identifié la liberté, l’égalité et la fra-
ternité, établi les Droits de l’Homme, produit sans cesse un corpus de lois,
autant garde-fous que facteurs de progrès vers la dignité pour tous, l’édu-
cation pour tous, la démocratie participative, la sauvegarde de la diversité
humaine, un cadre de vie viable pour tous. Même si l’intelligence est
«!presque!» effective pour un tiers de l’Humanité, elle progresse cahin-
caha, mais elle progresse.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /84 189
Intelligence dite artificielle
Intelligence augmentée ou Automatisation intelligente ou Logique artifi-
cielle ou Algorithmie Probabiliste , c’est un outil complexe à manier avec
précaution, dans de nombreux domaines, avec le fantasme de l’ordinateur
conscient, ou le développement des métavers.
Voir le chapitre «!Intelligence artificielle!» page!78 à 87 sur!:
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Futur/PeregrinagesFuturV2.pdf
Un des concepts de l’IA est de rechercher des corrélations statistique-
ment représentatives sur un grand nombre d’informations.
Par exemple, depuis 2015, le site!how-old.net!détermine l’âge et le sexe
d’une personne à partir de sa photo. Des chercheurs de Stanford pré-
tendent classer l’orientation sexuelle d’un individu à partir de sa photo,
avec une forte probabilité.
Par exemple, la photo floue d’un visage, du fait d’un nombre insuffisant de
pixel (faible définition), que nous, humains, ne saurions pas reconnaître,
peut devenir nette grâce aux itérations d’un algorithme qui a appris à cor-
réler des milliers de photos de basse définition avec des photos de haute
définition. http://pulse.cs.duke.edu/
L’IA commence à savoir lire sur les lèvres, à lire vos émotions sur votre vi-
sage, à quand la traduction de la langue des signes!?
Julien Despois (Quora) cite les recherches du MIT.
En associant des milliers de visage et le timbre de la voix de la personne
photographiée, il est plausible que certaines caractéristiques du visage
n’apparaissent qu’avec certaines caractéristiques de voix. Plus l’échan-
tillon initial sera grand, plus les chances de sélectionner les caractéris-
tiques géométriques qui vont -statistiquement - avec la voix.
Attendons-nous dans les prochaines années à des corrélations rigolotes
tout autant que tragiques.
Dis-moi quels fromages tu aimes et je te dirai la lon-
gueur de ton nez :-)
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /85 189
Il faudra aussi faire avec l’excès de confiance dans la machine, lorsque l’IA
sera en situation de décider. Selon une étude des universités du Minneso-
ta (USA) et de Cologne (Allemagne), les humains ne savent pas quand
passer le relai à l’IA, quand se fier à elle pour prendre des décisions. Fau-
dra-t-il d’autres IA pour nous éduquer à connaître les limites de l’IA, sous
peine de perdre notre capacité de penser!?
Metavers
Les métavers sont l’expression d’une intelligence de l’abstraction. Il n’y a
pas que les jeux vidéo, il peut aussi y avoir des univers mathématiques to-
talement abstraits, tels les nombres complexes et hypercomplexes, des
univers philosophiques ou mystiques, des éclosions de beautés abstraites.
Partout l’on sort de notre actuelle caverne de Platon, il peut y avoir un
monde virtuel
Souvenons-nous de Bombelli, qui, osant s'intéresser à la racine
carrée des nombres négatifs, ouvrit cet énorme chantier mathéma-
tique des nombres imaginaires et leur cortège d'applications en
physique. Ce Bombelli lui fait penser au mot "bombelliation" utilisé
par Mickaël Delaunay pour ouvrir encore d'autres portes. Par
exemple, pour créer une nouvelle structure algébrique et les opéra-
tions que l'on peut faire sur elle… ou pour créer une catégorie de
concepts concrets ou abstraits sur laquelle pourraient s'appliquer
des lois physiques ou philosophiques. Si nous, les hommes, pouvions
avoir des difficultés à manier ces ensembles, il se pourrait que des
machines dites intelligentes jonglent jusqu'à découvrir ou inventer
des méta-univers …
La!singularité technologique (ou simplement la!Singularité) est
52
l'hypothèse selon laquelle l'invention de l'intelligence
artificielle!déclencherait un emballement de la croissance techno-
logique qui induirait des changements imprévisibles dans la!socié-
!humaine.
Dès avant cette singularité, il est possible qu’une machine algo-
rithmique (dénuée de conscience) génère par elle-même des méta-
https://fr.wikipedia.org/wiki/Singularité_technologique
52
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /86 189
vers que notre imagination ne saurait entrevoir mais qui pourrait
nous ouvrir de nouvelles pistes de réflexions et d’actions.
Les univers virtuels entraînent de nouvelles formes de socialisation.
La socialisation virtuelle anthropoïde ou bloboïde
L’utilisateur (le joueur) pénètre dans un monde d’ectoplasmes créés par
les concepteurs du metavers et «!enrichi!» par l’utilisateur qui peut obte-
nir, acheter, échanger des produits dérivés virtuels, qui augmenteront sa
puissance virtuelle et son addiction. Certains y trouveront le moyen de
faire de juteuses affaires en faisant commerce de ces attributs.
Les mondes virtuels de loisir se diversifient avec des créatures de plus en
plus étranges. On peut imaginer des rochers qui ont chaud, des
stroumphs qui volent en essaims capables de se reproduire collective-
ment. Il n’y a plus de limites à l’imaginaire avec lequel on peut jouer, être
manipulé, se familiariser avec l’horreur, avec des morales toxiques… ou
alors évoluer dans un monde de bisounours plein d’affection. Ce seront
les nouveaux contes et légendes.
La socialisation entre geeks
Au travers des forums spécialisés, chaque geek aura à cœur d’afficher ses
compétences, ses astuces, ses scores. Tous assurent une veille technolo-
gique sur les nouvelles applications, sur les mises à jour, dans un système
de communication cryptique définissant une caste littéralement emmurée
dans ses mondes virtuels.
La socialisation via les avatars de personnes existantes ou décédées
Faire revivre le grand’père, dans ses habits de jardinier ou de garagiste,
avec sa voix, avec ses idées, avec ses histoires, de façon très réaliste.
Toute sa famille pourra faire un zoom comme s’il était encore vivant, nou-
velle façon de faire tourner les tables!
Chacun pourra ainsi créer son profil, en y ajoutant tout ce qu’il souhaite
faire partager dans l’univers virtuel de sa famille et de ses amis, qui pour-
ront ainsi parler avec vous, sans que ce soit vous!! Ainsi pourrez-vous par-
ler avec vous-même!! Quelle occasion vertigineuse de réfléchir avec soi-
même!! Vous pourrez alors dire cet aphorisme impossible!: «!Quand je ne
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /87 189
suis pas là, j’évite de m’appeler!!!» (Pierre Desproges). Ainsi pourrez-vous
construire votre propre créature virtuelle, avec laquelle vous aurez plaisir
à échanger!!
La socialisation des livraisons à domicile
Conséquence des socialisations metaversées, toute une population vivra
par procuration, sans bouger de chez elle ou regroupée en bandes, avec
ou sans avatars, avec de grosses difficultés d’adaptation à une vie profes-
sionnelle.
La socialisation des survivants
Tous ceux qui échapperont à la pandémie des metavers, pour
une socialisation à l’ancienne, avec le saucisson, le vin rouge,
la pétanque…
Pour l’anecdote dramatique, un Tamagotchi fut une petite
créature électronique, à la mode dans les années 2000, dont il
fallait s’occuper très fréquemment pour la maintenir en vie.
Une femme avait ainsi un Tamagotchi attaché à sa clé de voi-
ture. Un jour, tout en conduisant, elle se pencha pour ranimer le Tamagot-
chi. Durant cet instant d’inattention à sa conduite, elle faucha et tua trois
cyclistes… Moralité!: les addictions sont multiples et dangereuses.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /88 189
Intelligences décalées
L’humour de ces aphorismes témoigne de l’inventivité humaine et de la
diversité de leurs illustres représentants!:
Pourquoi la poule traverse-t-elle quand elle voit une auto ?
Albert Einstein!: Le fait que ce soit le poulet qui traverse la route
ou que ce soit la route qui se meuve sous le poulet dépend uni-
quement de votre référentiel.
Charles Darwin!: Les poulets, au travers de longues périodes, ont
été naturellement sélectionnés de telle sorte qu'ils soient généti-
quement enclins à traverser les routes.
Isaac Asimov!: La troisième loi des Poulets énonce qu'un poulet
doit protéger sa propre existence sauf si cette protection le force à
désobéir à un ordre humain ou à blesser un humain.
Emmanuel Macron : Le poulet a traversé la route pour trouver du
travail.
François Hollande : Le poulet n’a pas encore traversé la route,
mais le gouvernement y travaille. Parce que le changement c’est
maintenant !
Le Pape : Le poulet a démissionné il ne supportait plus la charge
de travail.
Gérard Depardieu : l’autre côté il y a la Russie et c’est beau la
Russie « ma couille »
Nelson Montfort : J’ai à côté de moi l’extraordinaire poulet qui a
réussi le formidable exploit de traverser cette superbe route : »
Why did you cross the road ? » » Cot cot ! » « eh bien il dit qu’il est
extrêmement fier d’avoir réussi ce challenge, ce défi, cet exploit.
C’était une traversée très dure, mais il s’est accroché, et… »
Thanks chicken
Richard Nixon : Le poulet n’a pas traversé la route, je répète, le
poulet n’a JAMAIS traversé la route.
Cantonna : Le poulet, il est libre le poulet. Les routes, quand il
veut, il les traverse.
Sébastien Loeb : Je ne comprends pas, théoriquement, le poulet il
avait le temps de passer.
Jean-Claude Vandamme : Parce que le poulet est Aware
Forest Gump : COURS POULET COURS !!!
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /89 189
Michaël Vendetta : Parce que le poulet c’est un winner ! C’est
beau gosse de traverser la route, y a que les loosers qui traversent
pas !
Bill Clinton : Je jure sur la constitution qu’il ne s’est rien passé
entre ce poulet et moi.
Moïse : Et Dieu descendit du paradis et Il dit au poulet : » Tu dois
traverser La route ». Et le poulet traversa la route et Dieu vit que
cela était bon.
Bouddha : Poser cette question renie votre propre nature de pou-
let.
Bill Gates : Nous venons justement de mettre au point le nouveau
Poulet Office 2022, qui ne se contentera pas seulement de traver-
ser les routes, mais couvera aussi des œufs, classera vos dossiers
importants, etc…
Sigmund Freud : Le fait que vous vous préoccupiez du fait que le
poulet ait traversé la route révèle votre fort sentiment d’insécurité
sexuelle latente.
Aristote : C’est la nature du poulet de traverser les routes.
Karl Marx : C’était historiquement inévitable.
Capitaine Cook : Pour aller aucun autre poulet n’était allé
auparavant.
Hippocrate : En raison d’un excès de sécrétion de son pancréas.
Martin Luther King : J’ai la vision d’un monde où tous les poulets
seraient libres de traverser la route sans avoir à justifier leur acte.
Nicolas Machiavel : L’événement important c’est que le poulet ait
traversé la route. Qui se fiche de savoir pourquoi ? La fin en soi
de traverser la route justifie tout motif quel qu’il soit.
Galilée : Et pourtant, il traverse.
L’Eglise de scientologie : La raison est en vous, mais vous ne le sa-
vez pas encore. Moyennant la modique somme de 150 Euros par
séance, plus la location d’un détecteur de mensonges, une analyse
psychologique nous permettra de la découvrir.
Donald Trump!: la poule courait rechercher ma balle de golf
Un des critères de la singularité technologique sera rempli, mieux que le
test de Türing, lorsque la machine saura produire des aphorismes équiva-
lents
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /90 189
IA et édition
Si je prends une série de brefs paragraphes extraits d’œuvres existantes
que je mets bout à bout, en y ajoutant images et photos, je produis une
nouvelle œuvre, le tout en citant les auteurs et les ouvrages sources.
Les extraits sont brefs et ne donnent pas lieu à rémunérer les auteurs. Les
images et photos sous copyright devront être payées aux auteurs vivants
ou morts depuis moins de soixante-dix ans. (Il en faut du temps pour que
le patrimoine mondial s’enrichisse!!). J’aurai alors le droit moral sur cette
compilation.
Vient le jour une Intelligence Artificielle transforme mon œuvre en
une œuvre l’on pourrait deviner les idées et les images sources, sans
certitude, au-delà d’un simple plagiat. Certains pensent que l’inspiration
de la machine serait une violation du droit d’auteur des œuvres utilisées
par l’algorithme informatique, considéré comme un lien effectif avec les
œuvres en entrée.
Qui touchera les droits d’auteur (une notion bourgeoise disait Jacques
Bertin, le chanteur)!? Y a-t-il une personnalité juridique à l’IA, qui devrait
être titulaire de droits et de devoirs!? Ou est-elle seulement liée à un être
humain, celui qui possède l’outil de création, ou celui qui permet de faire
éclore l’œuvre!?
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /91 189
Le singe Naruto qui, en 2008 s’est fait un selfie n’est pas un être humain,
mais la personne qui a permis que ce selfie soit pris en est un.
Dit crûment, tout ceci est une histoire d’ayant droits cupides et assez
riches pour encombrer la justice.
L’IA traduit de mieux en mieux. En quelques clics, les bulles des BD sont
traduites. L’IA automatise le nettoyage du contenu pour créer une version
numérique et aide à évaluer les textes (niveau de suspense, complexité des
phrases, niveau d’innovation…). L’IA propose des recommandations per-
sonnalisées. L’IA trie parmi des millions, les ouvrages scientifiques, juri-
diques, Les assistants d’écriture savent déjà rédiger des romans de
gare, des articles de presse, avec les biais sexistes, racistes, hoaxes, qui
sont dans les milliards de données sur lesquelles elle s’appuie.
Voir Rytr page 42 sur!:
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Futur/PeregrinagesFuturV2.pdf
Voir!: https://mastermsi.fr/deep-learning-et-droit-dauteur/
Chambre chinoise
John Searle a imaginé une expérience de pensée, qu’il a appelé la
Chambre chinoise !: il ne connait pas le chinois mais uniquement les
53
règles grammaticales et syntaxiques pour produire du texte en réponse à
des questions en chinois. Au fur et à mesure des questions, il arrive à
composer des textes de plus en plus signifiants, mais sans jamais com-
prendre ce qu’il écrit.
Par analogie, il veut montrer que l’Intelligence dite artificielle n’est pas
une intelligence, mais seulement un algorithme qui réagit de façon de
plus en plus sophistiquée, mais sans jamais avoir la conscience de ce qu’il
produit.
Autre exemple!: les assistants d’écriture (voir «!Pérégrinages aux futurs ,
54
page 47 Rytr), qui, à partir de quelques mots clés, sont capables d’écrire
un essai tout à fait correct sur le sujet.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chambre_chinoise
53
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Futur/PeregrinagesFuturV2.pdf
54
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /92 189
L’auteur des mots clés est le créateur, l’assistant d’écriture est l’outil de la
création, rémunéré en tant qu’outil et non en tant que co-auteur.
AlphaGo est le programme qui joue et gagne au jeu de go. Il n’a aucune
conscience stratégique, mais plus il joue, plus il s’enrichit des résultats de
son jeu.
Ethique de l’IA
Pour faire court!: la morale serait la pensée et l’éthique serait l’action. Il
serait donc vain de parler de la morale de l’IA, tout entière agissante et
jamais pensante (jusqu’à plus ample informé). L’éthique serait une ré-
flexion argumentée en vue du bien-agir. Qu’est-ce que bien agir!?
La puissance d’une IA augmente avec le nombre de machines qui parti-
cipent au problème posé. Ces machines rentrent dans un système multi-
national et échappent à toute régulation. Elles deviennent des prothèses
cognitives susceptibles d’orienter et de manipuler en dehors de tout
contrôle, en exacerbant les préjugés, en développant les outils de la ri-
chesse au préjudice des moins riches, en menaçant la diversité culturelle.
Le risque est grand d’être «!subtilement!» dominé par l’IA, éditrice de
normes.
Il faudra encore longtemps pour que les éducateurs comprennent les
risques de l’IA et forment les élèves à prendre le recul nécessaire pour
contenir une technologie qui n’est pas humaine, sachant que les humains
ont souvent des préjugés ou des biais cognitifs qui se transmettent dans
les données qu’ils utilisent.
L’IA bouscule les lois d’Asimov.
https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000367823_fre
L’IA est une prothèse, individuelle ou collective, produisant de la réalité
augmentée, sans que l’on puisse savoir le générateur de cette réalité vir-
tuelle. Par exemple, l’IA peut développer une nouvelle théorie philoso-
phique (économique, psychologique,!religieuse, …), acceptable par cer-
tains humains et réfutée par d’autres, alors qu’elle-même n’en comprend
pas le sens. Ainsi pourrait naître un nouvel eugénisme, ou autre indignité.
Les théories du complot ont de nombreux adeptes qui sauront se servir
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /93 189
de l’IA. Il est urgent de poser les bases de l’éthique des mondes virtuels,
face à la fabrication des zombies, tels que les Hikikomori, ces humains en
retrait social, habitants des mondes virtuels (métavers) dans lesquels ils
vivent à plein temps ou à temps partiels!: le Vendée Globe l’on régate
comme un solitaire, le vélo d’appartement l’on monte les cols comme
en vrai, seul ou avec des «!guildes!».
Inversement, l’IA peut produire des éléments de progrès, cadrant avec
nos grandes valeurs (Liberté, Egalité, Fraternité, Dignité,!…). Un jour
peut-être, notre nouvelle prothèse saura nous guérir de nos addictions,
nous donnera les moyens de remplacer le conflit par le dialogue, de repé-
rer les fausses informations… Comme l’a dit un hikikimori!: «!Les beautés
humaines se trouvent partout, cachées sous la crasse sociale, telles des
fleurs poussant sur les cadavres dans les abysses d’un monde noyé dans
son paradoxe!».
Le devenir de l’homme est de naviguer entre le bien et le mal, notions
floues et diversement comprises.
Le Jeu de la vie (Connway) modélise bien cette navigation entre le bien
55
et le mal, entre le noir et le blanc, avec un déterminisme régi par des lois
très simples qui peuvent transcender la conscience et le libre-arbitre. Il
limite la vie à une dualité dans un univers fini. Heureusement, le monde
est multiple. Si le fascisme gagne ici, le capitalisme gagne là, le socialisme
se développe par petite touches, la démocratie fluctue et pour l’instant,
l’humanité continue de vivre.
Le Jeu de la vie peut faire réfléchir les philosophes, mathématiciens, phy-
siciens, informaticiens, biologistes, sociologues,pour regarder le monde
dans sa totalité, un peu comme un fractale peut découper la côte à grands
traits ou à petits grains de sable.
On peut imaginer le Jeu de la vie appliqué à pro et anti-vaccins, à croyants
et athées, à imbéciles et intelligents. Sur chaque partie, il faut définir les
contraintes et leur pondération qui permettent de passer d’une couleur à
la couleur opposée.
https://www.cristal.univ-lille.fr/~jdelahay/dnalor/Jeudelavie.pdf
55
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /94 189
D’un tableau carré de cellules à deux états, l’IA pourrait réaliser des mo-
délisations plus sophistiquées, basées sur la logique ou sur des enquêtes
qui permettent de savoir dans quelles conditions les humains peuvent
changer de «!convictions!» ou peuvent adhérer à des éléments scientifi-
quement établis.
Un autre aspect éthique concerne les emplois que l’IA pourrait suppri-
mer. Jusqu’ici, le progrès technologique a fini par créer à peu près autant
d’emplois qu’il en a supprimé. Souhaitons que cette nouvelle mutation
s’opère dans le respect de la dignité humaine et des valeurs humanistes
qui peu à peu s’appliquent dans les entreprises.
La réglementation sur les informations «!trafiquées!» (deepfakes) doit pré-
ciser que tout contenu généré ou manipulé qui pourrait ressembler à un
contenu existant doit être étiqueté comme contenu inauthentique. La no-
tion de plagiat doit être complété par la notion de tromperie. L’IA doit dé-
velopper les outils de traque des manipulations et tromperies et de lutte
contre la cybercriminalité.
La CNIL doit aussi encadrer les caméras «!intelligentes!» qui savent re-
connaître et tracer une personne dans les lieux publics et privés, qui
pourraient faire le bonheur des détectives et des régimes totalitaires.
Le faux dilemme du tramway (ou du véhicule autonome )
56
Vaut-il mieux écraser un homme plutôt que deux!? Dans l'absolu,
la réponse est simple. Dans le relatif, la réponse ne paraît pas évi-
dente à tous. S'il s'agit de tuer les quelques porteurs d'un virus très
dangereux pour épargner les millions de victimes de la grippe es-
pagnole, la question est aussi compliquée que la réponse!? Le cer-
veau commence à se mettre en activité. Selon la conscience de cha-
cun, il y a ceux qui préfèrent que l'on tue abondamment en Syrie,
ou en Libye, plutôt que de voir mourir quelques soldats de chez
nous. Généralement, il y a ceux qui pensent planète et ceux qui
pensent village ou famille.
France-Info le 28/12/2022 : à WuHan (11 millions d’habitants), 52 taxis autonomes sans conducteur (le
56
reporter était dans le véhicule). L’argument est : «!Si un véhicule autonome peut avoir un accident, il est
nettement plus sécuritaire qu’un véhicule conduit par un humain!». La Chine ne s'encombre pas des
tergiversations morales et politiques des pays occidentaux. Ceux-ci devront suivre de mauvais gré
l'avance chinoise.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /95 189
L'arrivée du véhicule autonome est l'occasion de réfléchir peu pour cer-
tains ou beaucoup pour d'autres, de manipuler les opinions, par exemple,
à l'aide de pseudo-études scientifiques "En cas d'accident inéluctable
avec plusieurs piétons, quelle victime une voiture autonome doit-elle
choisir!?".
Question sur le sexe des anges!! Comme si l'algorithme devrait choisir
entre un PDG et un SDF, entre un gros et un maigre, entre un homme et
une femme, entre un enfant et un vieillard… entre un noir et un blanc,
entre un émigré catholique et un émigré bouddhiste… !!?? Sous couvert
de l'utilisation d'un nouvel outil de transport, certains chercheurs pro-
voquent à hiérarchiser les individus. La voiture autonome n'est qu'un
nouvel outil et non pas un fantasme. Laissons la morale en dehors de ces
réflexions malsaines… Ou alors, il n'aurait pas fallu inventer le feu!!
Au-delà du "dilemme du tramway" qui veut faire passer le véhicule auto-
nome pour autre chose qu’un outil de déplacement et forcer le quidam à
penser à l’aide de statistiques improbables, nous rechercherons sans
doute les déplacements "comme dans un salon", il est plus sympa-
thique de faire autre chose que d’être tout seul dans les embouteillages.
Voiture-cocon
La nécessité d’un déplacement est un concept difficile. Tout humain
en déplacement sait justifier son choix de se déplacer. La force de
l’habitude, la paresse intellectuelle, la peur de l’inconnu, les us et
coutumes, les contraintes secondaires, ... pèsent sur la décision de
ne pas entreprendre un déplacement ou de le faire différemment.
« J’ai pris ma voiture parce que, ... Certes, je subis les bouchons, ...
Le bus n’est pas pratique, ...!». Dans l’inconscient, la voiture a de
gros avantages. Elle isole socialement le conducteur pendant le tra-
jet ; la conduite domicile-travail est une sorte de méditation qui as-
sure la transition entre la vie à la maison et la vie au travail ; la
voiture permet de contraindre la famille à passer un moment en-
semble ; la conduite a un côté ludique, voire viril (le levier de chan-
gement de vitesse), voire d’appropriation d’une puissance ; elle est
symbole de richesse, de liberté géographique, le tout dans un fau-
teuil.... Autant de bonnes et mauvaises raisons pour faire, au
mieux, du 36km/h en vitesse effective si l’on compte le temps passé
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /96 189
à la financer et, en ville, ne pas aller plus vite qu’un vélo, moyen
bien mieux approprié pour se maintenir en bonne santé et ne pas
polluer sa ville.
Besoin atavique de dompter, de prolonger les récits merveilleux des
chevaliers du Moyen-Age, draguant la belle au bout de leur lance
érigée au combat du meilleur mâle. Besoin prosaïque de se dépla-
cer? Prosaïque, pas si sûr, du déplacement naît la mâle conquête
d'un territoire. Le plus grand territoire est celui du plus puissant et
du plus rapide. Reste le besoin apparent!: Transportez du bois, des
clous, des sensations, des maris, des amis, des idées, il en restera
toujours quelque chose, la circulation est le melting pot où le monde
se construit.
On peut penser que la voiture, en tant que moyen d'affirmation de
soi n'est pas prête de disparaitre, sauf à trouver des substituts. Nous
avons quelques décennies devant nous pour ce faire.
Ethique du Générateur automatique de code en langage na-
turel
Pour l’instant, il semble que ce type de machine ne fasse qu’assembler des
éléments déjà codés par des humains.
La difficulté réside dans le langage naturel lui-même. Celui qui parle et
celui qui écoute n’ont pas la même perception du sens de ce qui est dit.
Le cahier des charges d’un système un peu complexe est déjà un premier
niveau de codage. Ce cahier des charges a très souvent des lacunes et des
ambiguïtés. Celui qui l’écrit pense que sa rédaction est tout à fait
conforme au souhait du client, mais il n’y a que lui qui le pense!!
L’analyste qui lit le cahier des charges aura sa propre perception et pense-
ra qu’il a donné au développeur tous les éléments nécessaires pour une
bonne programmation.
Alors même que le client ne sait pas vraiment ce qu’il souhaite!!
Ce n’est qu’après de nombreuses itérations, tests, et usages que le produit
sera un compromis entre le concept du client et la réalisation.
Par exemple, voici un ordre simple!:
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /97 189
-Ecris «!Bonjour!»
La machine devra comprendre que le mot «!Bonjour!» doit être en prin-
cipe écris sur l’écran, en haut à droite, en caractère Times de 14 italiques,
sur un écran vierge…
Alors que le client souhaite que «!Bonjour!» soit écrit avec une écriture
manuscrite ressemblant à sa propre écriture, sur un message WhatsApp à
envoyer à ses dix petits-enfants. La machine ne fera le bon travail que si
elle a reçu précédemment les consignes à appliquer. En général, le client
ne donnera ces consignes qu’au vu du résultat…
Alors, imaginons que le ministère de la Justice souhaite donner aux ma-
gistrats un outil d’aide au respect des procédures en langage naturel, le
générateur automatique de code a du souci à se faire - façon de parler -
car le souci est le cadet de ses soucis -
Tant que la machine n’aura pas la faculté de comprendre le sens des don-
nées et des métadonnées à sa disposition, elle aura du mal à répondre aux
besoins flous du client.
La machine pourra faire illusion, comme peuvent le faire les «!assistants
d’écriture!» dont voici un exemple :
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&'()%*+,-./0$#%!"#$1%23(44)4#(5#%*3+,$)#.$0%
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%« Roman 19ème siècle pauvreté »
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"Le roman du XIXe siècle et la pauvreté : comment la révolution industrielle a
changé à jamais la vie des pauvres."
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /98 189
Introduction : Qu'est-ce qu'un roman du XIXe siècle ?
mots-clés : roman du XIXe siècle, romans gothiques, romans
Comment était la vie avant et pendant la révolution industrielle ?
mots-clés : pauvreté au 19e siècle en Angleterre, comment la vie a-t-elle changé
pendant la révolution industrielle ?
Pourquoi y avait-il un si grand écart entre les riches et les pauvres en Angle-
terre ?
mots-clés : inégalité dans la société
Quels ont été certains des facteurs qui ont conduit aux changements écono-
miques ?
mots-clés : ce qui a causé l'extrême pauvreté, les facteurs conduisant aux chan-
gements économiques
Les effets de l'industrialisation sur les femmes
mots-clés: femmes pauvreté angleterre 1900, femmes pendant l'industrialisation
Conclusion et principaux points à retenir
E0,)%/0.#%*)$0%B.0% !"#$% (% >()#% .50%$0,<0$,<0% *-,.805#()$0% =-.$% #$-./0$% 204%
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&'()%4+20,:-55+%M65#$-*.,:-5M1%05%(@-.#(5#%20%8-#D,2+%O%=-2):B.0%P%
%Introduction : Qu'est-ce qu'un roman du XIXe siècle ?
mots-clés : roman du XIXe siècle, romans gothiques, romans, politique
62%8'(%=$-=-4+%20%=($(;$(=<0%4.)/(5#%C%%%
"Un roman du 19e siècle est un genre littéraire qui était populaire au 19e
siècle. Il fait généralement référence à des romans écrits dans les années 1800
et comprend souvent des thèmes tels que l'horreur gothique, la politique et la
romance.
Le premier roman publié dans les années 1800 était Frankenstein de Mary
Shelley et il est considéré comme un membre du genre du 19ème siècle."
Q.)4%@'()%4+20,:-55+%20%*0.H)K80%)#08%C%
%Comment était la vie avant et pendant la révolution industrielle ?
mots-clés : pauvreté au 19e siècle en Angleterre, comment la vie a-t-elle changé
pendant la révolution industrielle
62%8'(%=$-=-4+%C%%
"La vie avant la révolution industrielle était dure et les gens vivaient dans la
pauvreté. Ils n'étaient pas en mesure de se nourrir et devaient compter sur les
riches et la classe ouvrière pour se nourrir. Pendant la révolution industrielle,
la vie a radicalement changé. Il y avait une demande de main-d'œuvre en
usine et les salaires ont augmenté de manière significative.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /99 189
La révolution industrielle est souvent considérée comme un moyen d'amélio-
rer la vie des gens puisqu'elle a conduit à une augmentation des salaires, mais
on peut se demander si ce changement a eu un effet net positif ou négatif sur
la société. La révolution industrielle a apporté de nombreuses nouvelles tech-
nologies telles que les moteurs à vapeur, les mines de charbon et les usines de
textile qui étaient couramment utilisées par les usines. Ces technologies nou-
vellement introduites ont causé des problèmes de santé tels que des maladies
pulmonaires en raison de conditions de travail dangereuses qui ont pu l'em-
porter sur les avantages découlant de ces progrès."%
R5%=0.#%=0540$%B.0%,04%+2+805#4%<)4#-$)B.04%4-5#%-?@0,:>4I%J(%$+*(,:-5%)5#$-D
*.)#%<(?)20805#%M8()4%-5%=0.#%40%*08(5*0$IIIM%B.)%)8=2)B.0%20%20,#0.$I%J0%#0H#0%
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%%
Q.)41%@3()%(@-.#+%F%23)#08%4.)/(5#%20%8-#%,2+%O%,-2-5)0%P%C%%
%Pourquoi y avait-il un si grand écart entre les riches et les pauvres en
Angleterre ?
mots-clés : inégalité dans la société, colonie
62%8'(%=$-=-4+%C%
"Les colonies étaient la raison de l'énorme fossé entre les riches et les pauvres
en Angleterre. Les colonies étaient responsables d'un afflux de richesses en
Angleterre, c'est pourquoi les écarts de richesse entre les classes sont devenus
si importants.
Les richesses provenant de ces territoires d'outre-mer ont entraîné un énorme
pic de croissance démographique. Les ressources naturelles des colonies ont
été utilisées pour alimenter l'industrie nationale, ce qui a contribué à alimen-
ter l'ascension de l'Angleterre en tant que puissance mondiale."%
T%
Ce résultat bluffant laisse perplexe, puisque, face à toute sorte de littéra-
ture, une machine est capable de faire un semblant de travail à la place de
l'écrivain, du journaliste, de l'étudiant, sans rien comprendre de ce qu'elle
a écrit...
Dans l'autre sens, la machine est aujourd'hui capable de produire un ré-
sumé de n'importe quel texte de n'importe quelle taille, en tenant compte
éventuellement des centres d'intérêt de l'utilisateur : gain de temps ou
appauvrissement de la pensée apprenante ?
Au-delà, ce type d’application de l’Intelligence donne le vertige!:
comment saurons-nous distinguer une œuvre issue d’une intelligence
humaine qui, a priori, comprend ce qu’elle écrit et pour qui elle écrit et
l’œuvre d’une intelligence artificielle qui ne sait qu’assembler des phrases
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /100 189
grammaticalement correctes faites à partir de concepts qu’elle n’aura ja-
mais compris.
Quelle éthique pour ces œuvres bâties sur du sable!?
IA et Justice
Si l’IA commençait par résoudre l’enchewingumement de la Justice, ce
serait formidable!: une justice qui serait capable d’expliquer rapidement à
tous les plaignants et à tous ceux qui subissent le contexte juridique de
leur conflit afin que chacun connaisse mieux ses droits et devoirs avant de
souhaiter l’arbitrage serein et rapide d’une conciliation ou d’un tribunal!;
une justice qui sache utiliser les moyens modernes pour instruire.
L’accès immédiat à la jurisprudence permettra aux avocats de prédire la
décision de justice pour son client. La Justice prédictive devrait homogé-
néiser les décisions. Une justice prédictive capable de condamner ou libé-
rer un justiciable sur une statistique jurisprudentielle sera une justice
déshumanisée.
Comme les médecins, les avocats ont fort à défendre face aux sites qui
soignent, assignent ou défendent à votre place. On peut rêver d'une jus-
tice plus rapide et plus homogène,!... mais pas forcément plus humaine à
défaut d'être humaniste. Si le résultat d’une décision de justice est connu
d’avance, cela peut inciter à la négociation, à la déjudiciarisation.
A question précise, réponse précise ! A question ouverte, réponse nébu-
leuse ! A question humaine, réponse humaine !
Éthique de la justice, avec la numérisation de lois et des décisions de jus-
tice. La hiérarchisation et le classement de ces montagnes d'information
requièrent des capacités d'analyse et de synthèse de haut niveau. On peut
craindre malheureusement que ces tâches soient réalisées par des gens
avides et intéressés et que le résultat biaise le jugement des uns et des
autres. Comme dans toute affaire humaine, la dimension humaniste du
traitement est fondamentale alors que l'Intelligence Artificielle a pour ca-
ractéristique d'être inintelligente.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /101 189
Un autre aspect concerne la définition de la conscience!: est-elle la même
chez un enfant de 3 ans et chez un homme de 80 ans!? L’IA pourrait nous
aider à un nouveau regard sur la responsabilité.
Les chercheurs de l’Académie chinoise des sciences ont développé un
«!procureur IA!» capable d’accuser avec une précision de 97% (!!).
D’après le professeur Shi Yong, ce procureur IA serait capable de
porter plainte pour les crimes les plus courants à Shanghai, il
est testé actuellement. Cela inclut la dissidence, les fraudes à la
carte bancaire, les jeux d’argent illégaux, la conduite dangereuse,
le vol, la fraude, les blessures intentionnelles et les entraves.
En tant que procureur, il serait capable d’identifier la dissidence à
l’égard de l’État et de suggérer des peines pour les criminels pré-
sumés, sans aucune intervention humaine.
Il faut s’attendre à ce que les régimes autoritaires suivent
l’exemple de la Chine pour traquer les contestataires. Il faut aussi
s’attendre à des utilisations illégales de l’IA par les avocats.
IA et Administration
Déposer une main-courante est un acte compliqué à la fois pour celui qui
dépose et pour celui qui enregistre. Ce genre d’acte officiel peut avoir lieu
dans toutes les institutions.
Exemples :
Faire une déclaration d’intention de travaux sur la voie pu-
blique
Faire une déclaration préalable de manifestation culturelle ou
politique
Déclarer un incident qui entrave la libre circulation ou la sécu-
rité sur la voie publique
Déclarer une situation dangereuse dans le domaine public
Établir un procès-verbal d’accident
Déclarer une incivilité dans une école
Écrire au Procureur
Déclarer une association ou une modification de statut
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /102 189
Suivre une opération publique
Tous les actes officiels qui conduisent à remplir un imprimé ou un ques-
tionnaire sont concernés. Depuis 1999, tous ces imprimés devraient être
dématérialisés et devenir eux aussi des objets immatériels connectés.
Dans beaucoup de cas, les renseignements à fournir sont déjà sous forme
numérique existant dans la sphère privée ou dans la sphère institution-
nelle. Par exemple, la carte de visite, la carte d’identité.
Idée 1 :
Une application personnelle (intelligence artificielle) qui, en tâche de
fond, organise les données personnelles que nous fournissons aux admi-
nistrations, dans un tiroir qui s’ouvre à l’oeil et/ou à la voix.
Cette application s’adresse aussi aux personnes morales (associations, en-
treprises…).
Lors d’une nouvelle connexion avec l’administration, les informations
demandées sont automatiquement recherchées et transmises. Pour y arri-
ver, l’application bénéficie de l’apprentissage réalisé par l’application lors
de précédentes opérations de même nature exécutées par d’autres inter-
nautes eux-mêmes abonnés au service.
Une application miroir permet à l’utilisateur de disposer de tous ses
échanges avec l’administration, horodatée, cryptée et sécurisée. L’applica-
tion trouve automatiquement tous les éléments afférents à sa recherche
en cours. Cette application cryptée et sécurisée peut aussi concerner la
santé.
Idée 2
Le télé-secrétariat institutionnel :
Le déclarant (gendarme, conducteur de travaux, …) appelle au téléphone
un télé-secrétariat qui conduit la conversation pour faire remonter l’in-
formation et la placer dans la base de données adéquate, sous la forme
adéquate. Les données remontant au télé-secrétariat peuvent être un lien
Internet, un message oral, une photo, une vidéo, un plan, un texte, … Elles
sont toutes automatiquement signées, géo-localisées, horodatées.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /103 189
Dans un premier temps, le télé-secrétariat est humain. L’IA institution-
nelle est programmée pour apprendre le métier de télé-secrétaire.
Typiquement, le constat d’accident ou de dégât au domaine public ou de
restriction de circulation, tous ces événements que l’administration
s’essaie à coder dans un jargon inutile (genre Datex).
Idée 3
Le Web-secrétariat.
Une application institutionnelle indispensable est la tenue d’un site de
suivi de chaque marché public :
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Blogrinages/Blogrinages_citoyens/Marches_-
publics_Donnees_publiques.pdf.
Les Maîtres d’Ouvrage sont des gens débordés qui délèguent mal leur
communication et ne veulent pas perdre de temps à faire vivre l’informa-
tion vers le public comme vers leur propre service. L’application aurait
pour mission d’inciter le Maître d’Ouvrage à fournir les informations puis
à les organiser pour que ce soit lui-même, personnellement, qui mette le
site à jour. Cette procédure qui implique directement le responsable est
garante de la fiabilité du site. L’incitation est sous forme de dialogues par-
lés, avec programmation du prochain rendez-vous de mise à jour.
Idée 4
Une autre application est la tenue de la base de données associative en
préfecture :
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Projets/Humanisme/Assos_en_prefecture.html
Cette base de données est très utile pour le suivi des subventions, qui
peut aussi faire l’objet d’un télé-secrétariat. Les dossiers de demandes de
subvention sont une caricature de notre monde administratif. Il serait
temps que ce magma de données soit mis intelligemment à la disposition
des élus qui décident des subventions et des citoyens qui s’interrogent sur
la répartition de leurs contributions financières ou morales aux institu-
tions.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /104 189
L’application aurait pour objectif d’automatiser la relation entre les ser-
vices concernés par les subventions : demandeur, montage des dossiers,
suivi des dossiers, élus, trésoriers.
Les agents administratifs affectés actuellement à ces tâches pourraient
être utilement affectés aux Maisons administratives de quartier pour hu-
maniser les relations des citoyens avec l’Etat, avec les moyens nécessaires
à leur polyvalence!: une IA en réseau, apprenant au fur et à mesure des
cas à traiter, avec pour objectif!: l’égalité de tous devant la loi, devant le
droit au logement, devant la subsistance des plus démunis, devant le droit
au travail, devant les accidents de la vie, devant les problèmes liés à la
vieillesse et à la jeunesse. Il y a tant à faire pour humaniser la société.
Manipulations du cerveau
Le taureau de Delgado s’arrête de charger sur simple stimulation élec-
trique dans le noyau caudé.
Robert Heath, psychiatre, prétend guérir de l’homosexualité par stimula-
tion électrique des circuits du plaisir quand le patient regarde du porno
féminin.
Peter Milner stimulait le septum d’un rat qui pressait frénétiquement une
barre métallique jusqu’à épuisement.
De à penser que des stimulations ciblées pourraient soigner les addic-
tions!!?
Inversement, le cerveau sait produire des signaux capables d’actionner
des prothèses ou autres robotismes.
Des chercheurs américains et brésiliens ont osé connecter entre eux les
cerveaux de deux rats, montrant que ce couple était plus performant que
des rats individuels. A quand les savants fous qui se connecteront leurs
propres cerveaux!?
Via vos réseaux sociaux, le lavage de cerveau devient possible, avec de
fausses réalités, de faux discours. Déjà, il est possible de vous inculquer de
faux souvenirs, que vous soutiendrez de bonne foi devant les tribunaux.
La réalité augmentée est une pieuvre qui s’introduit dans tous les do-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /105 189
maines, jusqu’à vous faire voter à l’inverse de vos convictions, voire à
changer vos propres convictions.
Et s’il n’y avait qu’un pas entre prédire les élections et s’y présenter ? Si
l’idée peut sembler absurde, elle s’est pourtant déjà -presque- concrétisée.
La plateforme Watson d’IBM s’est ainsi portée candidate à l’élection pré-
sidentielle américaine en 2016. Si c’est l’artiste Aaron Siegel et non IBM
qui est à l’origine de cette idée et à l’initiative du site de la campagne,
cette « candidature » a!de quoi faire réfléchir quant à la place de l’intelli-
gence artificielle dans la vie politique future.
https://www.alain-bensoussan.com/avocats/intelligence-articielle-pre-
dire-les-elections/2017/05/10/
Abstraction
J'ai toujours une belle émotion en entrant dans une cathédrale. Ceux qui
l'ont bâtie se sont servi de dessins à plat qu'ils interprétaient en trois di-
mensions pour tailler leurs pierres dans un beau et bas-relief. Cela s'ap-
pelle, dans nos lycées, la géométrie descriptive.
Parlons de la richesse de 1,61803398875 que les conservateurs de musée
gardent dans le secret de leurs tableaux et que nous appelons "nombre
d'or".
Dans l'abstraction pure, jongler avec la racine carrée d'un nombre négatif
ou avec des dérivées partielles peuvent pour certains élus être éle au
rang d'art. Que dire aussi des nombres hypercomplexes!? Ne parlons pas
du calcul probabiliste qui permet d'abaisser l'art au niveau de la particule
élémentaire, ni des théories musicales qui nous décortiquent la beauté
des notes, sans parler de la comptine qui chante les tables de multiplica-
tion.
Que serait un double arc-en-ciel sans la théorie des ondes ?
Mathématiques, latin, grec, même combat.
A la question d'un journaliste lui demandant pourquoi il avait gravi l'Eve-
rest, Sir Edmund Hillary, qui avait été le premier au sommet (1953), ré-
pondit : "Parce que cette montagne était !!". Le journaliste n'avait sans
doute pas la notion d'abstraction.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /106 189
Dans leur tribune "Aux Etats-Unis, l'enseignement des maths est totale-
ment obsolète" (Le Monde du 14 septembre 2020), Sol Garfunkel et David
Mumford, mathématiciens américains, ne pensent pas qu'il soit utile de
savoir résoudre une équation du second degré ou de savoir ce qu'est un
nombre complexe.
La capacité d'abstraction est un fondement de la pensée humaine, et il
faudrait la remettre en cause, au nom de la seule mathématique utile, sec-
torisée comme chez les fourmis ?
Quelle étroitesse d'esprit !
N'apprendre que ce qui est utile à la civilisation (américaine) d'aujourd'-
hui, sans penser à ce qu'elle sera dans cent ans, sans penser à la créativité
des futures générations !
Pourquoi ne pas aussi remettre en cause la géométrie ou du moins la can-
tonner aux seules connaissances nécessaires à monter un meuble préfa-
briqué ?
Faut-il rappeler que la démonstration géométrique est une voie royale
pour l'apprentissage du raisonnement logique ?
Quant au latin, que ces messieurs rangent avec mépris au rayon des tradi-
tionalistes, il n'est sans doute pas nécessaire de le parler pour être un bon
citoyen, mais il est utile d'en connaître les éléments linguistiques qui ont
structuré la société occidentale afin de les comparer aux autres approches
historiques et contemporaines. Le caractère cyrillique, l'idéogramme,
l'écriture arabe sont, comme le latin et le grec, des référentiels pour notre
futur et pour notre diversité. Doutons qu'un jour la terre entière parle
l'anglais et que chacun soit déterminé à sa naissance par un progrès de
science-fiction !
L’abstraction du zéro
Le zéro nous est familier. Il ne l'a pas toujours été. Définir quelque chose
qui n'existe pas et qui néanmoins est d'une énorme importance n'a pas
été facile. Ainsi, Euclide énonce : « Est unité ce selon quoi chacune des
choses existantes est dite une ». En d'autres termes, est un ce qui existe.
Le vide n'existant pas selon Aristote, le nommer est sans intérêt voire
faux.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /107 189
Parménide!(-500) proclama que le néant ne pouvait exister, parce que parler de quelque
chose le fait, de facto, exister.
Vers -300, le!manuscrit de Bakhshali!au Pakistan, écrit sur de l'écorce de bouleau montre
que le point était employé comme notation du zéro.
Le!papyrus de Rhind, découvert à Thèbes (Egypte), daté de -1600, montre que les Egyptiens
étaient de bons mathématiciens, mais sans utilisation du zéro. Pour les!Egyptiens, le zéro
est le niveau zéro d'une construction. Les distances verticales se mesuraient au-dessus ou
dessous de ce niveau. Il ne semble pas qu'il ait servi à compter. Pour les Anglo-Américains,
le Ground Zero est l'endroit précis sur le sol où a lieu n'importe quelle explosion. C'est aus-
si le lieu symbole de la destruction des Twin Towers en 2001.
Quand ils ont commencé à compter,!les Babyloniens, vers -2000, ont eu l'idée de placer des
espaces entre les nombres pour assurer des fonctions diverses, comme séparer les unités
des dizaines, puis, vers -300, ils ont inventé un vrai zéro, représenté par un double che-
vron incliné…
Les Sumériens (Mésopotamie) ont commencé à compter très tôt :
Il y a 5000 ans, les!Mésopotamiens!utilisaient un symbole rond pour le nombre 10, qu'ils
utilisaient aussi pour décupler le nombre 60 ou pour décupler le nombre 3600. Aujourd'hui,
au lieu de ce système sexagésimal, nous l'appliquons sur notre système décimal ou le zéro
a la même fonction.
Les Chinois dans leur écriture avec les baguettes, ont utilisé l'espace vide pour le chiffre
des dizaines, mais il ne semble pas que le concept mathématique du zéro soit évoqué
avant la dynastie Ming (1368-1644)
Les Mayas utilisaient le concept de zéro vers l'an 300, mais uniquement pour préciser la
position des nombres entre eux et pour leur calendrier, chaque mois comptait 20 jours
de 0 à 19.
Ce n'est qu'avec!Fibonacci!que le zéro s'introduit dans la science florentine. Le livre des cal-
culs!(1202) est un!traité!sur les!calculs!et la!comptabilité fondée sur le!calcul décimal!à une
époque tout l'Occident!utilise encore les chiffres romains!et calcule sur!abaque. Ce livre
est fortement influencé par son enfance vécue au sud et à l'est de la Méditerranée ; il est
d'ailleurs rédigé en partie de droite à gauche.
Par cette publication, Fibonacci introduit en Europe le système de!notation indo-arabe!im-
porté des Indes par les invasions arabo-musulmanes. Ce système est plus puissant et plus
rapide que la notation romaine, et Fibonacci en est pleinement conscient. L'invention sera
d'abord mal reçue car le public ne comprend plus les calculs que font les commerçants. En
1280,!Florence interdit même l'usage des chiffres arabes par les banquiers. On juge que le
zéro apporte la confusion et des difficultés au point qu'ils appellent ce système!cifra, qui
dérive du nom arabe du zéro (al sifr = vide, zéro).
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /108 189
Le zéro sert à dire beaucoup de choses : le vide, le néant, le rien, le nul.
Arthur Koestler a utilisé le zéro et l'infini pour dénoncer la déshumanisa-
tion d'un pays totalitaire où le zéro est l'individu et l'infini est le Parti.
Le zéro sert à dire les dizaines, les centaines, les milliers, Pour les
grands nombres, on écrit 10 où n est le nombre de zéros qui suivent l'uni-
té. Un million, c'est 10 à la puissance 6, qui vaut 1 suivi de 6 zéros, soit
1!000!000.
Le zéro ouvre un concept important à comprendre.
Voici un extrait du livre de Mickaël Launay – Le grand roman des maths!:
"Si je vous dis que j'ai déjà marché un certain nombre de fois sur la planète
Mars ou que j'ai rencontré un certain nombre de fois Brahmagupta en per-
sonne, me croiriez-vous ? Probablement pas. Et vous auriez bien raison car,
dans notre langue ces phrases signifient que j'ai effectivement déjà marché
sur Mars et rencontré Brahmagupta. Et pourtant, en mathématiques, il suf-
fit d'imaginer que ces nombres valent zéro pour comprendre que je n'ai pas
menti. La langue utilise des structures différentes, selon qu'un chose est ou
n'est pas :
affirmation :" J'ai marché sur Mars" ;
négation :" Je n’ai pas marché sur Mars".
Les mathématiques, elles, vont gommer ces différences pour les regrouper
en une seule et même formule. "J'ai marché un certain nombre de fois sur
Mars". Ce nombre peut être zéro.
J'ai marché zéro fois sur le GR5, j'ai marché 2 fois sur le GR5. Ici naît le
sens de la formule… Si 2 à la puissance 2 est 4, 2 à la puissance 0 est 1.
Voilà une algèbre surprenante.
Le zéro ouvre aux nombres négatifs. Dans une multiplication, le zéro a le
culot d'annuler l'autre nombre ou carrément une expression. Divisé par
zéro, le résultat est infini, avec mort instantané du logiciel imprévoyant.
Un autre concept mathématique est que le zéro est la limite de l'infiniment
petit. Avec ce concept, s'ouvrent les notions de séries numériques ou géomé-
triques.
Pour les physiciens Kelvin et Rankine, le zéro absolu est la température la
plus basse qui puisse exister. Pour Fahrenheit, c'est la température du gel
de la saumure, pour Celsius, c'est le gel de l'eau distillée, pour Delisle, c'est
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /109 189
la vaporisation de l'eau. Pour la pression, le bar-jauge est à zéro à la pres-
sion atmosphérique alors que le bar absolu est à zéro dans le vide.
Avec le zéro, nous pouvons situer le méridien de Greenwich et l'équateur,
qui sont des références pour situer un point sur la Terre. Sans le zéro, nous
ne saurions construire des systèmes de coordonnées à 2 ou 3 dimensions
(surface ou volume) et au-delà, avec des systèmes à n dimensions. Nous
n'aurions pas non plus accès aux nombres imaginaires (les racines carrées
des nombre négatifs)
Le zéro est aussi l'origine des durées. Chaque jour à minuit, il est 0 heure
du jour suivant. Le système binaire de nos ordinateurs est basé sur des zé-
ros et des uns exclusivement.
Voilà donc un "rien" qui est beaucoup.
Intelligences et Bêtise
Intelligences au pluriel face à bêtise au singulier.
Intelligences au pluriel rend hommage à la biodiversité, celle des
hommes, des animaux, des plantes et des rochers. Il faudra toute l’intelli-
gence humaine pour sauvegarder ce patrimoine de plusieurs milliards
d’années.
Mais il n’y aurait pas d’intelligences s’il n’y avait pas de Bêtise, avec un B
majuscule. L’imperfection est «!ontologique!», elle est, comme nous
sommes. Chacun d’entre nous possède une part d’intelligence et une part
de bêtise (la méchanceté en fait partie) et collectivement, nous avons notre
force de réflexion et notre force de passion. Nous savons réfléchir de tra-
vers, tout autant que notre gène de la passion nous dévore. C’est le Jeu de
la vie.
Intelligence au singulier face à bêtises au pluriel.
Les bêtises, au pluriel, sont l’écume des jours. Nous apprenons de nos er-
reurs, cent fois sur le métier il faut remettre l’ouvrage, nous dominons nos
pleurs et nos peurs.
L’Intelligence, avec un I majuscule est la noblesse de l’humble. Nous
avons l’opportunité de comprendre comment fonctionne le monde, de
l’infiniment petit à l’infiniment grand, avec de grandes questions!: pour-
quoi la vitesse de la lumière est une limite!; comment jaillit notre
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /110 189
conscience!; l’Univers a-t-il un commencement!; d’où venons-nous et
allons-nous,!?
Avant l’Univers, il ne pouvait y avoir quelque chose. L’Univers est tout ce
qui existe. Si la «!transcendance!» est le Tout, alors elle appartient à l’Uni-
vers, qu’elle ne peut donc avoir créé... L’énergie du vide n’est peut-être
pas nulle, si l’on se réfère à la théorie d’un univers qui en remontant le
temps se contracterait de plus en plus jusqu’à un volume égal à zéro. Une
énergie infinie dans un volume initialement nul !!! Il ne pourrait y avoir
d'énergie nulle, car alors le temps ne pourrait exister!!!!
La question n’a pas de réponse, alors à quoi bon la poser!!
Qui sont les génies et qui sont les imbéciles ?
Ajoutons une quatrième dimension :
L'homme, dans son souci de se perpétuer, laisse des marques de son pas-
sage dans l'univers. Des enfants, autant que ses œuvres, attestent de sa
courte existence. Dans mille ans, il restera peut-être Jeanne d'Arc, plus
pour son mythe que pour ses actes ; Charlemagne, qui a préfiguré l'Eu-
rope ; Galilée et Einstein ; la Tour Eiffel...
Mais l'imbécile qui a torturé dans un sous-sol, qui a violenté l'un ou les
autres, qui a signé l'ordre d'une guerre : sera sa postérité, qui osera se
souvenir de son ancêtre indigne ?
La vie est trop courte pour se radicaliser. Passer des dizaines d'années
dans l'étroitesse d'un discours unique de violence, c'est être un
imbécile, ... surtout s'il s'en réfère à un dieu.
IA et véhicule autonome
Voir à la page 59 de http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Innova-
tions/Innovations.pdf
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /111 189
Annexes
Olivier Thibault
http://fr.canoe.ca le 10-02-2017 | 10h01
7 questions pour mieux comprendre les algorithmes
Le terme algorithme est devenu une notion centrale et polémique
dans l'univers numérique. Il symbolise les dangers et dérives d'un
monde automatisé, conditionné par des logiques commerciales.
Avant d'être associé en bien ou en mal aux recherches sur Google,
aux fils d'actualité sur Facebook et aux recommandations d'achat
sur Amazon, algorithme c'est au départ un savant persan.
Le mot découle d'une déformation en latin médiéval (avec in-
fluence du grec arithmos, nombre) du nom du mathématicien et as-
tronome du 9e siècle Al-Khwarizmi, considéré comme le père de
l'algèbre.
Un algorithme, c'est quoi au juste!?
Comme une recette de cuisine, un algorithme est une «série d'ins-
tructions permettant d'obtenir un résultat», explique le sociologue
Dominique Cardon dans son ouvrage À quoi rêvent les algo-
rithmes.
La notion était familière des seuls mathématiciens avant qu'elle se
popularise avec le développement de l'informatique (un pro-
gramme est un algorithme) et devienne un concept clé des rouages
d'internet.
Où sont les algorithmes!?
«Nous sommes littéralement entourés d'algorithmes» explique le
spécialiste des sciences de l'information Olivier Ertzscheid.
«Chaque fois que nous consultons Facebook, Google ou Twitter
nous sommes directement exposés aux choix» que font pour nous
des algorithmes et «parfois influencés par eux».
Les algorithmes règnent dans les salles de marché pour réaliser des
ordres d'achats/ventes à grande vitesse («trading haute féquence»)
avec l'inconvénient de provoquer des «krachs éclair», chutes bru-
tales et exagérées de cours. Ils sont aussi devenus auxiliaires de po-
lice, capables d'anticiper les lieux des délits risquent d'être
commis.
Un algorithme est à l'origine de Google: PageRank (PR) a été mis
au point dans les années 90 à Stanford (Californie) par Larry
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /112 189
Page (d'où son nom) et Sergey Brin, les deux fondateurs de la
firme.
PR permet de classer la popularité des pages web. C'est le coeur du
moteur de recherche Google qui en une fraction de seconde répond
à une demande composée de mots clés. Aujourd'hui Google utilise
une «dizaine d'algorithmes comprenant chacun des milliers de pa-
ramètres et variables», selon Olivier Ertzscheid.
Facebook fonctionne avec des algorithmes sophistiqués pour offrir
des contenus personnalisés à ses 1,18 milliard d'utilisateurs quoti-
diens, en particulier pour les «fils d'actualité» qui compilent mes-
sages «d'amis», articles partagés, etc., sélectionnés en fonction de
l'activité et des contacts de chacun sur le réseau social.
Le danger ici, c'est la « bulle de filtres », selon l'américain Eli Pari-
ser qui a développé ce concept dans le livre The Filter Bubble: à
force d'être entouré d'informations filtrées par des algorithmes en
fonction de ses amis, goûts et précédents choix numériques, un in-
ternaute est plongé à son insu dans une «bulle cognitive» qui ren-
force sa perception du monde et ses propres convictions.
Algorithmes et vérité
Un autre danger a été mis en lumière lors de l'élection présiden-
tielle américaine!: la circulation sans véritable frein de fausses in-
formations (fake news) ou de canulars malveillants (hoax). Les al-
gorithmes de Facebook n'ont pas été conçus pour distinguer le vrai
du faux, tâche d'ailleurs compliquée pour une intelligence artifi-
cielle.
La compagnie de Mark Zuckerberg qui se définit comme un service
et non pas un média, refuse d'être « l'arbitre de la vérité ». Elle a
toutefois réagi aux critiques, fin 2016, proposant des outils pour
permettre aux utilisateurs de signaler les informations douteuses.
Anticiper nos comportements!?
On peut distinguer quatre grandes « familles » d'algorithmes, selon
Dominique Cardon!: ceux qui calculent la popularité des pages
web, ceux qui classent leur autorité, ceux qui évaluent la notoriété
des utilisateurs des réseaux sociaux et ceux qui tentent de prédire
l'avenir. Cette quatrième catégorie est « problématique », selon le
sociologue, car elle tente d'anticiper nos comportements à partir
des traces que nous avons laissées sur le web par le passé. C'est par
exemple la technique d'Amazon pour recommander de nouveaux
livres à un client en fonction de ses lectures récentes.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /113 189
Passager de mon Univers
Tant qu’à relativiser, c’est du monde en-
tier qu’il faut parler : les êtres vivants
sont d’une immense diversité et
l’homme qui a du temps n’en est qu’une
infime partie. Et encore, il n’a qu’une
infime partie du temps, car il meurt, ce
passager de l’Univers. Que nos que-
relles sont vaines dans ce grain d’es-
pace-temps. Pourquoi l’homme n’en a
t'il pas conscience ?
Au profond de moi-même, je me sens passager de l’univers. Je dirais même
plus «passager de l’univers de ma conscience», en pensant que cet univers
que je contemple et qui me fait exister n’est pas exactement le même que
celui que perçoit chacun d’entre nous. Chacun a le point de vue de là où il
se trouve dans l’espace-temps. L’univers perçu par un pharaon n’est pas
l’univers perçu par un prix Nobel de mathématiques, lui-même largement
différent de l’univers perçu par un intouchable. Sans parler de la terre plate
du moyen-âge ou du mysticisme de la terre creuse, les hommes voient le
soleil, la lune, la voix lactée. Bien peu sont capables de décrire l’univers
admis par les scientifiques d’aujourd’hui, depuis l’organisation de l’atome
jusqu’aux confins de l’univers tangible, depuis son big-bang jusqu’à son
implosion dans un lointain futur. Plus près de nous, entre les créationnistes
et les darwiniens, entre les obédiences religieuses ou athées, l’univers so-
ciétal est un peu secoué. Entre le Mur des lamentations et les Moulins à
prière, la conscience de l’univers est bien subtile, celle-là même qui se
construit au sein de la famille, de l’école, de la télévision et aujourd’hui
des réseaux sociaux.
Comme un arc-en-ciel : tous ceux qui le regardent pensent qu’ils voient le
même arc-en-ciel, alors que ce n’est pas le même. Chaque oeil reçoit des
rayons lumineux qui lui sont propres. Le soleil est le même, mais les
gouttes d’eau diffractent celui-ci d’une seule manière pour chaque oeil.
Platon l’a dit depuis longtemps avec les ombres dans sa caverne : la
conscience de l’univers est différente pour chacun.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /114 189
C’est pourquoi j’ai mon épitaphe :
Cette vision de la vie rend pru-
dent dans l’élaboration de nos
convictions. Nous ne sommes
que de petites fourmis et vivre
et mourir, comme n’importe
quelle petite fourmi, cela n’est
pas très grave (...Vous en parlez
à votre aise, comme dirait
Raymond Queneau !)...
La différence entre la fourmi et
nous tient dans notre conscience d’exister et dans la perception que nos
choix sont déterminants pour nous-mêmes et pour la société qui nous en-
toure. Mais la société qui nous entoure change-t’elle fondamentalement
selon nos choix de petite fourmi. Un jour ou l’autre, quelqu’un aurait in-
venter l’écriture, la machine à vapeur et les ordinateurs. On s’étonnera
pourtant de la diversité des modes de vie et de pensée qui subsistent et co-
habitent après des milliers d’années de conscience de nos existences.
La société qui nous entoure est comme l’univers. Chacun s’en fait sa
propre représentation. Elle peut être très limitée, à deux ou trois personnes
avec au-delà un «brouillard d’hommes» ou au contraire élargie au-delà des
perceptions physiques, par le truchement de l’information qui confirme
l’existence de milliards d’autres êtres humains.
Est-ce que le devenir des Papous peut influer sur le devenir de soi ou de ses
enfants ou autres descendants qui nous sont chers ? Chacun fait sa propre
réponse selon qu’il a bien du mal à survivre à sa misère, ou qu’il se nourrit
de superflu, ou qu’il pense à la terre qu’il laissera à ses enfants, ou qu’il
considère la dignité humaine. Ma conviction est que ce que chacun pense
n’est pas de grande importance au milieu de l’infini de l’univers.
L’inquisition au Moyen-âge, les conquêtes de Charlemagne et tant d’autres
grands événements de l’histoire semblent aujourd’hui bien dérisoires. Ont-
elles fondamentalement changé la nature humaine, empêché la science de
comprendre ? Les folies meurtrières n’empêcheront pas la terre de tourner.
Alors pourquoi être un fou meurtrier ? Simplement parce que c’est notre
héritage d’homme que d’avoir soudain des idées fixes, irrépressibles - enfin
presque - seuls les faibles qui se croient forts ont du mal à changer d’avis.
Irrépressibles et virales doit-on ajouter. L’homme possède le gêne du mimé-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /115 189
tisme. D’une génération à l’autre il reproduit ce qu’il a reçut de son en-
tourage. Parfois il peut aussi être pris dans une épidémie comportementale
irrationnelle, comme le fou-rire ou des crises d’érotomanie chez les Ursu-
lines (si ! si!) ou autres hystéries collectives beaucoup plus tristes (Inquisi-
tion, Kmers rouges, Révolution culturelle, génocides,...).
Dans notre perception de l’univers, malgré la supériorité de notre
conscience, nous appartenons au règne animal sur la planète terre et
comme tous les animaux, notre moteur est la pérennisation de l’espèce,
avec ou sans ordinateur, avec ou sans procréation artificielle, consciem-
ment ou inconsciemment. Nous sommes des fourmis humaines.
Tant qu’à relativiser, c’est du monde entier qu’il faut parler : les êtres vi-
vants sont d’une immense diversité et l’homme qui a du temps n’en est
qu’une infime partie. Et encore, il n’a qu’une infime partie du temps, car il
meurt, ce passager de l’Univers. Que nos querelles sont vaines dans ce
grain d’espace-temps. Pourquoi l’homme n’en a t’il pas conscience ?
Ayant dit cela, il faut vivre et accepter les accepter les contingences du
monde et encore, il faut les relativiser : dans l’écume de la vie, je me
veux citoyen du monde et je n’ai pas encore bien défini ce que devrait être
mon humanisme.
Je ne sais pas si ces chiffres sont honnêtes, mais du moins sont-ils cré-
dibles!:
70% de non blancs, 70% de non chrétiens, cela relativise, cela angoisse.
6% possèdent 60% des richesses et 80% sont sans abri, cela relativise, cela
culpabilise.
Mais aussi, cela déclenche des réflexes de protection par la violence ou
par le droit. Il y aurait des guerres justes ? Non ! Ce n’est pas avec des
guerres que l’on arrêtera la violence. Une guerre humaniste n’existe pas.
Ceux qui s’enrichissent sur le dos des massacrés savent nous le faire
croire... parfois de bonne foi ! Et cela peut durer 100 ans... On enseigne
l’Histoire, mais de façon désincarnée : les guerres ont existé, cela est du
passé, on ne le changera pas. «Plus jamais ça» est une incantation. Et les
professeurs d’Histoire se garderont bien de faire philosopher les élèves.
C’est aux philosophes de parler du mythe de Sisyphe, encore faut-il une
longue vie pour le comprendre.
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /116 189
Quelle est votre conception du monde ?
Le monde est imparfait et c’est parce qu’il est imparfait qu’il existe. On peut
dire que c’est une posture philosophique. Vous considérez que cette table est
une réalité, parce que nous la percevons tous les deux. Mais quand je parle
de la table de votre salle à manger, c’est aussi une posture philosophique.
Votre table n’existe que parce que vous l’avez perçue et parce que j’imagine
que vous avez une salle à manger. Le monde existe parce que tous les êtres
humains le perçoivent. C’est la généralisation de la phrase de Descartes : «Je
pense donc je suis». Pour faire exister les autres, il faut leur donner la faculté
de penser, de bâtir leur propre conception du monde en fonction de ce qu’ils
en perçoivent. Il faut que ces différentes perceptions de chacun soient cohé-
rentes entre elles. Le monde a une obligation de cohérence.
L’imperfection et l’obligation de cohérence «ontologiques» du monde font
que nos perceptions peuvent ne pas coïncider tant que toutes les pièces du
puzzle ne sont pas entrées dans notre pensée. Ainsi, certains pensent que
l’homme n’est jamais allé sur la lune, comme jadis certains pensaient que la
terre était plate. Qu’un vice-président des Etats Unis soit “créationniste” laisse
perplexe. L’homme imparfait est heureusement et malheureusement manipu-
lable. Heureusement, il a réussi à poser Philae sur Rosetta (voir "Le génie et
l'imbécile"), malheureusement, il a commis et il commet encore d’insoute-
nables exactions. Napoléon nous a légué le Code civil, mais a laissé plu-
sieurs millions de morts lors de ses conquêtes inutiles (inutiles ? Certains di-
ront le contraire). Les hommes prennent le pouvoir qu’on leur laisse prendre.
Les rois de droit divin ont pris le pouvoir que la pensée religieuse de chacun
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /117 189
leur a donné. Les tyrans sont devenus tyrans par la manipulation. Les bour-
reaux aussi.
Le fait que nous percevons tous le même monde nous déclare une responsa-
bilité collective. Nous sommes collectivement responsables des actes de tous,
c’est à dire que nous sommes individuellement à la fois responsables et irres-
ponsables des actes de chacun, par exemple dans le rapport entre le pouvoir
économique et le pouvoir politique.
Cette inter-responsabilité devrait nous éviter de juger trop vite et de nous dé-
douaner de ce qui nous révolte. Est-ce que le gamin des cités qui fait une
connerie est seul responsable, est-ce que ses parents sont seuls responsables,
est-ce que la décolonisation est seule responsable ? C’est plus facile de poin-
ter la responsabilité des autres...
Cette inter-responsabilité oblige à être solidaire de ses proches tout autant
que des autres.
Nous avons tous nos imperfections, un zeste d’imbécillité, de faiblesse que
nous combattons par une certaine rigidité qui devient obsession ou inté-
grisme pour soi-même. Cet intégrisme personnel peut s’agglomérer dans la
société et devenir, si le milieu est propice, de l’extrémisme avec ou sans ac-
tions violentes isolées ou en meute. Parfois notre imperfection native se tra-
duit en recherche du pouvoir, sous toute ses formes et avec toutes ses dérives.
L’imperfection du monde est paradoxale. Elle conduit à la diversité crois-
sante, au développement de la pensée et de la connaissance, à l’éclosion
permanente du beau qui ne saurait exister sans le laid, à la permanence des
imbéciles et des génies - que chacun s’y reconnaisse!! -. En acceptant l’im-
perfection, nous sommes voués à la bienveillance, à regarder le monde sans
acrimonie, à ne plus regarder les «méchants» comme des coupables. Etre
bienveillant, ce n’est pas excuser, mais comprendre. La bienveillance, c’est
aussi admettre que le libre-arbitre n’est pas un dogme, mais une façon de
penser et d’agir globale.
Serais-je atteint du syndrome de Stockholm ?
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /118 189
Transcendances
La notion de transcendance ne peut être
que personnelle, car aucun homme ne vit
intérieurement comme un autre. Tout au
plus essaie-t'il de se calquer sur un
groupe qui le sécurise dans son interroga-
tion existentielle : pourquoi suis-je ?
Plus profondément, cette question
concerne l'attitude intérieure incons-
ciente de chacun face à la mort. Il s'agit
d'un tabou, que les hommes transforment
en philosophie de vie ou en morale. Il
semble qu'il y ait plusieurs niveaux d'ap-
préhension de l'univers :
les créationnistes qui pensent que la terre
a été livrée telle que le décrivent des livres
qu'ils considèrent comme "révélés".
les créationnistes qui pensent que le dessein d'un Dieu préside à chaque
instant de tout être vivant.
les évolutionnistes qui pensent que le monde a évolué depuis un big bang
initial et de hasard en hasard face à la nécessité se retrouve dans sa
complexité actuelle. A voir l'harmonie de la vie sur terre, il ne fait ni
trop chaud, ni trop froid, l'équilibre écologique est si subtil entre les
espèces, où l'animal a des yeux pour voir, des oreilles pour entendre et ou
l'homme a un cerveau pour avoir la conscience de lui-même, on ne peut
qu'être confondu de tant de coïncidences. encore, certains pensent au
sens donné par une Transcendance qui aurait la maîtrise du hasard.
les évolutionnistes qui pensent que le sens de l'évolution ne peut être
qu'un sens obligatoire, sinon le monde ne pourrait pas être. Si le monde
est ce que nous en percevons aujourd'hui, c'est qu'il est le produit des
seuls embranchements féconds des hasards de l'évolution. C'est parce
l'homme ne se re-situe pas dans cette logique qu'il fait intervenir la
Transcendance à un niveau où elle n'a rien à y faire.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /119 189
«Pour que le monde soit ce qu'il est, une infinité de mutations ont
eu lieu. Seules les mutations qui orientaient le monde tel qu'il est
vivable aujourd'hui sont à retenir. Il n'y a rien de magique. C'est
comme un labyrinthe. Le monde a constamment eu des choix. La
plupart étaient des impasses qui ne pouvaient conduire à une "vi-
vabilité". Ce n'est qu'arrivé au bout, lorsque l'on sort du labyrinthe
que l'on peut s'apercevoir que tous les choix réalisés ont conduit à
la sortie. L'homme d'aujourd'hui, avec sa conscience du passé, est
sorti du labyrinthe, alors que dans ce cheminement à l'intérieur du
labyrinthe, il n'a jamais été influencé de l'extérieur. A chaque em-
branchement, il a tenté, au hasard et, le plus souvent il s'est trom-
pé. Alors il a tenté un autre hasard, et encore un autre, jusqu'à ce
que ce soit le bon progrès vers la sortie. La Transcendance ne sau-
rait être le guide de l'évolution. La seule chose que l'on puisse dire,
c'est que le labyrinthe existe et qu'il y a une sortie, c'est notre
conscience du monde.» [auteur inconnu ?]
Le futur se décline aussi dans la diversité des êtres et des civilisations,
entre ceux qui croient à une religion révélée et ceux qui n’y croient pas.
Ceux qui croient à la «terre promise», et qui refuse d’interpréter le
mythe historique comme une promesse à tous les hommes et non pas à
un peuple qui s’auto-sélectionne. Le Peuple Elu, distingué par la
Bible, ne peut être, pour ceux qui ont une religion, que l’ensemble de
l’humanité cherchant à faire de notre terre à tous une terre de bon-
heur.
Ceux qui croient en des ré-incarnations ou à la résurrection des morts,
assurant ainsi leur éternité.
...
L’athée qui refuserait l’idée d’une transcendance, et l’agnostique qui
refuserait l’idée d’une religion, d’un savoir qui permettrait un lien
avec la transcendance.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /120 189
Pour faire court!:
Un athée dirait "Je ne pense pas que Dieu existe" ; !
un agnostique dirait "Je ne sais pas si Dieu existe ou non" ; !
un ignostique dirait : "Je ne vois pas ce que vous voulez dire quand vous dites
"Dieu existe" !
un apathéiste dirait": "Je ne veux pas me compliquer la vie avec cette question" ; !
un croyant d'une religion révélée dirait : "Dieu a parlé aux Hommes" ; !
un Spinoza dirait que Dieu est la réalité du monde ; !
un pastafarien dirait": "Je crois en un monstre de spaghetti volant indétectable"...
Extrait du Petit barreau - Ertiamel p.140!
Ajouterai-je : !
un juif dirait peut-être «"Mon peuple est élu de Dieu ». (Torah, Moïse, Abraham) Voir
la note Einstein!
un musulman priera 5 fois par jour": Allah est grand et Mahomet est son prophète.
(Coran). C’est un peu court ! Cela permet de brailler un peu n’importe quoi.!
un bouddhiste ne s’intéresse pas à la révélation divine, mais à Bouddha qui est par-
venu à l’illumination.!
un hindou mélange politique, science, art, réincarnation et vaches sacrées pour une
intuition cognitive de l’ordre cosmique par des hommes inspirés. (Veda, Shiva, Vish-
nou, Krishna)!
un chrétien s'appuie sur la Bible et les enseignements oraux de Jésus, dit fils de
Dieu, pour élaborer une poétique immense et souvent dogmatique. (Evangiles,
conciles). Un protestant n’a pas de dogme.!
Le confusianisme reste une doctrine morale et sociale. !
Le taoïsme unifie la terre et le ciel. !
!
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /121 189
En termes démographiques , tout est relatif :
57
christianisme 2,4 milliards d'adhérents,
islam 2 milliards,
hindouisme 1,1
irréligionisme 1,1
bouddhisme 0,5
animisme 0,
Il faut aussi citer Descartes, qui avant Berkeley, a eu l'intuition de l'imma-
térialisme !:
58
«Je suppose donc que toutes les choses que je vois sont fausses ; je
me persuade que rien n’a jamais été de tout ce que ma mémoire
remplie de mensonges me représente ; je pense n’avoir aucun sens ;
je crois que le corps, la figure, l’étendue, le mouvement et le lieu ne
sont que des fictions de mon esprit. Qu’est-ce donc qui pourra être
estimé véritable ? Peut-être rien autre chose, sinon qu’il n’y a rien
au monde de certain.» [Descartes, méditations métaphysiques 1641]
Dans la Bible (Génèse 1-2è) les anciens ont écrit que Dieu créa l'Homme
à son image, je propose l'inverse : l'Homme a un tel besoin de se référer à
plus grand que lui qu'il s'est créé un Dieu à son image.
La Bible est une poétique de l'histoire des hommes. Le poète a senti que
le monde était imparfait, - ne pouvait être qu'imparfait-, alors il a choisi
une belle histoire pour expliquer cette imperfection, celle d'Adam et Eve,
chassés du Paradis pour avoir déplu à Dieu avec une histoire de pomme et
de serpent (belle psychanalyse!!). Ainsi le poète, les poètes, ont raconté à
leur manière les autres histoires du monde. En particulier, il est tout a fait
normal que le poète veuille signifier que l'homme a été créé pour ressem-
bler à ce qu'il se figure d'une Transcendance chargée de tout l'inexpli-
cable. Dieu n'a pas créé l'Homme à son image, c'est l'Homme qui a créé
une Transcendance à son image. Il me vient l'idée que plutôt que de par-
ler de la Transcendance ou d'un Dieu, on devrait parler de "l'Inexpliqué"
https://atlasocio.com/classements/religions/adherents/classement-religions-croyances-par-nombre-
57
adherents-monde.php
https://fr.wikipedia.org/wiki/Immatérialisme
58
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /122 189
avec un I majuscule, plutôt que l'Inexplicable, qui laisse entendre à ce
qu'il y a une explication à tout..
Il serait bien que chaque homme soit éduqué à relativiser les symboles,
que d’aucuns ont tendance à s’approprier, simplement parce qu’il leur
faut une «raison» de vivre et par conséquent de mourir. Notre attitude mé-
taphysique est notre réponse inconsciente à l’interrogation double :
« D’où viens-je, où vais-je ? ».
Sur ce sujet, je serai donc un ignostique/apathéiste/pastafariste...
La seule réponse possible reste que «Tu es poussière et tu redeviendras
poussière», phrase symbolique qu’il convient de relativiser à l’humanité
tout entière et non à ceux-là seulement qui s’intéressent à celui qui a prê-
ché tout haut ce que chacun pouvait penser tout bas depuis que l’homme
est homme, depuis les temps immémoriaux.
Comment, du prétendu big bang initial, se sont assemblés les atomes en
hydrogène, oxygène, carbone et autres éléments fondamentaux, puis
comment sont écloses les premières molécules inorganiques puis orga-
niques ? La science balbutie à ce sujet. Elle a pu reconstituer le passé jus-
qu’à la molécule organique, mais au-delà, elle ne fait que supposer. Pour y
arriver, il a fallu faire du darwinisme à l’envers. Aucune des étapes retra-
cées vers le passé ne peut être éludée, dans une cohérence ontologique.
Le passé n’existe que dans sa possibilité d’avoir été comme on le raconte.
Si un fait nouveau venait à invalider une des étapes, toutes les étapes an-
térieures seraient invalidées. Notre passé n’est plus une réalité. Il n’est
qu’une construction intellectuelle consentie par les hommes - lorsque
leur religion n’interfère pas.
Seul l’instant présent possède une matérialité. Ce qu’il y avait juste avant
n’est plus que le fruit de mon souvenir. Et plus je remonte dans le temps,
plus le passé ne peut être que le fruit des souvenirs de tous ceux qui ont
été témoin de cette réalité de l’instant vécu alors, de la même manière que
ce qu’il y aura juste après sera le fruit de ce que je perçois comme suite
possible de l’instant présent. Et plus je projette l’avenir, plus le possible
ne peut être qu’en cohérence avec ce que tous ceux qui y seront mêlés au-
ront pu prévoir de cet avenir, en tenant que des aléas de l’univers que
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /123 189
nous pouvons imaginer. Dans les détails, le futur ne peut être que furtif.
Pour les grandes lignes du futur, la loi des grands nombres peut nous ai-
der. La probabologie est une science délicieuse, car l’incertitude contient
le rêve.
Si l’homme avait été parfait, il n’aurait pas pu exister. C’est parce que la
perfection n’est pas de ce monde que le monde peut évoluer. Réjouissons-
nous de notre faiblesse ! C’est grâce à elle que le monde se complexifie et
que notre conscience s’élargit. Que les hommes encadrent leurs pulsions,
soit. Mais nous devons admettre que parfois la pulsion nous dépasse,
parce que nous sommes par essence des imparfaits. La probabilité de dis-
parition de l’espèce humaine sous sa propre responsabilité est faible, mais
réelle. Il n’y aucune transcendance, mais seulement une façon d’appré-
hender la réalité.
Nous sommes des passagers d’un Univers dont seule la réalité de l’instant
présent nous fait vivre et nous fait inventer en permanence notre passé et
notre futur de façon d’autant plus diaphane que ce passé et ce futur
s’éloignent de l’instant présent. Naître et mourir font partie de cette réali-
incessamment fugitive. En naissant, nous montons dans le bateau de la
vie et en mourant nous en descendons.
Si l’on se regarde comme un passager du monde, fourmi dans une four-
milière, nous relativisons notre importance : «Est-ce si important que
nous le quittions ? ».
En en faisant partie nous sommes des passeurs entre l’avant et l’après. La
vie de chacun interagit avec la vie des autres. Nous sommes des passeurs.
les bagages ont été mélangés et tous les passagers contribuent à créer
l’ambiance du bateau. Quand ils en descendrons, le bateau continuera.
Cet éphémère à échelle d’une vie relativise l’importance de l’homme vis à
vis de lui-même : « Nos convictions sont-elles alors si importantes ? «. In-
quisitions, ayatolisme, talibanisme, ...ismes sont des imperfections hu-
maines.
"Pauvre Martin, pauvre misère, creuse la terre, creuse le temps…"
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /124 189
Expérience de pensée
Pour l'instant, l'homme a inventé l'Intelligence artificielle, une appellation
abusive , tant cette machine est incapable de comprendre - au sens que
59
nous donnons à ce mot -. Elle ne comprend pas ce qu'on lui dit et ne
comprend pas ce qu'elle peut répondre. Ses réponses ne sont que le ré-
sultat d'une algorithmie probabiliste.
Imaginez qu'un jour, l'homme fabrique une machine qui pourrait lui
dire÷ "J'ai une conscience, je comprend ce que vous me dites et mes ré-
ponses sont le produit de ma propre compréhension!!", sans que l'on
puisse lui démontrer qu'elle ne comprend pas. L'homme aura créé une
conscience artificielle qui, elle, pourra dire que sa transcendance, son
60
créateur, c'est l'homme.
Poursuivons notre expérience de pensée, en imaginant une panne de cou-
rant de cette fameuse machine consciente. En nous mettant à la place de
la machine, nous découvrons ce qu'est le néant!!
Nous, les hommes, nous ne pouvons dire quelle est notre transcendance,
pas plus que nous pouvons nous représenter le néant. Les croyants
peuvent le dire, mais il ne s'agit que de croyance.
Cette expérience de pensée ne prétend rien, elle offre seulement un
schéma transcendantal, un autre point de vue philosophique.
L'obligation de cohérence
Les astronomes en sont toujours aux conjectures quant aux possibilités de
vie dans notre galaxie. Aucun indice n'est probant, tout au plus peut-on
hasarder une probabilité (un hasard est déjà lui-même une probabilité!!)
extrêmement faible que des conditions propres à laisser émerger la vie
soient reproduites sur une quelconque planète d'une quelconque étoile
de notre galaxie. Dans l'infini de l'univers, que peut-elle devenir ? Notre
géocentrisme nous joue sans doute encore des tours : nous passons peut
Le mot Intelligence doit s'entendre au sens américain du terme : recueil de données, comme dans
59
CIA, Central Intelligence Agency. En France, il est source d'ambiguité, car il sous-entend une compré-
hension.
On parle aussi de "cognition artificielle", qui devrait mettre en jeu mémoire, langage, raisonnement,
60
apprentissage, intelligence, résolution de problèmes, prise de décision, perception, attention, affect, ins-
tinct, éthique. Dans un monde "artificiel', chaque item peut être débattu.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /125 189
être à coté d'autres formes de vie que nos instruments et nos raisonne-
ments ne savent mettre en évidence.
Regardons-nous vivre sur la terre, regardons à quoi tient notre humanité :
il aura fallu que le soleil ne soit ni trop froid, ni trop chaud, que l'orbite
de la terre soit précisément elle est, que la terre soit, à cet instant de
l'univers, ni trop grosse ni trop petite, ni trop chaude ni trop froide, ni
trop ceci, ni trop cela, pour que nous vivions dans ce monde tempéré qui
favorise une "éclosion harmonieuse des êtres".
Et pour que cette éclosion harmonieuse arrive à nous engendrer, nous
pauvres humains, combien de chances heureuses, combien de parties ga-
gnantes de bingo aura-t-il fallu ? Certains d'ailleurs se posent la question
de savoir si notre terre, vu son âge, aurait eu le temps de gagner toutes ces
foutues parties de bingo. Bref, si je suis en train d'écrire, serait-ce parce
que j'ai eu comme vous une sacrée chance? Non, je me refuse à être cet
accident statistique que les scientifiques voudraient que je sois. Ce n'est
pas parce que nous sommes tous des accidents statistiques que nos sa-
vants nous démontrent pour autant l'origine de l'origine.
Cette quête angoissée de la science à propos de la place de l'homme dans
l'univers ne me parait pas être sur le bon chemin. Il y d'autres chemins,
vertigineux eux aussi. Passons sur les chemins des mystiques, qui res-
sentent mais n'expliquent pas, mais gardons Dieu, il appartient à tous, aux
scientifiques, aux frontières du Big-Bang, aux mystiques et aux autres...
Le chemin que je veux prendre est une spéculation, une pure hypothèse,
certains pourraient dire une tautologie, qu'importe ! Otez de votre esprit
tout géocentrisme, toute référence philosophique (il sera bien temps d'en
trouver), car il s'agit de penser à l'envers. Notre pensée, notre perception
de l'existence, c'est notre besoin de cohérence. Ainsi, quand nos ancêtres
voulaient une terre plate, leur perception de l'univers était cohérente avec
leurs connaissances géographiques. Lorsque celles-ci se sont affinées,
lorsque leur champ d'investigation s'est agrandi, il a fallu trouver un autre
modèle de l'homme dans son univers. Chaque nouvelle investigation doit
être cohérente avec le modèle, sinon celui-ci s'effondre dans sa totalité.
Pour la platitude de la terre, cela n'était pas trop grave, car le nombre de
promoteurs du dogme était faible et qu'à l'époque, ce dogme n'avait pas
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /126 189
une importance vitale. Imaginez qu'aujourd'hui, il faille remettre en ques-
tion le dogme d'une terre ronde!! Justement, maintenant que l'informa-
tion va si vite et si loin, que chaque information a l'impérieuse nécessité
d'être cohérente avec les autres informations, on peut dire que l'on a at-
teint un certain déterminisme.
Prenons les records d'athlétisme : croyez vous qu'il soit pensable que le
record de vitesse sur 100 mètres tombe brusquement de 9,9 secondes à 6
secondes. Tous les sportifs du monde crierons à la supercherie. Est-ce
pour autant qu'il n'existe pas au fin fond de l'Amazonie ou de la Papoua-
sie des guerriers qui courent 100 mètres en 6 secondes? On raconte que
des bonzes sont capables de parcourir 500 km à plus de 20!km/h de
moyenne et ceci en plein Himalaya. Je demande à voir, vous aussi, mais
qui sait. En athlétisme, on en est au centième de seconde près, dans le
domaine scientifique, on en est aussi loin : nous semblons arriver à
l'asymptote de nos forces et de nos connaissances, tant ce que nous
connaissons de nous-mêmes et de notre environnement est cohérent.
Si je regarde une mouche, qui sait si bien prendre ses virages à quatre
vingt dix degrés, je peux me dire que les brusques changements de direc-
tion sont possibles pour tout autre chose qui vole dans la mesure
j'ignore les problèmes d'inertie. Alors, je donne prise au mythe des sou-
coupes volantes, capables d'accélérations foudroyantes et d'aussi brusques
changements de direction; mais si je raisonne en physicien, mes sou-
coupes volantes disparaissent, faute de faire disparaître les lois relatives à
l'énergie cinétique.
De tout temps, toute nouvelle découverte est donnée à partir d'anciennes
découvertes. A l'inverse les anciennes découvertes sont confortées par les
nouvelles découvertes. D'où l'idée que l'univers est comme il est parce
qu'il n'y a guère moyen de le faire autrement!: notre univers n'est pas un
univers de matière, c'est un univers de cohérence -
Nous ne pouvons pas nous permettre
une seule incohérence
dans notre façon de percevoir le monde,
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /127 189
SINON CELUI-CI SE CASSE LA FIGURE !
Nous possédons une échelle des temps, que la science par commodité
toute personnelle, a référencée par rapport à l'homme, depuis l'instant
zéro du Big-bang, en passant par 1969 Greenwich vers les milliards d'an-
nées que nous ne verrons probablement pas. Cette échelle des temps a du
reste été bien malmenée ces derniers temps. Et Einstein avait bien raison
de la malmener, cette échelle des temps, pendant qu'il est encore temps,
avant que de nouvelles découvertes ne verrouillent les anciennes. La
science a donc bâti, du fait de cette échelle des temps, un univers progres-
sif. Le premier jour elle a fait l'air, le deuxième l'eau, le septième, elle se
reposa -refrain ancien fort connu-. D'après la science, les choses se sont
faites progressivement parce qu'il semble bien difficile qu'elles puissent
avoir été faites autrement -bien que d'après certains saints écrits, la géné-
ration spontanée ait existé.
Et cette échelle des temps est un carcan épouvantable. On s'en est servi
pour élaborer un modèle mathématique de l'univers et comme on trouve
ce concept très pratique, on le récupère pour l'usage de notre propre vie
en oubliant de vérifier si on a vraiment besoin d'une échelle. On pourrait
dire la même chose de l'échelle des distances ou de l'espace à trois ou
quatre dimensions. Ce sont des étais que la science s'est donnée pour
avancer plus vite et plus loin, mais avons-nous vraiment besoin de ces bé-
quilles ? C'est justement ici que commence la spéculation, en pensant que
ces béquilles sont une perversion de la science.
Spéculations
Essayons de penser sans béquilles : peu nous importe que l'univers existe
comme nous le concevons aujourd'hui, avec des temps et des distances,
l'essentiel est qu'il soit là, avec toute sa cohérence, quand on en a besoin.
En fait, je spécule que nous avons dans l'esprit toutes les données du
problème. Si je suis assis à cette table et que je regarde vers la fenêtre, je
ne peux faire autrement que de voir le peuplier et le puit. Il me semble
que je n'ai pas vraiment besoin que ce peuplier et ce puit soient des
choses concrètes, mais seulement des choses en cohérence avec ma vision
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du monde, qui est elle-même en cohérence avec la vision du monde du
voisin qui est assis à coté de moi et regarde lui aussi par la fenêtre. Nous
pensons que le monde est ainsi tout simplement parce que nous ne pou-
vons l'imaginer différent de l'imagination de ceux que nous mettons en
scène dans ce monde. Une seule incohérence et ce monde imaginaire
n'existe plus. Nous sommes dans un rêve, suffisamment solide pour que
nous ne puissions nous en extraire et dont les règles sont infiniment plus
strictes!: nous ne pouvons pas rêver n'importe quoi.
61
En première lecture, cette spéculation est choquante, puisqu'elle renverse
les rôles: ce n'est pas le monde et son Big-bang originel qui nous fait exis-
ter, c'est nous qui inventons le Big-Bang parce que notre logique intellec-
tuelle nous conduit à l'inventer, comme elle nous conduit à inclure dans
notre monde imaginaire les différents processus de reproduction de la vie,
les lois de la chimie, de la physique et de la biologie. Peut-être qu'un lec-
teur, avec un peu de bonne volonté et d'imagination réussira, après plu-
sieurs lectures de ce qui précède, à vaincre le vertige métaphysique que
peut procurer cette spéculation. Vertige, parce que cette façon de spéculer
permet beaucoup d'audaces dans l'explication du monde, et qui sait, peut
conduire à de nouvelles hypothèses, à de nouveaux comportements, à de
nouvelles logiques.
Tout d'abord, cette spéculation est anthropocentrique, puisque l'univers
n'est que la projection de l'esprit humain. La base de cette projection est
fruste, il s'agit d'un principe très simple: "imagine ce que tu voudras
pourvu que ce que tu imagines soit cohérent avec ce que tu auras déjà
imaginé". On conçoit que l'esprit a pu faire un certain nombre de tenta-
tives ayant toutes abouti à un échec, jusqu'à la tentative qui est la notre.
A l'origine, si tant est que l'on puisse employer ce mot, l'esprit est, en de-
hors du temps et de l'espace, il serait, selon notre vocabulaire, de nulle
part et de toute éternité. Un jour -mais qu'est-ce qu'un jour!?- l'esprit
imagine l'univers à quatre dimensions et quelque chose dedans, sans
doute quelque chose du genre reproductible. A partir de tout s'en-
chaîne, l'esprit a trouvé une solution viable par elle-même, en dehors de
Ce fantasme d'un monde de simulation (qui n'est pour moi qu'une expérience de pensée) est partagé
61
par certains scientifiques!: https://lanature.ca/2025/01/25/un-physicien-revele-que-notre-existence-nest-
quune-illusion-et-explique-pourquoi/item/1-la-theorie-de-la-simulation-un-concept-fascinant-1
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lui, puisque nous avons la perception du monde sans l'appréhender lui.
Nous sommes un meta-monde.
L'informatique permet aujourd'hui d'approcher ce que peut être un
méta-monde : systèmes générant des réalités virtuelles, ou des cellules vir-
tuelles en interaction,... L'expérience informatique montre que ces sys-
tèmes sont capables d'apprentissage et de décisions qui leur sont propres.
Nous en sommes !: abandonnés à nous-mêmes avec ces postulats que ce
que nous trouverons au confins de notre univers sera immanquablement
cohérent avec le fait que nous ayons cinq doigts à chaque main, que ce
que nous découvrirons du passé devra confirmer ce que nous vivons au-
jourd'hui. Passés et futurs n'existent pas vraiment, dans la mesure
nous pourrions nous inventer tous les passés qui ne remettent pas en
cause tous les vestiges et les écrits que nous avons déjà inventés, et dans la
mesure où les futurs possibles sont légions.
Echapper au présent est une autre paire de manche. Certains y arrivent
peut-être, hors de la vue des cartésiens. Il est à noter que bien des faits
"bizarres" rapportés par des observateurs "dignes de foi" n'ont jamais été
reproduits devant la science. On comprend que la science ait été maintes
fois jugée nuisible, dans la mesure son implacable logique détruisait
les méta-mondes du moyen-âge. On pourrait cependant imaginer qu'un
ensemble d'être pensants totalement isolés de notre monde pendant plu-
sieurs années, puisse assumer un méta-monde différent du nôtre, ou par
exemple le bleu deviendrait brûlant, la sphère serait immensément lourde,
au contraire du carré qui ne pourrait que flotter dans l'air... J'ose penser
que pour eux, les choses seraient réellement ainsi, plongeant ainsi notre
science dans la plus grande perplexité, et confirmant cette spéculation
pour un monde de l'esprit.
L'esprit humain doit être pris dans un sens pluriel, collectif, en vertu du
principe de cohérence. Le Papou et l'Esquimau sont liés, comme des
fourmis de la même fourmilière : Ce n'est pas véritablement la fourmi
prise individuellement qui est un animal, c'est la fourmilière tout entière
qui est un être constitué. Ceci veut dire que c'est l'espèce humaine tout
entière qui est responsable de son destin, que la terre soit vivable pendant
des millénaires encore, ou au contraire qu'elle soit victime d'une psychose
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collective. C'est ainsi qu'il existe quelques êtres suffisamment persuasifs
pour vous faire prendre une vessie pour une lanterne. Je me souviens
d'une promenade en montagne où, partant d'un village et passant un col,
nous redescendions de l'autre coté vers un lac connu. A ce moment, un
homme montait, avec qui nous liâmes conversation à propos du chemin
sur lequel nous étions. Cet homme se croyait sur un autre chemin et mal-
gré nos dénégations assurées, il finit par nous convaincre que nous
n'étions pas où nous étions, mais il croyait être!! Humble exemple
vécu de la vessie et de la lanterne, qui laisse à méditer sur notre faiblesse à
croire n'importe quoi et, inversement, sur la capacité de l'esprit à inventer
un méta-monde.
Imaginons que quelques savants suffisamment persuasifs nous expliquent
qu'un phénomène géophysique détruise inéluctablement la terre, pourvu
que ce phénomène soit cohérent avec ce que l'on sait déjà de notre méta-
monde, il est probable que la terre sera détruite et nous avec. Heureuse-
ment, l'inconscient collectif veille et à toute mauvaise nouvelle, notre ins-
tinct de conservation nous fait découvrir la parade.
Immortalité ?
Quand je parle d'instinct de conservation, j'ai tendance à penser élan vital
qui fait que notre méta-monde est suffisamment bien fait pour nous éviter
le suicide collectif. Au nom de l'échelle des temps et des étais des 3 di-
mensions de l'espace, la science ne nous offre que la mort comme sortie
de notre monde. Elle décrète l'homme mortel, elle refuse l'immortalité.
Mais si notre monde est un méta-monde de cohérence, sommes nous sûrs
d'avoir besoin d'être mortel ? Il est possible que, nous mettant tous à bâtir
notre futur mental, l'homme soit en mesure d'atteindre la parousie, c'est à
dire qu'il enlève les frontières qui sépare notre méta-monde de l'esprit à
l'état pur. Spéculation encore .... Restons plus terre à terre et évitons
ces sujets épineux, passionnels pour certains, tellement l'angoisse méta-
physique peut faire d'inventions et de ravages dans les coeurs.
Ce qui m'intéresse, très égoïstement, c'est de donner le meilleur sel à ma
courte existence, puisque tant que ma spéculation n'est pas vérifiée, je ne
suis pas dans un méta-monde, mais dans un monde de chair et d'os. Mais
rien ne m'empêche, en mon fors intérieur de penser le monde comme un
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méta-monde, de me forger un autre point de vue que le point de vue offi-
ciel quant à la cohérence du monde, de me forger parfois certaines en-
torses aux confidences de la science moderne, d'être un tricheur!?
Doute infime ?
Certes, d'un point de vue intellectuel, certains hommes peuvent penser
qu'un jour la techniques leur permettra d'être immortel (congélation, clo-
nage,...). Je laisse à ces hommes leur droit de croire à cet espoir un peu
fou. Il s'agit d'un raisonnement matérialiste que je n'ai pas. Ma dé-
marche est nettement différente. Je me place sur un plan philosophique.
De Platon (les ombres dans la caverne) à l'évêque Berkeley (idéalisme im-
matérialiste), et encore de nos jours ("les atomes existent-ils?"), il semble
que certains philosophes ont eu et ont encore une intuition quant à la
matérialité du monde. Le monde ne serait que construction mentale,
toutes les consciences sont amenées à imaginer la même matérialité (dans
mon esprit et dans ton esprit, ce que je vois et ce que tu vois ne peuvent
être fondamentalement différents, sinon, notre monde s'écroule dans
l'absurde). Nous sommes condamnés à la cohérence de nos perceptions et
de notre vision du monde. A partir de là, il n'est point besoin que le
monde soit réel. Cette théorie peut donner le vertige, je le conçois. Je re-
vendique personnellement cette intuition, cette spéculation, qui m'amène
alors à une autre intuition, à un doute infime. Je peux imaginer, spéculer
que dans 100!000 ans, 1 million d'années, un jour, les hommes pourront
avoir collectivement la force philosophique nécessaire pour modifier tous
ensemble leur représentation mentale du monde et en faire un monde
immortel.
Conclusion -
S'il est vraiment permis de conclure!
De cette nécessaire cohérence, j'en déduis qu'aucun commerce avec une
quelconque transcendance n'est possible. Il ne peut y avoir de manifesta-
tion possible de la transcendance, car cela signifierait une fuite, un "délit
d'initié", un accès privilégié au futur - à l'éternité diraient certain -. Cer-
tains croient avoir établi ce lien, mais cela ne peut relever que de la
"croyance", d'une "religio", pour aider inconsciemment à résoudre cette
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confortable cohérence qui nous refuse l'immortalité. N'est-ce pas ainsi
que seraient nées les cultures religieuses, au point qu'il ne faut pas
s'étonner que certains entretiennent la notion de peuple élu avec un bail
terrestre, la notion de Fils de Dieu ou d'Assomption, la réincarnation, les
mânes,... On peut y croire,.... mais seulement y croire !
Ertiamel
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Dignités
Pourquoi la dignité!?
J’ai toujours eu envie d’ajouter à la de-
vise révolutionnaire «!Liberté, Egalité,
Fraternité!» la valeur de la Dignité, celle
qui fait la grandeur de l’homme, celle qui
devrait faire la grandeur de l’homme….
Au début était la conscience
Non, au début, il n’y avait pas la conscience, mais juste de quoi survivre. Puis, il y a 40!000
ans l’homme a pris conscience de son existence et de l’existence des autres, il a pris
conscience de sa tribu, de ce qu’il faut faire et ne pas faire pour vivre et mourir.
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Metaphysiques/Consciences.pdf
La conscience est venue progressivement. Les philosophes grecs ont commencé à réfléchir
au sens de l’existence, à comprendre la nécessité d’une organisation sociale, avec ses cou-
tumes et ses lois écrites ou non-écrites. Ils inventent le Kalos kai kagathos, le «!beau et le
bon!», l’homme parfait. A l’époque, ils confondaient la dignité du dignitaire et la dignité
de l’homme vertueux!: ill vaut mieux subir l’injustice que la commettre et subir la mort
plutôt que trahir la vérité. Mais les notions de justice et de vertus ne sont pas encore uni-
verselles. Le seront-elles d’ailleurs un jour!?
Il faudra l’avènement de la devise humaniste «!Liberté, Egalité, Fraternité!» pour que peu
à peu se greffe la notion de dignité pour tous, pour que la solidarité émerge timidement
dans la cité, dans la région, dans le pays et aujourd’hui dans tous les pays.
Amour-propre, caractère, charge , décence, distinction, élévation, fierté, fonction, grade, grandeur,
gravité, honnêteté, honneur, honorabilité, majesté, noblesse, place, promotion, rang, réserve, respec-
tabilité, retenue, sacerdoce, sérieux, tenue, titre, prééminence, investiture.
Voilà 28 synonymes qui conduisent à la considération et au respect de soi-même et d’au-
trui. Saint Augustin va même plus loin quand il parle de l’éminente dignité de la pensée
qu’il assaisonne néanmoins à l’illumination des idées divines. La dignité de soi-même n’a
pas à voir avec la divinité, ni avec une quelconque croyance. Elle ne vient pas d’un
ailleurs, elle vient de soi-même et elle sert à construire la dignité des autres.
La dignité n’est pas qu’individuelle. Elle concerne aussi les peuples qui collectivement
doivent faire face à ce qui peut les accabler. C’est le contraire de la lâcheté.
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Encore faut-il y réfléchir plus longuement, quand la dignité est reliée à la morale. «!Plutôt
rouge que mort!!!» Qui est le plus digne, celui qui accepte le compromis ou celui qui le re-
fuse!?
Accepter un compromis, est-ce se déjuger ?
(d'après LaCroix Hebdo de fin janvier 2020, Dominique Greiner)
"Ce mot n'est guère aimé. pour certains, il est synonyme de compromission, de renonce-
ment à ses convictions. Pour d'autres, à vouloir ménager la chèvre et le chou, le compro-
mis ne peut échouer que sur une cote mal taillée, laissant les différents acteurs insatis-
faits. Ce serait une sorte d'entre deux, sans véritable choix. Le compromis serait un pis-
aller, une voie de sortie du conflit vers le bas, aucun acteur n'ayant réussi à imposer ses
vues aux autres. Mais c'est implicitement supposer que, pour mettre fin à un conflit, un
groupe devrait nécessairement l'emporter sur un autre. Cette logique est celle de la lutte
des classes : toute concession faite à l'adversaire est une défaite ; toute concession qu'on
réussit à lui arracher est une victoire.
Le compromis peut pourtant être envisagé plus positivement, comme une manière de sor-
tir non par le bas, mais par le haut. Mais il faut déjà porter un autre regard sur le conflit
et considérer qu'il fait partie de la vie normale d'une démocratie. Il est même le signe de
sa vitalité. Il manifeste que les citoyens exercent leur droit de peser sur les choix sociaux
qui engagent leur avenir et leurs conditions de vie. Et le conflit sera d'autant plus violent
qu'ils auront eu le sentiment d'être tenus à l'écart du processus de décision.
"Face à un conflit, certains regardent simplement celui-ci et passent devant comme si de
rien n'était, ils s'en lavent les mains pour pouvoir continuer leur vie. D'autres entrent
dans le conflit de telle manière qu'ils en restent prisonniers, perdent l'horizon, projettent
sur les institutions leurs propres confusions et insatisfactions, de sorte que l'unité de-
vient impossible. Mais il y a une troisième voie, la mieux adaptée, de se situer face à un
conflit. C'est d'accepter de supporter le conflit, de le résoudre et de le transformer en un
maillon d'un nouveau processus." (Pape François). Ce n'est pas la victoire ou l'empiète-
ment d'un partenaire sur un autre qui met fin au conflit d'une manière satisfaisante. Sa
résolution passe par l'élaboration d'un possible qui n'avait pas été initialement envisagé
par les différents partenaires concernés. Ce possible va s'inventer au fur et à mesure. Il
passera par des concessions réciproques.
Mais pour cela, des conditions doivent être réunies. Le compromis suppose une recon-
naissance mutuelle des acteurs, avec leurs références, leurs valeurs et leur rationalité.
C'est aussi reconnaître qu'aucun n'a d'entrée de jeu la solution aux problèmes. Il va donc
falloir la construire en inventant aussi des modalités de négociation, avec les différentes
instances représentatives concernées : "la fabrique du compromis se met en route". Pour
commencer à s'élaborer, un compromis a besoin que les acteurs renoncent non pas à leurs
convictions de base, mais à une logique d'affrontement et de surenchère.
Le compromis est "le seul moyen de viser le bien commun. Nous n'atteignons le bien
commun que par le compromis, entre des références fortes mais rivales" (Paul Ricoeur).
Dans le compromis, par un jeu de concessions réciproques, mais aussi par l'invention de
nouvelles modalités d'action ou la mise en place de nouvelles institutions, les acteurs ma-
nifestent leur capacités à dépasser leurs propres intérêts en vue de ce bien commun. Loin
d'être une solution de facilité, la voie du compromis est donc particulièrement exigeante.
Ce n'est pas se déjuger que de vouloir s'y engager. Reconnaître la nécessité de trouver un
compromis, c'est simplement faire preuve de réalisme et témoigner de son attachement au
bon fonctionnement de la démocratie."
La dignité est liée à la responsabilité et au libre-arbitre qui sont des concepts très relatifs.
Marc-Aurèle, philosophe stoïcien du IIème siècle, dans ses «!Pensées pour moi-même!»,
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écrivait!: «!Il n’est que faire de s’examiner bien longuement, pour s’apercevoir que l’on doit presque tout ce
qu’on pense à la société dans laquelle on naît, et aux traditions sans nombre que cette société à reçues, pour
les accroître encore à son tour. Ce serait un aveugle orgueil, et une erreur fatale, de croire que l’on tire tout de
son fonds personnel, et qu’on peut impunément ignorer les trésors amassés par l’expérience et la sagesse des
âges écoulés.!»
L'univers continue son chemin et les hommes, sur la planète Terre, continuent le leur. A
l'échelle de 10 000 ans, on ne saurait parler ni de libre-arbitre, ni de responsabilité.
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Naturellement_responsables.pdf
C’est dans la dignité de tous les jours que l’homme doit s’assumer, doit assumer sa place
dans la société, pour que sa partie de pouvoir soit un service et non une pression.
La morale réfère à un ensemble de valeurs et de principes qui permettent de différencier le bien du
mal, le juste de l’injuste, l’acceptable de l’inacceptable, et auxquels il faudrait se conformer.
L’éthique n’est pas un ensemble de valeurs ni de principes en particulier. Il s’agit d’une réflexion
argumentée en vue du bien-agir. Elle propose de s’interroger sur les valeurs morales et les principes
moraux qui devraient orienter nos actions, dans différentes situations, dans le but d’agir confor-
mément à ceux-ci.
https://www.ethique.gouv.qc.ca/fr/ethique/qu-est-ce-que-l-ethique/quelle-est-la-diffe-
rence-entre-ethique-et-morale/
Pour faire court!: la morale serait la pensée et l’éthique serait l’action.
La dignité de soi-même (l’amour-propre, la décence...) serait alors une posture plus per-
sonnelle.
La dignité des autres serait celle que la société leur donne, c’est à dire celle que nous leur
donnons.
Où finit la morale, où commence la responsabilité ? Morale et responsabilité sont des
concepts élastiques que l'on peut approfondir en s'intéressant à la dignité.
La dignité
Plusieurs définitions du mot "Dignité" se font face. Il ne s'agit pas ici de la fonction émi-
nente du dignitaire. Il s'agit du respect qu'on se doit à soi-même ou aux autres. "Toute la
dignité de l'homme est en la pensée" a écrit Pascal, en écho au "Nosco me aliquid noscere, &
quidquid noscit, est, ergo ego sum (je sais que je sais quelque chose, celui qui sait existe, donc
j'existe.)" de Gomez Pereira (1554). L'homme qui ne pense plus s'abaisse et celui qui em-
pêche l'autre de penser s'abaisse aussi. Les parents qui éduquent leur enfant, les institu-
teurs qui éveillent à la connaissance, les scientifiques qui découvrent, les journalistes qui
informent, les médecins qui soignent, ceux qui luttent contre la pauvreté, ceux qui s'op-
posent à la violence,… tous oeuvrent pour que les hommes soient dignes. Les autres, ceux
qui sont sans scrupules, ceux qui agissent sous le joug d'un pouvoir, sont indignes.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /136 189
Le taux et la répartition des contributions directes ou indirectes sont définis par le vote du
budget annuel par les élus. En principe, le système est redistributif afin que les fortunes ne
restent pas concentrées toujours sur les mêmes. Dans les faits, le système actuel tend à en-
richir les plus riches et appauvrir les plus pauvres. Le pouvoir économique, les groupes
d’intérêts, ont préempté le pouvoir politique. En cela, le pouvoir économique est indigne.
Il est anonymement indigne.
Mais nous avons la responsabilité collective de cet état de fait qui, en s’aggravant, risque
de déclencher de plus en plus de conflits, de plus en plus graves, avec ou sans le prétexte
des religions.
Gagner de l’argent avec de l’argent sans que ce gain soit producteur d’un bien ou d’un service est
indigne. Ce gain, sans doute légal, est la contrepartie d’un préjudice invisible car noyé dans le
système qui autorise la spéculation.
Le banquier qui prête de l’argent pour en récupérer les intérêts vend un service. L’usurier ou le
banquier qui prêtent à l’insolvable sont indignes.
Le casino qui récupère la quasi-totalité des mises des joueurs vend de l’adrénaline. Le casino qui
développe l’addiction est indigne.
L’actionnaire qui reçoit un dividende reçoit la contrepartie des risques qu’il a pris en achetant des
actions. L’actionnaire qui met ses économies au service d’un spéculateur est indigne. Le trader qui
s'inscrit dans ce système est aussi indigne. Ceux qui gèrent des fonds-vautours ou qui profitent des
sub-primes sont indignes et rendent indignes les petits porteurs qui cautionnent leurs agissements.
Les fabricants et vendeurs d’armes ou les pétroliers qui parient sur la guerre pour développer leur
entreprise sont indignes.
Où finit la morale, où commence la responsabilité ? Morale et responsabilité sont des
concepts élastiques que l'on peut approfondir en s'intéressant à la dignité.
Le taux et la répartition des contributions directes ou indirectes sont définis par le vote du budget
annuel par les élus. En principe, le système est redistributif afin que les fortunes ne restent pas
concentrées toujours sur les mêmes. Dans les faits, le système actuel tend à enrichir les plus riches
et appauvrir les plus pauvres. Le pouvoir économique, les groupes d’intérêts, ont préempté le pou-
voir politique. En cela, le pouvoir économique est indigne. Il est anonymement indigne.
Mais nous avons la responsabilité collective de cet état de fait qui, en s’aggravant, risque
de déclencher de plus en plus de conflits, de plus en plus graves, avec ou sans le prétexte
des religions.
Exemple : Le débat sur les retraites a lieu d’être : comment donner aux hommes une fin de vie
dans la dignité ? La dignité, au sens du respect qu’on se doit à soi-même autant qu’au sens du
respect de la liberté humaine.
Posé comme cela, le fondement est insuffisant, il faut aussi parler du début et du milieu de vie, de
la dignité de l’enfant à celle du vieillard.
Le débat actuel, qui parle démographie, espérance de vie, pénibilité, cotisation vieillesse, est réduc-
teur, face au débat sur une vie dans la dignité.
Qu’est-ce que vivre dans la dignité ? Commençons par ce débat et nous trouverons plus facilement
les réponses au problème de la retraite.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /137 189
Tant qu'il sera possible de gagner de l'argent en déforestant, en surpêchant, en polluant,
en vendant de la drogue, en se laissant soudoyer pour assurer l'impunité, ou en exerçant
une autre activité non éthique, des hommes sans scrupules seront là, au delà de toute di-
gnité.
Voler des ânes aux paysans du Kenya pour en transformer la peau en soi-disant vitalisants prisés
des chinois, braconner les éléphants pour le trafic d'ivoire, sont des pillages de l'Afrique parmi
d'autres. Ceux qui participent aux fonds de pension vautour ou à toute autre action juteuse licite
ou illicite sont des prédateurs ou des charognards.
Pas-vu-pas-pris est la règle de la vie dans les sociétés dites évoluées qui devront inventer de
nouveaux métiers de contrôleur, et de contrôleur des contrôleurs, pour autant que la so-
ciété en comprenne la nécessité. Ces fonctionnaires, publics ou privés, auront un coût
croissant, qu'il faudra bien que la collectivité accepte de rémunérer par l'impôt ou par
l'augmentation de certains prix. Faute de ces contrôles, la corruption s'installe à tous les
niveaux. Il est encore temps de prévenir ce type de dérive. Partout cela est encore pos-
sible, la transparence financière doit être une règle de base, tout autant que la transpa-
rence des conditions de production. La société civile doit s'encourager à rejeter ce qui
pourrait à terme lui nuire. C'est une responsabilité collective. Il est urgent que l'éducation
citoyenne motive chacun à comprendre les notions d'éthique et de dignité.
On sait que la guerre est indigne. Ici, c'est de l'indignité au second, voire au troisième de-
gré :
"Mais moi, Alfa Ndlaye, j'ai bien compris les mots du capitaine. Personne ne sait ce que je pense,
je suis libre de penser ce que je veux. Ce que je pense, c'est qu'on veut que je ne pense pas. L'im-
pensable est caché derrière les mots du capitaine. La France du capitaine a besoin que nous fas-
sions les sauvages quand ça l'arrange. Elle a besoin que nous soyons sauvage parce que les enne-
mis ont peur de nos coupe-coupes. Je sais, j'ai compris, ce n'est pas plus compliqué que ça. La
France du capitaine a besoin de notre sauvagerie et comme nous sommes obéissants, moi et les
autres, nous jouons les sauvages. Nous tranchons les chairs ennemies, nous estropions, nous déca-
pitons, nous éventrons. La seule différence entre mes camarades les Toucouleurs et les Sérères, les
Bambaras et les Malinkès,[…] la seule différence entre eux et moi, c'est que je suis devenu sau-
vage par réflexion".
Extrait de Frère d'âme, de David Diop, Seuil, page 25, cité dans le Monde du 14/09/18
La question : "Y a-t-il des guerres justes ?" n'a pas non plus de réponse. Le général Lee
pensait-il que la guerre était juste quand il fallait conquérir les terres des amer-indiens qui
avaient l'arrogance de se défendre ? Les ingénieurs du Rafale pensent-ils que la guerre est
juste quand elle utilise les avions qu'ils ont conçus et vendus à des démocraties ou à des
peuples tyrannisés ?
«!Tous nous voulons la paix!! Mais en voyant ce drame de la guerre, en voyant ces blessures, en
voyant tant de personnes qui ont quitté leur patrie, qui ont été obligés de s’en aller, je me
demande!: qui vend les armes à ces gens pour faire la guerre!? Voilà la racine du mal!! La haine
et la cupidité de l’argent dans la fabrication et dans la vente des armes. Cela doit nous faire pen-
ser à qui est derrière, qui donne à tous ceux qui sont en conflit les armes pour continuer le
conflit!!!»
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /138 189
Extrait du discours du Pape François du 24 mai 2014
"Ce n'est pas moi, c'est l'autre" est un des moyens de se dédouaner de sa responsabilité. Si
l'autre agit mal - qu'est-ce qu'agir mal ? - il faut que je l'en empêche !
Peut-être faut-il cette question provocante : "Qui est le terroriste de l'autre ? ". Qui accep-
terait de se sentir un peu responsable du génocide rwandais ? Qui reconnaîtrait le terro-
risme d'Etat… Celui qui ne sait pas se mettra du coté du plus fort ou du politiquement
correct, c'est humain.
Où est alors la dignité ?
La dignité s’apprend-t-elle!? Auprès de ses parents, quand eux-mêmes sont dignes. Qui
peut juger que les parents sont indignes, qui peut apprendre aux parents à être dignes
d’élever des enfants!?
A l’école, où l’on peut apprendre le comportement social, l’indépendance de la pensée et
sa confrontation à la critique, le refus du prosélytisme, la détection de l’indignité, la notion
de conscience collective,...
La dignité se vit, dans la liberté de disposer de son propre corps, sans atteindre à la liberté
et à la dignité des autres, y compris face aux souffrances ultimes.
La dignité est aussi collective. Chacun doit comprendre que chacun a besoin des autres
pour que la société s’épanouisse, dans le respect des services publics qui eux-mêmes as-
surent la dignité de tous et la sauvegarde de la planète.
La dignité est dans la démocratie sanitaire, dans la démocratie économique (sociale et so-
lidaire) dans la sécurité sociale de l’alimentation, du logement et des accidents de la vie
(chomage, divorce, accidents corporels et moraux, retraite et fin de vie)
La dignité est dans l’égalité (hommes/femmes, handicap, citoyens de tous pays).
La dignité est aussi la liberté de croire et de ne pas croire, de pensée et d’expression.
La dignité est un principe de la science et des techniques. Le trafic de données person-
nelles et les atteintes à la vie privée sont indignes, tout autant que celui des fausses infor-
mations ou que le mépris de la personne humaine dans l’usage des outils anciens ou mo-
dernes ou futuristes. Les applications de l’intelligence artificielle peuvent générer des
conduites indignes, telles que les discriminations et les malveillances ou la déshumanisa-
tion des prises de décision. L’éthique dans la recherche n’est pas évidente à pratiquer, en
particulier dans le domaine médical.
Une cybersécurité renforcée doit s'assurer que toutes les données sont cryptées. Les entreprises
doivent être particulièrement vigilantes au traitement des données associées à l’identité du tra-
vailleur, aux personnes ayant accès à ces données et au stockage de ces données car ces données
peuvent aussi être utilisées à des fins de surveillance. Ces dispositifs doivent se conformer à la fois
aux règles dictées par la loi Informatique et Libertés (loi n° 78-17 du 6 janvier 1978) et au
règlement européen sur la protection des données (RGPD de mai 2018)!: principe de finalité,
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consentement et information des personnes et conservation limitée des données, droit à la portabili-
té des données, droit à l’oubli, droit à la limitation du traitement, droit d’opposition au profilage,
désignation d’un Délégué à la Protection des Données. Une déclaration auprès de la CNIL est à
déposer pour pouvoir traiter ces informations en toute légitimité.
En 2021, la Commission Européenne a présenté une proposition concernant un règlement sur
l’IA qui contiendraient des cadres juridiquement contraignants pour son utilisation, “en faveur de
l’excellence et de la confiance dans l’intelligence artificielle” et propose une approche des systèmes
d’IA selon plusieurs niveaux de risque.!: “La constitution du tout premier cadre juridique sur l’IA
et d’un nouveau plan coordonné avec les états membres garantiront la sécurité et les droits fonda-
mentaux des personnes et des entreprises, tout en renforçant l’adoption, l’investissement et l’inno-
vation de l’IA dans toute l’UE. De nouvelles règles sur les machines et les équipements compléte-
ront cette approche en adaptant les règles de sécurité pour accroître la confiance des utilisateurs
dans la nouvelle génération polyvalente de produits.”
Les approches réglementaires (norme ISO/TR 22100-53, proposition de mise à jour de la di-
rective «! Machines !» n° 2006/42/CE) va obliger les concepteurs des machines intégrant de
l’IA à créer des équipements aptes à créer de nouvelles fonctions sans nuire à la sécurité, en décri-
vant les méthodes utilisées pour entrainer automatiquement les machines. Des exigences complètes,
claires et vérifiables sur les cas pour lesquels des décisions prises par des méthodes de l’IA ont une
incidence sur la sécurité, doivent être impérativement respectées.
Les critères de conformité doivent contenir des indications sur!:
- la spécification et la modélisation,
l’«!explicabilité!» des décisions (obligation d’explication des décisions algorithmiques)!: étant
donné que les décisions des systèmes et objets dotés d’IA seront de plus en plus présentes, l’expli-
cabilité de leur comportement devient cruciale, en particulier en y adjoignant des algorithmes ca-
pables de donner eux-mêmes les raisons de leurs choix à la demande,
la «!compréhensibilité!» des décisions (connaissances permettant d’avoir une analyse critique),
la «! transposabilité !» à différentes situations estimées similaires (analogie des performances de
l’IA à divers cas d’application),
la vérification et la validation du système,
la surveillance pendant l’exécution,
l’interaction homme – machine (dont capacité à rester décisionnaire),
la sécurisation et la certification des processus.
https://www.officiel-prevention.com/dossier/protections-collectives-organisation-ergonomie/
logiciels-applications-de-securite/la-prevention-des-risques-professionnels-de-lintelligence-arti-
ficielle
Dignité du peuple - Banalité du mal
Kolesnikov, Le Monde du 14/04/22 :
Si la nation [la Russie de Poutine] réfléchit un jour à ce qui lui est arrivé, et à ce qui a été fait
avec son consentement, elle trouvera mille excuses. L!«!homme de masse!» d’Arendt partira du
postulat suivant!: «!Lorsque sa profession l’amène à tuer des gens, il ne se considère pas comme un
meurtrier, car il ne l’a pas fait par prédisposition, mais en vertu de sa profession. Il ne ferait pas
de mal à une mouche juste comme ça!» (extrait de la culpabilité organisée et la responsabilité uni-
verselle)
Dans sa conférence « Responsabilité personnelle et régime dictatorial », Annah Arendt ex-
plique «!qu’il serait erroné d’appliquer le principe de culpabilité collective au peuple alle-
mand et même à « toute l’histoire allemande de Luther à Hitler ». « En pratique, écrit
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Arendt, cela est devenu un moyen universel de blanchir ceux qui avaient été réellement im-
pliqués dans des actes criminels, puisque là où tout le monde est à blâmer, personne n’est à
blâmer. !»
Dignité des dirigeants
Aristocratie, Oligocratie, Ploutocratie, Gerontocratie, Technocratie, à ceux-là, la dignité
échappe souvent, submergés par le vertige du pouvoir où la fin justifie les moyens.
L’État de Droit, qu’il a fallu des millénaires à contruire, pourra-t-il un jour se nomme
l’État de Dignité!?
Le système qui permet les fonds vautour est indigne
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fonds_vautour
Dignité de la justice
La Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne commence, à la première
ligne de l’article 1, par!: «!La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée!».
La loi fondamentale pour la République fédérale d’Allemagne du 23 mai 1949
inscrivit ainsi, dès le premier alinéa de son article 1er, que « La dignité de l’être
humain est intangible. Tous les pouvoirs publics ont l’obligation de la respecter et
de la protéger ».
En France, le Code civil, suite à la loi sur la bioéthique, stipule que!:!«!La loi assure la
primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le
respect de l’être humain dès le commencement de sa vie!». Pour B. Edelman, « il
ne [s’agit] plus d’opposer la liberté au despotisme mais la dignité à la barbarie »
Pour Muriel Fabre-Magnan, dans la revue interdisciplinaire d’études juridiques, «!La
dignité est un principe ou un axiome qui doit être respecté en chaque personne, non pas seulement pour elle-
même, mais parce que la représentation de l’humanité de chacun d’entre nous est liée à l’humanité de tous
les autres.
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La dignité de la personne humaine n’est donc ni un droit subjectif, ni même un droit de l’homme. Elle est un
principe, plus précisément le principe premier.
La dignité de la personne humaine n’est pas seulement indémontrable et indérogeable. Elle est même sans
doute d’une certaine façon indicible.!»
La justice doit respecter la dignité des hommes qu’elle juge et, ce faisant, elle se doit d’être
elle-même digne. Sa diligence, son intégrité, sa pondération , ses jugements et la façon
dont elle les rend représentent sa dignité.
Dignité de la science - Robotisation et éthique
Le titre du Monde papier du 28 octobre 2016 “Quand les constructeurs automobiles re-
lancent le débat philosophique” a été remplacé dans l’édition Abonnés du même Monde
par son sous-titre « La révolution technologique en cours est appelée à bousculer notre
rapport à la morale ».
En lisant la tribune de Christophe Salvat, j’ai moi aussi perçu que le véhicule automatique
ne devait pas fonder une morale qui lui serait spécifique, avec le risque que le débat philo-
sophique puis juridique soit biaisé.
La robotisation commence dès le premier outil utilisé par l’homme. Si l’outil blesse quel-
qu’un en se cassant, qui sera responsable (ou coupable) ? Il fut un temps où la victime ad-
mettait l’accident ou l’erreur de manipulation et chacun s’assumait, parce que le lien entre
ceux qui fabriquaient ou qui maniaient l’outil et la victime était direct. Aujourd’hui, le lien
est devenu juridique complexe. La victime (ou ses ayant-droits) a besoin d’un coupable of-
ficiel. L’Etat de droit a heureusement repoussé la vengeance (ou le lynchage) derrière le
jugement le plus équitable possible. Le “lobby du droit” devient de plus en plus puissant et
diversifié. Entre l’éthique et le juridique, qui doit gagner ? Entre le collectif et l’individuel,
qui doit gagner ?
Depuis le VAL lillois construit en 1979 (inauguré en 1983), le métro automatisé s’est géné-
ralisé. Pour illustrer le débat, il faut savoir que les ingénieurs du VAL ont mis au point le
concept de porte-palière pour éviter les chutes sur la voie. Pour sa part, le métro parisien
avait développé le concept de fosse anti-suicide pour laisser une chance de survie lors
d’une chute. La Ville de Lyon s’est aussi offert un métro automatique (ligne D, 1991). Mais
l’ingénieur de l’époque a jugé que les portes palières étaient inutiles et a remplacé cette
protection par un système de rayons infrarouges détectant les chutes et déclenchant l’arrêt
d’urgence de la rame entrant en station… Question : l’ingénieur a-t’il été inquiété par la
justice lors des accidents liés à des chutes ? Je n’ai pas la réponse, mais aujourd’hui, la ligne
D du métro de Lyon est équipé de portes palières.
Bientôt, les avions cargo seront automatiques, Amazon livrera des pizzas par drones et il
est aussi question que les cargos maritimes soient automatisés. Les conducteurs de trains
n’ont plus qu’un rôle de veille “au cas où”…
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Aujourd’hui, les véhicules routiers ont des automatismes de plus en plus performants :
l’ABS, le parking automatique, la conduite automatique dans les embouteillages, la prime
d’assurances indexées sur votre façon de conduire. Nous allons passer presque insensible-
ment de la voiture électrique de 1890 au taxi automatique… avec un taux d’accident de
plus en plus faible.
Quelque soit la sophistication des algorithmes, il y aura toujours des accidents. Un
conducteur humain pourra toujours dire que le soleil l’a aveuglé, au point de ne pas voir
le piéton, mais on ne pardonnera pas au véhicule automatique d’avoir été aveuglé. On
pardonne au conducteur métro d’avoir percuté celui qui est tombé sur la voie au dernier
moment, on ne pardonnera pas la même chose à un métro automatique, d’où l’invention
des portes palières.
Le véhicule routier automatique doit être irréprochable, et ses promoteurs sauront analy-
ser chaque accident en profondeur, comme on sait le faire pour les accidents d’avions.
Pour eux, l’éthique est une obligation. La justice fera le reste : le conducteur est respon-
sable lorsqu’il provoque un accident, sauf s’il s’agit d’un défaut d’entretien du véhicule. Le
conducteur d’un véhicule automatique est celui qui a conçu l’automatisme. On peut ima-
giner des cas litigieux si l’utilisateur du véhicule donne au véhicule l’ordre d’un trajet in-
terdit dont le constructeur n’aurait pas connaissance.
L’éthique doit se prononcer sur le domaine d’usage afin d’éclairer la justice et les justi-
ciables. De là à condamner l’informaticien qui n’aurait pas prévu une situation exception-
nelle où même un conducteur humain aurait été piégé, le pas ne sera franchi que par des
gens cupides (le lobby du droit) ou par des êtres humains qui ont du mal s’assumer au sein
de la société (les victimes qui ont besoin d’un coupable). Voilà un chantier pédagogique
pour les philosophes,… qui éviteront, j’espère, de s’appuyer sur des situations improbables,
comme le dilemme du tramway, (merci à Christopher Bauman et Peter McGraw qui
notent la stupidité, l'irréalisme et l'inapplicable du dilemme dans la vie réelle) ou des
anecdotes terrifiantes pour conduire les débats.
Dilemme du tramway (ou du véhicule autonome)
Vaut-il mieux écraser un homme plutôt que deux ? Dans l'absolu, la réponse est simple. Dans le
relatif, la réponse ne paraît pas évidente à tous. S'il s'agit de tuer les quelques porteurs d'un virus
très dangereux pour épargner les millions de victimes de la grippe espagnole, la question est aussi
compliquée que la réponse ? Le cerveau commence à se mettre en activité. Selon la conscience de
chacun, il y a ceux qui préfèrent que l'on tue abondamment en Syrie, ou en Libye,… plutôt que
de voir mourir quelques soldats de chez nous. Généralement, il y a ceux qui pensent planète et
ceux qui pensent village ou famille.
L'arrivée du véhicule autonome est l'occasion de réfléchir peu pour certains ou beaucoup pour
d'autres, de manipuler les opinions, par exemple, à l'aide de pseudo-études scientifiques "En cas
d'accident inéluctable avec plusieurs piétons, quelle victime une voiture autonome doit choisir ? ".
Question sur le sexe des anges ! Comme si l'algorithme devrait choisir entre un PDG et un SDF,
entre un gros et un maigre, entre un homme et une femme, entre un enfant et un vieillard… entre
un noir et un blanc, entre un émigré catholique et un émigré boudhiste… !!?? Sous couvert de
l'utilisation d'un nouvel outil de transport, certains chercheurs provoquent à hiérarchiser les indi-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /143 189
vidus. La voiture autonome n'est qu'un nouvel outil et non pas un fantasme. Laissons la morale
en dehors de ces réflexions malsaines… Ou alors, il n'aurait pas fallu inventer le feu !
On ne saurait fonder une éthique uniquement sur la capacité d’un véhicule automatique à
conduire le plus parfaitement possible dans le meilleur des mondes possible. Le débat doit
être élargi à la robotisation dans sa globalité.
Dans le domaine des services, le robot gagne au jeu de go, il gagnera au badminton. Plus
sérieusement, il peuplera les hôpitaux, soulagera les aide-soignantes, diminuera les mala-
dies nosocomiales, mais certaines familles continueront à attaquer en justice les médecins
qui n’auront pas empêché l’un de leur membres de mourir. Ce sont les nouvelles façons de
“faire son deuil”, hors des débats philosophiques, mais au sein des passions humaines.
Quant aux robots dans l’éducation, le futur est une énigme, tant l’innovation est proli-
fique. Déjà, certains robots assurent du travail de garderie (d’enfants ou de vieillards), ou
sont de bons “compagnons” pour les autistes. Verra-t’on des élèves mieux s’accommoder
d’un robot professeur que d’un professeur humain ? Un jour ces élèves seront les nou-
veaux philosophes.
L’industrie et l’agriculture se robotisent. Les métiers évoluent. Le travail productif est fait
par des robots intelligents. Le métiers évoluent en complexité, mais l’emploi devrait dimi-
nuer et être plus mal partagé. L’éthique du travail doit évoluer.
Même le domaine de la pensée est en mutation technologique. Les conversations avec les
ordinateurs pourraient faire croire à une intelligence humaine (test de Turing,…). L’intel-
ligence artificielle aidera à penser, à évoluer dans son jugement, à l’instar des réseaux so-
ciaux auxquelles se mêlent des machines,… avec toutes les dérives que l’on peut imaginer.
Reste l’intelligence artificielle au service de la guerre. Les robots tueurs, les aides aux déci-
sions stratégiques ou tactiques, les cyber-attaques ont un potentiel destructeur qui peut
échapper à l’homme. Le cynisme des fabricants et marchands d’armes relève d’une anti-
éthique : “plus il y a la guerre, plus je m’enrichis”. Il est difficile de parler d’éthique avec
des ingénieurs travaillant chez Dassault, Lagardère ou Eurocopter, dont même le gouver-
nement se fait représentant de commerce. Peut-on rêver d’une éthique mondiale ?
[Ajoût avril 2024!: Benjamin Barthe explique dans le Monde du 10 avril que le logiciel Laven-
der a fourni à Israël une banque de cibles gazaouites de 37!000 noms, puis que des «!smart
bombs!» attaque leur domicile au prix de victimes collatérales (entre 15et 20 pour une cible de
bas niveau et entre 100 et 300 pour celle de haute valeur). Où est la dignité!?]
Face aux révolutions technologiques, l’éthique bouge ses lignes lentement, de façon su-
breptice, entre ceux qui pensent comme avant et ceux qui pensent pour après. Qu’on le
veuille ou non, les voitures, les bateaux, les avions deviendront automatiques, les hôpitaux
seront robotisés, la pensée sera assistée, la notion de famille deviendra élastique, de la
conception jusqu’à la mort … L’usage dira peu à peu le nouveau droit. Le “lobby du
droit” a de beaux jours devant lui. On aimerait que les philosophes passent avant pour af-
firmer la dignité de chacun et de tous.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /144 189
Bien-pensance
Comme disait si bien Georges Brassens : " Mais les braves gens n'aiment pas que l'on suive
une autre route qu'eux". La route des braves gens est pavée de bonnes intentions et penser
comme les braves gens est une façon de ne pas se sentir responsable. Par exemple :
Howard Zinn dans Une histoire populaire des États-Unis : “le pauvre ne pouvait espérer s'en
sortir par le haut qu'en pénétrant dans le club restreint des riches par un effort extraordinaire – et
avec un peu de chance Chapitre XI, “Les barons voleurs – Les rebelles”, p.304.
Zinn cite à ce sujet un extrait très significatif de cette idéologie du self-made man, laquelle est
incontestablement liée à l'éthique protestante : “Dans les années qui suivirent la guerre de Séces-
sion, un certain Russell Conwell, diplômé de l'université de droit de Yale, pasteur et auteur de
livres à succès, tint la même conférence (« Acres of Diamonds ») plus de cinq mille fois devant
différents auditoires à travers tout le pays. Il s'adressa au total à plusieurs millions de personnes.
Son message était simple : tout le monde peut devenir riche s'il travaille assez dur ; partout, si les
gens voulaient bien se donner la peine de chercher, se trouvent des « acres de diamants». Voici un
extrait de cette conférence : « J'affirme que vous devriez être riches et qu'il est même de votre de-
voir de le devenir, [...] Les hommes riches sont sans doute les individus les plus honnêtes de la
communauté. Je n'hésite pas à le dire clairement : 98% des hommes riches en Amérique sont des
gens honnêtes. Et c'est pour cela qu'ils sont riches. C'est pourquoi ils reçoivent l'argent en récom-
pense. C'est également pour cela qu'ils dirigent de grandes entreprises et trouvent un grand nombre
de gens qui acceptent de travailler avec eux. C'est parce qu'ils sont honnêtes. [...] Je compatis
avec les pauvres, qui sont pourtant bien rares à mériter cette compassion. En effet, compatir avec
un homme que Dieu a puni pour ses péchés, c'est agir mal. [...] N'oublions jamais qu'il n'est pas
un seul pauvre en Amérique que sa propre incompétence n'ait pas maintenu dans la pauvreté."
Il semble qu'il y ait encore au XXIème siècle du monde pour apprécier un tel discours.
Une autre façon de bien-pensance, est de se référer aux codes implicites ou explicites du
lieu social environnant. Un seul coupable est plus pratique qu'un "brouillard" de cou-
pables. Autre exemple :
La loi californienne, en matière d'incendie , ne reconnaît qu'un seul responsable, celui qui l'a dé-
clenché. (ce qui fait l'affaire des assureurs qui peuvent attaquer la Distribution électrique qui peut
être le déclencheur d'incendie majeur, mais aussi ce qui dédouane ceux qui ne veulent pas lutter
contre le réchauffement climatique). La notion de la responsabilité contextuelle n’existe pas dans
cette société de pionniers plus pragmatique qu’humaine.
Les réseaux sociaux ont noyé la bien-pensance. Ils la démultiplient au travers des commu-
nautés de "suiveurs" - Pensée émue pour le Général de Gaulle qui disait :" Les Français
sont des veaux ! - Chaque communauté virtuelle pointe celui ou ceux qu'ils tiennent pour
responsable, jugeant souvent avant la Justice. Le coté positif est que le débat est élargi et
que l'on est plus intelligents à plusieurs. Le coté négatif est la pensée en meute, la bien-
pensance de la meute.
Service militaire
Apprendre à faire la guerre, pour faire plaisir à Messieurs Dassault, Lagardère et
consorts.
La guerre en Ukraine va permettre de renouveler les stocks et d’avoir de nouvelles exi-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /145 189
gences. Il faudra sûrement préparer la prochaine guerre, innover dans de nouvelles
armes!: les essaims de drones, la cyberguerre, les missiles furtifs, le chantage aux res-
sources stratégiques, les minages préventifs de pont ou d’ouvrages stratégiques, la contre-
information, la voiture-suicide sans conducteur, les machines à séismes provoqués s’ajou-
terons aux “illégales” mines anti-personnel ou à sous-munition.
Au XXème siècle, on estime à 191 millions de victimes de conflits politiques (rapport
OMS 2002), sans parler des famines indirectement liées et des estropiés et futurs estropiés
victimes des sous-munitions résiduelles. 5000 morts chaque jour !
D’un autre coté, la défense du territoire et son industrie occupent plus de 500 000 em-
plois. (160000 travailleurs, 300000 militaires et administratifs, 100000 gendarmes)
Passons sur l’Histoire qui justifie bien des armées, de défense comme de conquête.
Aujourd’hui, l’armée se justifie dans l’urgence de garde-fous. Il y a deux façons de garde-
fous : le bastion et la palabre.
Le bastion était la ville fortifiée. Aujourd’hui, ce sont des missiles, des chars, des avions, des
navires et des satellites, avec tous leurs servants,... dont bien peu sont prêts à mourir pour
une noble cause. La vie d’un soldat vaut bien des symboles. Il ne s’agit plus de la vie d’un
homme, mais de la survie d’une société. Et pourtant un soldat mort est aussi un homme
mort.
La palabre d’aujourd’hui est plus que la diplomatie. Les échanges se font par TV interpo-
sées. Les media sont l’arbre à palabre et contribuent plus à éloigner le conflit qu’à l’attiser.
Ne parlons pas du commerce, qui prend trop souvent la forme de conflits économiques -
qui souvent sous-tendent les conflits armés - dont les plus pauvres font les frais.
Ces garde-fous sont pour les situations d’urgence. Va pour la force, quand la ruse n’a pas
suffit. Encore faut-il que la force soit adaptée à l’urgence... Vaste débat !
Hors de l’urgence, les latins nous ont légué l’adage «Si vis pacem, para bellum» (si tu veux
la paix, prépare la guerre), sans doute valable il y a 2000 ans, mais à débattre aujourd’hui,
sur le thème : «Ce n’est pas avec des coups qu’on arrêtera la violence».
La sagesse voudrait que l’on se préoccupe d’éviter les situations d’urgence, d’éviter que les
clochemerles ne deviennent des casus belli, que les passions ne l’emportent sur la réflexion
et que l’on apprenne à faire la paix des braves plutôt que la guerre des peurs. La préven-
tion coûte humainement et matériellement moins cher que la sanction, mais cynisme ou
lâcheté, ou manque de vigilance et d’humanisme, nous ne savons prévenir.
Lorsque nos députés ont voté la suppression du service militaire, la Commission parle-
mentaire en charge d’un rapport préliminaire avait conclu que l’institution était trop utile
pour être supprimée. Nos députés avaient sans doute reçus trop de sollicitations indivi-
duelles pour échapper à ce service si déprécié pour comprendre l’importance de celui-ci.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /146 189
Au-delà de l’éphémère «savoir dégoupiller une grenade», le service militaire était le lieu de
la découverte citoyenne, de la découverte de la diversité et de l’appartenance à une socié-
té. Accessoirement, les appelés étaient matière à une statistique qui montrerait probable-
ment qu’aujourd’hui notre société est en déclin.
Même dans sa forme anachronique, le service national (justement rebaptisé) était une ins-
titution fondamentale, un lieu où chacun pouvait apprendre et comprendre comment pas-
ser de l’individuel craintif au collectif solide et tisser des liens élargis, un lieu où le service
public peut prendre une dimension d’entr’aide et d’assistance aux détresses du monde.
La logique voudrait que l’on répare cette erreur et que chaque citoyen comprenne qu’une
année de Service National autant civique que militaire devrait être l’évidence de l’entrée
dans la société. Plutôt qu’y apprendre à faire la guerre, je suggère qu’on y apprenne à
«vivre en guerrier», non pas le guerrier martial et sanguinaire d’hier, mais le guerrier vigi-
lant, conscient et humaniste, intégré dans de multiples actions civiques.
Par exemple :
participer à la mise à jour des risques, dans leurs probabilités, dans leur gestation, dans
leurs conséquence civiles, sociales et économiques, dans leurs emplacements
rechercher les habitats insalubres ou indignes (Sont qualifiés de locaux indignes, tous les
locaux utilisés à des fins d'habitation et impropres par nature à cet usage (cave, garage,
grenier) ainsi que les logements dont l'état expose leurs occupants à des risques mani-
festes pour leur santé. L'habitat indigne comprend différentes notions : la non décence,
le non-respect du règlement sanitaire départemental, l'insalubrité, les locaux impropres
à l'habitation, le péril
rechercher les situations où la dignité est bafouée, comprendre qui bafoue, qui subit, qui
peut agir
aider l'aide sociale
aider aux devoirs, et pas seulement à ceux de l’école
aider à éduquer à la dignité
aider aux interventions nécessaires à préserver la vie.
Le libre-arbitre
Le libre-arbitre, la volonté humaine de se déterminer librement, au contraire du détermi-
nisme ou du fatalisme, dédouane la transcendance qui ne pourrait être tenue pour respon-
sable d'aucun mal moral : " Qui voudrait ne pas posséder de mains sous prétexte que
celles-ci servent quelques fois à commettre des crimes ".
Le libre-arbitre est la condition de la responsabilité. Se pose la question du degré de
conscience lors de la décision. Peut-on définir qui est "Je". Est-on "sachant" ? Est-on "ou-
bliant" ? Avons-nous un réel contrôle sur nos pensées et nos actions et sur les consé-
quences de nos choix. Les actes de la vie courante sont le résultat d'un apprentissage à la
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /147 189
fois conscient et inconscient. Tels nous sommes nés, tels nous avons été éduqués - au sens
le plus large - tels nous pensons et agissons. Lorsque, avant d'agir, nous mettons en place
les structures du choix, nous poussons les limites de notre liberté, pour autant que notre
comportement soit sous l'emprise d'une "nature intérieure sacrée" qui relève de l'inexpli-
cable, comme dans les temps anciens. Aujourd'hui, nous comprenons peu à peu que le
comportement humain est la synthèse des réalités tangibles de nos organes internes et de
notre environnement tout autant que les animaux. Plus on est conscient de notre environ-
nement, plus nos décisions se ciblent.
Quel a été le libre-arbitre de la rigidité de Staline ou de la folie d'Hitler ? Etre responsable
de la mort de millions d'individus signifie une pleine conscience ! J'opterais pour l'addic-
tion à l'action. Agir, toujours agir. Commander, c'est agir. Il y a toujours des gens pour
suivre les hommes d'action, dans le bonheur autant que dans la cruauté. Ainsi devient-on
bourreau. Ceux qui s'engagent dans la torture s'abrite derrière un ordre donné ou impli-
cite de la part d'un homme d'action ou de l'affidé d'un homme d'action qui lui-même…
Quand l'enfant demande à son père : "c'est quoi ton travail ?" et que son père est celui qui
torture dans les geôles politiques, que lui répond-il ? " Ce n'est pas moi qui décide !". Cette
réponse est-elle du libre-arbitre ? "Je fais ce qu'il faut pour que notre pays vive en paix !".
Cette réponse dit que la fin justifie les moyens, sale manière de se dédouaner de toutes les
vilénies.
Quel est le libre-arbitre des "followers" dans les réseaux sociaux!? Le premier clic d'adhé-
sion semble léger, sans grande conséquence. Mais progressivement la dépendance s'installe
et la volonté se dilue et là, il peut y avoir confusion entre "libre-arbitre" et "dynamique
chaotique". Au plan moral, l'indépendance de l'homme, résultat des choix de son libre-ar-
bitre, est très relative et donc le dé-responsabilise.
Pacifique ou pacifiste
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /148 189
Peut-être que je comprends mal
Les Anglais roulent à gauche. Même ceux qui ne sont pas contents roulent à gauche dans
les pays où la règle est de rouler à gauche. Celui qui roulerait à droite ne pourrait pas le
faire très longtemps, sauf quelques exceptions dans les pays où règnent un klaxonnante
anarchie.
Le «vivre ensemble» a défini des règles d'une infinie diversité. Il a défini des Etats. Tant
que les échanges lointains étaient limités, chaque Etat pouvait définir ses règles intérieures
et la façon dont pouvaient être définies les règles, de la dictature à la démocratie, en pas-
sant par l'oligarchie.
Je comprends que le TAFTA est un projet de traité inter-Etat qui aboutira à traiter les
Etats comme des organes de droit civil, où les forces économiques (les multinationales)
pourront faire condamner les Etats pour une législation qui leur serait défavorable. Par
exemple des règles environnementales qui seraient une entrave au commerce. Ce que
je ne comprends pas, c'est que ce projet est le fruit de négociations auxquelles nos élus
n'ont pas part. De quoi nous plaindrons-nous ?
Je comprends que la libéralisation des échanges augmente le volume des transports
mais que cette liberté met en péril des activités essentielles. Par exemple, la livraison
des poulets industriels aux pays d'Afrique pour qui l'élevage des poulets est une compo-
sante essentielle de leur économie de survie. Cette liberté est le marqueur du cynisme.
Je comprends que l'optimisation fiscale est considérée comme une pratique normale
puisque légale, à défaut d'être éthique, morale et humaniste. Incidemment, je com-
prends que l'attitude du citoyen face à l'impôt soit négative et que la relation entre les
impôts et le coût des services publics s'efface peu à peu. Crier que l'Etat nous vole est
absurde. L'Etat, c'est nous et nous avons l'Etat que nous méritons. Je comprends que
l'Etat ne soit pas très efficace, mais je pense que nous ne lui facilitons pas la tâche -
vaste programme d'éducation à la citoyenneté !
Je comprends que l'austérité rend austère... et que la dépense rend riche. Je com-
prends que les particuliers qui sont riches s'accommodent fort bien d'un Etat pauvre,
sans aller jusqu'à insinuer que les riches poussent à la pauvreté de l'Etat... sauf là où ils
peuvent en recevoir plus qu'il n'en donnent (les armes, les autoroutes, la socialisation
des pertes des banques,...). Je comprends qu'un pauvre Etat n'assure plus son rôle de
régulation et de redistribution.
Je comprends que, voici plusieurs siècles, les riches avaient leurs pauvres et que le
clergé s'occupait des oeuvres sociales. Aujourd'hui aussi, grâce aux incitations fiscales,
les riches choisissent leur pauvres et les ONG remplacent le clergé. L'Etat semble de
plus en plus inutile, cet Etat que l'homme «civilisé» (1789, 1945 entre autres) s'est don-
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né afin d'améliorer la vie collective : régulateur, protecteur, éducatif, redistributif. Le jeu
démocratique demande aujourd'hui moins d'Etat, moins de régulation alors qu'il serait
normal que les ventes d'argent soient taxées, moins de protection parce que le «chacun
pour soi» est la loi du monde libéral, moins d'accès à l'éducation parce que cela nous
coûte trop d'impôt et que les profs ont le mépris des parents (qui éduquera les
parents ?) plutôt que leur confiance, moins de redistribution, parce que l'héritage est
notre avantage acquis. Moins d'Etat ? Adieu Liberté, adieu Egalité, adieu Fraternité,
vous faites partie d'un ancien monde ! Adieu Dignité, adieu Humanisme, adieu Tolé-
rance et Diversité. Bonjour Cynismes, bonjour Acidités (victimisations), bonjour
Communautarismes, bonjour Violences.
Je comprends que nous sommes des citoyens-actionnaires, mais, comme tous les petits
porteurs, nous entendons et souvent approuvons les orientations des actionnaires prin-
cipaux. Je comprends que ces actionnaires principaux ne sont pas des citoyens isolés
mais des groupes d'intérêts qui savent se faire entendre de tous, en général à leur seul
bénéfice. J'appelle cela de l'habile manipulation.
Je comprends que la Bourse se porte bien si le coût du travail reste bas. Je comprends
aussi que les salariés fassent le gros dos lorsque le taux de chômage est important, car,
consciemment ou inconsciemment, ils craignent pour leur emploi et repoussent à plus
tard des revendications qui augmenteraient le coût du travail. Un salarié trop revendi-
catif est un indésirable et donc un chômeur potentiel et l'augmentation du coût du tra-
vail est un risque pour l'entreprise. Les possesseurs d'action ont bien compris qu'un
taux de chômage important est rémunérateur. A quoi bon investir pour moderniser
l'entreprise puisque cela va créer des emplois... et donc faire baisser la Bourse, pénali-
sant doublement les actionnaires : les investissements diminuent leur dividendes et les
actions perdent de la valeur.
Je comprends que l'on ne veuille payer que ce que l'on consomme. Ceux qui n'é-
coutent que les radios payées par les publicités ne voient pas pourquoi ils paieraient les
émissions de Radio-France. Ceux qui ne vont jamais à l'opéra ne comprennent pas que
leurs impôts payent le salaire des 1000 personnes qui y travaillent. Je ne sais comment
leur expliquer que la culture et la création sont la base de la vie en société.
Je comprends que les économistes ont reçu leur savoir de ceux qui savaient, c'est à
dire de professeurs d'universités reconnus, tellement reconnus qu'ils sont aussi
conseillers de ceux qui peuvent en tirer les meilleurs bénéfices : banques, multinatio-
nales, politiques. Ce faisant, ces professeurs-consultants construisent des raisonnements
plus utiles à leurs clients qu'à la société civile. Ce sont ces raisonnements qu'ils en-
seignent à leurs étudiants,... qui, à leur tour, les diffuseront dans le système économique
général. Je comprends pourquoi les petites et moyennes entreprises, la presse, les petits
épargnants adoptent le point de vue de ceux qui s'enrichissent sur leur dos.
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Pour l'anecdote, j'ai le souvenir d'un Ingénieur de Ponts, bon «commis de l'Etat», qui,
passé chez Vincy, n'a pas mis 6 mois à défendre les intérêts de son nouvel employeur, à
l'inverse de ce qu'il défendait au service de l'Etat.
Je comprends qu'une dette doit être honorée,... tant qu'elle n'est pas déshonorante.
Les contrats qui déclarent que les premiers remboursements couvrent les intérêts et
non le capital sont des contrats certes, mais sont aussi de l'extorsion de fonds lorsque le
débiteur/demandeur est en situation de faiblesse. Un prêt humaniste est celui où capi-
tal et intérêts se remboursent simultanément, avec des traites proportionnelles à la sol-
vabilité de l'emprunteur.
Je comprends que la dette de la Grèce et la dette de la France ne soit pas de même
nature et que la dette de la France n'est pas illégitime puisque les Français ont voté
pour des faiseurs de dette en leur nom démocratique. Mais le citoyen-actionnaire que
je suis comprend aussi que cette dette est stupide, puisqu'elle grève l'Etat par les intérêts
qui semblent éternels à rembourser chaque année. Si encore cette mauvaise finance
servait à faire produire la France au lieu de partir dans les dividendes d'actionnaires
pour la plupart étrangers. Le mal est fait, il nous faut faire avec et avec les contraintes
monétaires européennes que nos gouvernements ont été si fiers de mettre en place. Re-
grettons la Banque de France et la Banque des dépôts bridées par l’Europe.
Je comprends qu'en payant la TVA, les plus riches payent proportionnellement à
leurs dépenses. Mais cette contribution indirecte n'est pas redistributive et ne compense
pas l'effet qui veut que plus on est riche plus on s'enrichit,... et inversement. La redistri-
bution pourrait se faire avec l'impôt sur le revenu des particuliers et sur les bénéfices
des sociétés. Mais la jungle fiscale est perverse... à la grande joie des fiscalistes dont l'in-
térêt évident est de ne conseiller que les mieux lotis et leur descendance.
Je comprend que l'on pointe la cherté des service publics, mais que l'on fait tout pour
en accroître la complexité et la technicité. Comme si un kilomètre de tramway en 2015
pouvait être au même prix qu'en 1915, comme si une opération à coeur ouvert ne coû-
tait rien comme elle ne coûtait rien il y a 50 ans, puisqu'elle ne se faisait pas, comme si
l'on pouvait construire une maison comme il y a 100 ans sans vérifier qu'elle ne sera
pas balayée par une tempête ou une coulée de boue, comme si la justice devait traiter
le même nombre d'affaire qu'il y a 30 ans, comme si un Rafale pouvait coûter le prix
d'un Spitfire.
Je comprends qu'une analyse technocratique ait conduit à faire des collèges de 2000
élèves. Auraient-ils pensé, ces penseurs, à l'apport d'institutions à taille humaine dans le
bonheur national brut ? Je comprends que le métier de prof est un métier difficile,
voire impossible sans compétence pédagogique pour faire face à l'imbécile désacralisa-
tion de l'école. Certains imbéciles ont compris 1968 de travers et malheureusement ils
sont toujours là et ont même pris du grade. Sans parler des psycho-rigides péremp-
toires. Je comprends la rigidité ontologique des professeurs qui, face à leur élèves,
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doivent être sûrs de leurs savoirs. Seuls dans leur classe pendant de nombreuses années,
ils ont la certitude de leurs méthodes et de ce qu'il convient que les élèves sachent. L'E-
ducation nationale n'est pas prête à être réformée... d'autant que ces réformes sont la
proie des politiques, ceux en place qui essaient d'assumer leur rôle de gouvernance et
ceux de l'opposition qui ne savent qu'avoir le mépris électoral qui convient à leurs vi-
sées. Tout est bon pour devenir calife à la place du calife. Je comprends que l'ensei-
gnement d'aujourd'hui ne puisse plus être le même qu'hier et que la sacralisation de
l'école soit remise en cause. Mais je comprends que propager le mépris de l'Education
nationale et les mérites de l'enseignement privé engage notre société dans la sélection
de l'élite par l'élite. La société d'aujourd'hui n'a plus envie de redistribuer les richesses et
le pouvoir.
Je comprends que l'on soit content de vendre des Rafales à L'Inde, à l'Egypte ou au
Qatar et qu'il vaut mieux que ce soit la France qui les fabrique et les vendent plutôt que
des fabricants étrangers. J'aimerais comprendre en quoi ces armes immensément coû-
teuses peuvent améliorer le sort des pays qui se ruinent (ou qui ruinent leurs voisins)
pour les acheter.
Je comprends que les déforestations soient rentables pour certains, mais en éradiquant
les forêts primaires, on touche au patrimoine de l'humanité et en achetant des meubles
faits de ce bois, nous participons, copeau après copeau, au saccage de notre planète.
Cela me fait penser à cette légende amérindienne (rapportée par Pierre Rabhi ?) sur le
colibri qui porte de l'eau dans son bec pour la verser sur l'incendie. Le tatou qui l'ob-
serve lui dit «Mais que fais-tu ? Tu ne vois donc pas que cela ne sert à rien ? - Peut-être,
répond le colibri mais je fais ma part.» Copeau de bois précieux après copeau de bois
précieux, à chaque fois que nous achetons un meuble fait de ce bois précieux, je com-
prends que nous faisons notre part de saccage. Mais cette légende du colibri nous rappelle aussi
l'impuissance de l'homme seul. Si tous les colibris en venaient à piailler devant les fenêtres du Ministre
de l'environnement à chaque fois qu'un grand arbre primaire est assassiné, ils seraient peut-être enten-
dus!!
Je comprends la difficulté pratique des débats publics. Les réseaux sociaux et les fo-
rums sont une pollution beaucoup plus qu'une aide. Les «suiveurs» sont grégaires et ne
savent pas lever la tête pour voir le monde avec leur propres yeux. Il y a là un commu-
nautarisme rampant qui pervertira les élections générales...
Je comprends la défiscalisation sur les logements locatifs qui n'a pour effet que de
contribuer à construire dans les centres actifs où les loyers sont élevés,... au préjudice
des centres urbains qui meurent. Quand reverrons-nous du dynamisme dans les petites
villes et dans les bourgs où il aurait pu faire bon vivre. Pourquoi fait-on tout le contraire
: un numérus clausus qui ne permet pas de remplacer les vieux médecins dans les cam-
pagnes, des services publics qui ferment pour de fausses raisons de productivité,
grandes surfaces qui tuent les boulangers et les bistrots dans les villages...
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Je comprends que la crise est vecteur de chômage, mais je ne comprends pas que l'aé-
ronautique ne trouvent pas les milliers de jeunes techniciens dont elle a besoin, malgré
un salaire nettement plus élevé que celui des professeurs. Qui remettra à sa place l'es-
time du travail manuel ou des services à la personne.
Je comprends que les auteurs de films, de musique, de logiciels, de sacs à main et
autres productions se plaignent du piratage de leurs oeuvres. Mais je comprends aussi
que plus une oeuvre est piratée plus elle est connue, plus son auteur est connu, plus elle
se vend et plus les oeuvres suivantes seront connues et vendue. En fait, je comprends
plutôt que le piratage est une publicité gratuite. Qui plus est, une action en justice pour
ce «manque à gagner» est aussi une publicité. J'ose penser que la plupart des pirates
n'auraient pas acheté l'oeuvre s'ils avaient dû la payer et que ce «manque à gagner»
reste très faible.
Je comprends aussi que les droits d'auteur rémunèrent les auteurs d'autant plus que
leurs oeuvres sont connues. Je comprends que leurs descendants peuvent hériter de ces
droits, mais en respectant le principe de redistributivité des richesses, c'est à dire l'impôt
sur les successions. Je doute fort que le soit le cas, puisque la richesse continue à s'ac-
croître après la mort de l'auteur et deviennent un revenu (une rente) pour les héritiers.
Je comprends aussi qu'une oeuvre est un patrimoine qui, avec le temps, devient public
et que la durée des droits d'auteur reflète le rapport de la société à la culture. Il s'enlai-
dit d'autant. Les brevets vivent 20 ans pour que l'économie vive, alors que droits d'au-
teur vivent 70 ans : quel gâchis public !
Je comprends que l'on achète des tableaux pour agrémenter les murs de sa maison.
Certains tableaux sont plus réussis que d'autres, certains peintres peignent mieux que
d'autres. Un beau tableau d'un peintre reconnu peut valoir le prix de sa réalisation
augmenté du prix de la réputation. De là à acheter un seul tableau à 450 millions d'eu-
ros attribué à Léonard de Vincy, il y a perversion. Un tel achat peut difficilement passer
pour une aide au développement de la culture, en particulier pour les peintres crève-la-
faim qui sont insultés par ces spéculations financières. On rêverait d'une fiscalité pro-
gressive sur ces achats, tant sur la plus-value à la vente que sur la possession du bien.
Je comprends qu'on dise de moins dépenser à celui qui est endetté. Si celui-ci est en
économie de survie, ce conseil est indigne. Quand il s'agit d'un Etat endetté, je com-
prends que ses créanciers lui dictent une politique d'austérité. En dépensant moins,
l'Etat pourra rembourser ses dettes. Ce faisant, l'Etat dont les dépenses sont, hors la
dette, des dépenses localisées, n'insuffle plus ni les productions ni les services. L'emploi
diminue, les dépenses individuelles diminuent, les taxes et impôts sur le revenu dimi-
nuent. Les recettes de l'Etat diminuent, l'Etat s'appauvrit et n'arrive pas à rembourser
sa dette.
Les créanciers sont indignes. Le FMI et les banques associées sont indignes.
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Je comprends que l'on aime écouter la musique d'aujourd'hui à plein volume. C'est le
moyen sympathique de devenir sourd très jeune. Les addictions ont de multiples vi-
sages : la musique à 90 décibels, l'alcool, les drogues molles ou dures, le tabac, le télé-
phone, la drague, la bouffe, les achats compulsifs, le pouvoir... On peut aussi parler des
addictions sociétales (identitaires), qui sont sur un cycle plus long et peuvent conduire
au pire : la guerre, la torture, la bourse,...
Je comprends la responsabilité des parents dans l'éducation de leurs enfants. La res-
ponsabilité s'apprend. Qui leur apprendra ? Qui leur apprendra à assumer leur place
dans la société plutôt que de pointer du doigt ceux qui pourraient les dédouaner de
leur responsabilité, fût- elle partielle ? Le jour où ils assumeront dans les actes quoti-
diens comme dans les grandes décisions, leurs enfants sauront ce que veut dire assumer.
J’accuse !
Il y a deux méthodes pour changer les choses. L’une consiste à épouser les
contours du discours ambiant, de la pensée commune, des pratiques du
temps. Puis, doucement, sans faire de bruit, on pourra alors s'appliquer à
faire dériver imperceptiblement un petit bout du discours, puis le petit bout
d’à coté dans un long travail de fourmi. On changera alors les choses si les
fourmis sont nombreuses. Et si le travail des unes contribue bien au travail
des autres.
L’autre méthode est brutale. Elle assène. Elle dit au gens qu’ils sont bêtes.
Elle ne prend pas le temps de démontrer. Elle inquiète et suscite d’aussi bru-
tales antidotes. Souvent, la brutalité ne paie pas, mais quelquefois, elle peut
servir de phare aux fourmis de la méthode douce.
L'aveuglement des puissants tout autant que l'aveuglement des misérables
conduit ainsi à ma violence. Violence verbale bien sûr !
J’accuse tous ceux qui ont une parcelle de pouvoir, d’incitation à l’immobi-
lisme. Rappelons-nous un discours: “Tremblez, braves gens! car la hausse de
quelques barils de pétrole, cru 1974, vous mettra tous à genoux.” La crise
avait trouvé un responsable. Mais êtes-vous bien certain que le docte éco-
nomiste a raison, quand il vous explique que lorsque le prix d’un litre de pé-
trole sortant du puit passe de 100 à 110, le prix du pain à la boulangerie
doit doubler!?
Chaque année de crise a inventé d'autres responsables. Yen, dollar, mark,
conjoncture, mondialisation... Alors les puissants peuvent nous dire :
“Tremblez, braves gens, car le spectre du chômage s’avance et vous fauchera
tous.” A entendre ces discours, qui de nous serait assez fou pour dire à son
patron: “Je ne suis pas bien chez vous, je vais voir ailleurs”. Immobilisme...
et docilité!! Qui de nous oserait encore dire:”J’ai une idée d’entreprise, je
vais entreprendre” ? Immobilisme ! De toutes façons, le banquier ne prêtera
qu’aux riches.
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J’accuse les gros joueurs en Bourse de saupoudrer les citoyens avec quelques
actions et obligations. Obligation pour eux d’être hypnotisés par les cours,
fermant leurs idées et leur coeurs comme le font les spéculateurs sans scru-
pules.
Vous qui avez trois sous d’actions à la Sociétés des Eaux Privées, ou à la
Banque des Banquiers, oseriez vous dire que le PDG de la grosse société
dont vous avez trois titres est un mauvais citoyen profiteur de l'Etat lorsqu'il
"dégraisse". Qui doit donc payer la prise en charge de cette inhumanité, si
ce n'est l'Etat, c'est à dire nous, la société. Non, votre confiance de petit por-
teur est aveugle. Votre action a gagné 3%. Vous êtes content et vous dites:"
Il faut continuer ainsi.".
Je vous accuse, vous, les petits porteurs, de ne pas ouvrir leurs yeux plus loin
que le bout du nez de vos petites actions. Oui, vous avez gagné trois sous ici,
pendant que vous perdiez trois cent sous là, parce que la société est immo-
bile, et que ce sont vos pratiques mesquines qui encouragent à l’immobilité.
J’accuse chacun d’entre nous d’avoir un toit, une télé et à manger tous les
jours. C’est là tout ce qu’il nous faut pour nous rendre inconséquents. In-
quiets, certes, mais inconséquents!: "Aujourd’hui ne va pas trop mal, esti-
mons nous heureux et cultivons notre immobilité. Que les financiers s’en-
graissent et que les plus pauvres s’appauvrissent. Notre tour n’est pas encore
venu, profitons-en".
"Et surtout, ne disons rien à nos enfants, qui sont si beaux quand ils sont in-
souciants ! (1996)
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Le Génie et l'Imbécile
Les pyramides,
la mesure de la terre,
la tour Eiffel,
le débarquement sur la lune et aujourd’hui
Philae de Rossetta,
qui s’est accrochée le 12 novembre 2014 à la co-
mète 67P/Churyumov-Gerasimenko.
Voila quelques étapes du génie humain.
Dans le même temps, combien d’invasions et de barbaries, autant d’étapes
de la faiblesse humaine. Pour ne citer que les plus gros chiffres :
Un million de morts lors de la campagne de Russie - merci Napoléon - ,
10 millions en 14-18 - merci Guillaume II et les autres- ,
plusieurs dizaines de millions autour de la Russie soviétique - merci Lé-
nine et Staline-,
et tout autant en 39-40 - merci Hitler et les autres,
et tout autant en Asie - Merci Mao et Polpot et les autres
plusieurs millions au Vietnam - Merci Mc Namara,
plusieurs millions en Afrique au Moyen-Orient - Merci à beaucoup d’ir-
responsables.
plus 3000 morts dans les Twin Towers
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5000 morts par jour en moyenne au XXème siècle dans les conflits poli-
tiques (souvent mâtinés de religion - très pratique la religion) et dans le
même temps, l’homme a marché sur la lune.
Revenons au génie humain et à la comète 67P
pour saluer le génie de l’homme :
Il a d’abord fallu que l’on démontre que la
terre était ronde et qu’elle tournait autour du
soleil en même temps que d’autres planètes.
Quand tout est plat autour de vous et que le
soleil tourne autour au dessus de votre tête,
vous n’aimez pas que l’on vous dise que votre
perception est insuffisante pour comprendre
les étoiles. Et pourtant les Grecs ont réussi à
calculer la circonférence de la terre.
L’envie d’en savoir plus sur les orbites des planètes. Le travail du verre a
conduit à inventer les lentilles et les horlogers ont mis au point les méca-
nismes permettant de «poursuivre» les objets célestes. Que de génie hu-
main pour assurer la pureté des lentilles, le polissage des miroirs, pour
lutter contre les vibrations, pour construire d’immenses télescopes. Que
de patiences humaines pour observer et collecter des tonnes de relevés
qu’il faudra confronter à des équations mathématiques de plus en plus
complexes. La prédiction des éclipses se fait depuis plus de 2000 ans, et
l’on sait maintenant déterminer les irrégularités dans la durée d’un jour,
tout autant que l’on mesure la distance terre-lune à quelques centimètres
près.
Et puis, à force de scruter le ciel de notre étoile (le soleil), les astronomes
ont découvert des objets invisibles, à des millions de kilomètres de chez
nous. Qui sont ces génies qui savent voir à des millions de kilomètres ? Il
nous a fallu en savoir plus encore, alors on a construit des satellites.
Quelques cylindres en fer savamment assemblés, remplis de poudre,
comme le faisait les Chinois pour leur feu d’artifice depuis plus de mille
ans et tout autour un carroussel de technologies : la science des métaux
rares, de la combustion régulée, des transvasements de combustible, de la
mécanique des hautes pressions et des hautes températures, des capteurs
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en tous genres, voilà pour la fusée. Sans parler des transmissions qui ont
permis de voir en direct, voici déjà plus de 40 ans, le premier pas de
l’homme sur la lune et d’assister à son retour sur terre : quel culot
l’homme a-t’il eu d’entreprendre ce voyage ! Sans parler de l’armada
d’ordinateurs au service d’une équipe mondiale pour que science s’ac-
complisse.
Et puis nos mathématiciens astronomes ont cal-
culé le meilleur chemin d’un point qui bouge à
un autre point qui bouge pour être au centi-
métre près à des millions de kilomètres. Il ont
inventé la fronde cosmique où comment faire un
tour de lune pour accélérer. Au sommet de la fu-
sée, ils ont mis une navette qui marche toute
seule, et dans la navette ils ont mis un module
d’analyse qui accomètera tout seul sans pilote
sur un bout d’univers inconnu ou 100kg ter-
restres ne pèsent que 1g sur ce bout d’univers,
avec des ancres, avec une perceuse, avec des ins-
truments qui sont à eux seuls des années de tech-
nologies et des milliers de brevets...
...pendant que d’autres allaient faire la guerre en Irak... Cela n’a rien à
voir, direz-vous !
Qui sont les génies et qui sont les imbéciles ?
Ajoutons une quatrième dimension :
L'homme, dans son souci de se perpétuer, laisse des marques de son pas-
sage dans l'univers. Des enfants, autant que ses oeuvres, attestent de sa
courte existence. Dans mille ans, il restera peut-être Jeanne d'Arc, plus
pour son mythe que pour ses actes ; Charlemagne, qui a préfiguré l'Eu-
rope ; Galilée et Einstein ; la Tour Eiffel...
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Mais l'imbécile qui a torturé dans un sous-sol, qui a violenté l'un ou les
autres, qui a signé l'ordre d'une guerre : sera sa postérité, qui osera se
souvenir de son ancêtre indigne ?
La vie est trop courte pour se radicaliser. Passer des dizaines d'années
dans l'étroitesse d'un discours unique de violence, c'est être un
imbécile,... surtout s'il s'en réfère à un dieu.
https://commons.wikimedia.org/wiki/File:GGB_reflection_in_raindrops.jpg?uselang=fr
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Ainsi s'érigent les murs...
Espérantie le 5/12/98
A Madame Priti SINGH
Responsable de l’Office du Tourisme des Iles
Fidji
Objet!: Mur du millénaire
Madame,
C’est avec plaisir que j’accuse réception de
votre invitation à l’emmurement solennel de
mon invite aux générations futures.
Depuis que l’homme est homme, il a construit des murs, depuis le mur qui
l’abrita du vent, depuis le mur de son borie qui le garde des nuits fraîches, de-
puis le mur de ses maisons, de ses cabanons, de son immeuble, de ses sièges, de
ses salles de bains.
Murs domestiques, vous m’avez protégé, moi, petit de la terre.
Plus tard, j’ai construit des murs de forteresse, et puis mon empire a grandi.
J’ai construit le mur d’Hadrien, la ligne Maginot, le mur de l’Atlantique et ce-
lui de Berlin, et aussi les murs des lamentations, ceux de la terre promise.
Dois-je être fier de tous ces murs!?
J’en retiendrai trois!:
Les digues ou les jetées, que les hommes se sont mis à plusieurs à construire,
symbole d’une envie collective de vivre entre terre et mer.
La muraille de Chine, qui frappe un empire comme l’escargot marque son che-
min de bave – Sait-il où il va, cet escargot!?
Le mur des cathédrales, qui montre que l’homme est plus qu’un escargot, parce
que, même si l’homme ne sait pas d’où il vient, il se demande il va, et la
gargouille tout en haut du mur est là pour implorer l’azur.
Chère madame Priti Singh, aujourd’hui, vous m’offrez un autre mur, celui de
l’inutilité. Enfin, voilà un mur mathématique, cosmologique.
Croyez bien qu’il ne sera pour moi plus grand plaisir que de savoir enfoui
dans l’histoire d’un chiffre insondable quelques lignes qui vivront autant que
l’homme vivra.
Je reste à votre disposition pour participer avec fougue à votre projet.
Veuillez agréer l’expression de mes sentiments les plus pacifiquement Atlan-
tique nord.
Sadlig Ertiamel
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Mur du vieil hôpital de Saintes
Pour rire encore
Mon enterrement
C’est vrai que c’est rigolo de mettre en scène son propre enterrement, mais
à y réfléchir, le mort s’en fout complètement, alors que les vivants qui res-
tent ne s’en foutent pas tant que ça.
Donc laissons les faire à la sauce qui les arrange le mieux.
Bon, mais comme c’est quand même rigolo, je vais faire mon Salvador
Dali, narcissique en diable - T’as entendu, Dieu ? - Je suis mon propre
dieu, fait à mon image. Et Brel a bien dit : J’veux qu’on rie, j’veux qu’on
danse, j’veux qu’on s’amuse comme des fous quand c’est qu’on me mettra
dans l’trou !
Comme j’ai plus beaucoup de copains, on ira chercher des intermittents
du spectacle, qui joueront les pleureurs et les pleureuses, ça les fera bien ri-
goler. Dans la rue, devant le corbillard, il n’y aura qu’un trombone - Hein
! Monsieur William ! - qui chantera la peine en gémissant, comme à la
Nouvelle-Orléans. Le corbillard ? Comme si je pouvais trimbaler ma
caisse dans un Mercédes noir ! Non ! Une calèche, avec des couleurs vives
en arlequin, tirée par au moins deux chevaux. A la rigueur une 2CV déca-
potée conduite par un gars à cheveux longs. Il faudra filer un bakchich à
la mairie pour avoir le droit de faire un aller-retour sur le cours Mirabeau
à midi. S’il pleut, on attendra.
Le trombone sera en tête et jouera la mélodie du premier chant du Voyage
d’hiver de Schubert, en swinguant si possible. Derrière la calèche, les
pleureurs mimeront - danseront - la tristesse et les pleureuses l’allégresse,
au milieu des de la famille et des amis s’ils en reste, suivi par un bus de
la RATP des année 60, entrée par la plate-forme arrière ding-ding com-
plet, dans lequel on aura bricolé un moteur électrique, ou, s’il l’on en
trouve encore, un vieux trolleybus marseillais rafistolé pour suivre des ca-
ténaires fantômes.
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Si les passants demandent, on répondra : «!Ci-gît un passager de son
univers!», en précisant que le défunt n’a pas voulu que l’on divulgue son
identité.
Après le Cours Mirabeau, on ira au bord de l’Arc, avec le bus.
Là, un haut-parleur crachera d’abord l’Oraison funèbre bossuetienne, en
argot s'il vous plait, que l’on trouvera à la page «!Poésie!» du site
ertia2.free.fr.
Ensuite, on crachera le Concerto pour Violoncelle de Lutoslavski, qui dure
20 Minutes et qui en fera suer plus d’un. Mais c’est ça, un enterrement,
ça fait suer, parce que ça rappelle à chacun qu’il aura beau faire, il fau-
dra qu’il y passe aussi.
On crachera «!Vu sur le fleuve!» que l’on trouvera à la même page
«!Poésie!»
On terminera par «!Va petit mousse «! des Cloches de Corneville
Après, on servira exclusivement des hot-dogs et de la bière. Je sais, ça fait
un peu «!Don du sang!», mais mon enterrement, c’est pas pour les bé-
geules!!
Le reste, c’est «!ad libitum!» Ertiamel
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Astromologie
“Il y avait longtemps qu'on avait plus entendu parler de cette cu-
rieuse chose qui veut que l'on soit curieux de ce qui se dérobe à la
vue, mais que l'on soit beaucoup moins curieux de ce qui se dérobe
à l'esprit. D'un coté l'attrait du mystère, et de l'autre sa pleine ac-
ceptation. Heureusement, le genre humain, dans sa sage diversité,
a laissé croître les chercheurs de l'esprit, ceux qui savent ne pas
croire au loto, qui ne confondent pas la coïncidence statistique et le
surnaturel.
Je ne sais plus l’auteur de cette citation !
Je ne sais pas pourquoi, mais personne ne comprend ma lumineuse
explication :-). Mon bouffon disait : "Si tu ne comprends pas
quelque chose, change ton regard sur cette chose". Alors, lecteur,
change aussi ton regard sur cette poétique.
Vous êtes sous les ides de Mars. Voilà qui détermine votre caractère et
votre destinée. Difficile à croire pour un physicien, qui sait très bien que
l'effet gravitaire de la planète Mars est tout à fait négligeable devant l'effet
gravitaire de la colline près de laquelle vous êtes né.
Le statisticien pour sa part, vous répondra que les diseuses de bonne
aventure un brin intuitives, sont capable de prédire avec un certain succès
une prochaine coïncidence. Si vous êtes jeune et bien fait, il serait tout à
fait illogique que vous ne rencontriez pas dans les prochains jours un être
merveilleux, d'autant plus que cette prédiction, en laquelle vous tenez à
croire pour ne pas vous déjuger de votre visite à la boule de cristal, vous
incite à rechercher inconsciemment l'heureux évènement. L’astrologie se
rattache à la prestidigitation : il s’agit d’un “art divinatoire”
Pour ma part, à la statistique, je rajouterais l'astronomie. Vous êtes au
lever du jour, dans une contrée froide, au bord de l'océan, et les nuits
commençaient à raccourcir. Nul doute que votre caractère sera trempé à
votre découverte précoce du cycle solaire du jour et de l'année alors que
si vous naissez en plein milieu d'un suffocant jour d'été, votre premier
contact avec la nature sera terriblement différent et aura une certaine in-
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /163 189
cidence sur votre caractère. Tous ceux qui sont nés dans les mêmes condi-
tions astronomiques ont connus à leur naissance des conditions météoro-
logiques proches et “auraient” ainsi des traits de caractères communs…
que les “mages” auraient reconnus.
Mais qu'est-ce donc qu'un horoscope, sinon la définition astronomique
du lieu, du jour et de l'heure de votre naissance. Comme cette définition
revêt un caractère très poétique (avec Vénus, Jupiter, Orion et les autres),
l’astrologue épaissit le mystère et attire les crédules. L’astrologie n’est pas
une science, mais peut-être existe-il des scientifiques qui étudient les cor-
rélation entre le caractère des hommes et les conditions météorologiques
de leur naissance ?
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /164 189
Vue sur le fleuve de la vie et de la mort
Un fleuve, c'est toujours en bas.
Qu'on s'en écarte et il faut toujours monter,
qu'on le suive et l'on sera toujours en! bas.
L'eau est paresseuse,
elle s'amasse dans son lit, en foule.
La foule, c'est comme l'eau,
elle est toujours en bas,
elle s'agglutine.
Jamais elle ne monte,
jamais elle ne s'élève,
sauf en gouttes impalpables, !
lorsque le soleil les appelle,
une à une, par leur nom.
Elles s'en vont, sans bruit.
Mais, même au ciel,
les gouttes ne savent pas rester seules,
elles finissent par toutes se donner la main
et, la main dans la main,
elles peuvent avoir une force,
parfois plus grande
que la force des foules dans leur lit.
Orages,
trombes,
que d'eau,
que d'eau,
qui de nouveau va se précipiter
toujours plus bas.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /165 189
Faux semblant / vrai semblant
Il me semble bien que la scène,
il joue à faire semblant d'être un semblant de bohé-
mien,
semble apparaître au spectateur comme une histoire
vraisemblable
du soi-disant miracle de Noël en Provence,
probablement écrit pour raconter
la vraisemblance d'un mythe
qui semble avoir été vrai
pour tous ceux qui y croient.
C’est un peu court. C'est la de la métaphysique
concrète. Cela mérite quelques explications.
La Pastorale Maurel est une tradition provençale, un genre théâtral parti-
culier, inspiré des spectacles de l’époque de sa création en 1845. On y
trouve des traces d’opéras, de commedia dell’arte, du théâtre en alexan-
drin... et bien sûr d’une religiosité exacerbée. Chaque village montait
chaque année, au moment de Noël, sa Pastorale, sa commémoration de la
naissance de Jésus, replacée dans la réalité provençale. Aujourd’hui sub-
sistent quelques Pastorales à Nice, Draguignan, Fuveau, Aix, Marseille. Ces
spectacles n’ont guère plus de connotation religieuse ou régionaliste. On
monte une Pastorale comme on monte un opéra à thème religieux, mais
en gardant l’esprit provençal, chez les acteurs comme chez les spectateurs.
C’est un patrimoine culturel vivant : costumes, chants, personnages sont
ceux de la Provence.
L’un des personnages est le bohémien, qui apparaît, quand il achète
l’ombre du Pistachié valet d’étable, inspiré du Méphisto de Boïto ou de
Gounod, possédant quelques occultes pouvoirs, symbolisant l’étranger
crains et rejeté, voleur d’enfant. Le drame est construit sur la lutte du mal
- le bohémien - contre le bien - la société provençale autour de son Jésus
qui vient de naître.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /166 189
L’acteur qui joue le rôle du Bohémien fait donc semblant d’être un per-
sonnage qui semble être un bohémien sans être vraiment le voleur de
poule auquel le nom de bohémien pourrait faire penser. C’est un sem-
blant de bohémien, qui propose une histoire vraisemblable issue d’une
histoire à laquelle les chrétiens croient, qui semble donc avoir été réelle
pour eux. Cette histoire, racontée en provençal par des provençaux ra-
conte ce qui apparaît comme un mythe à ceux qui n’y croient pas.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /167 189
Et la colline se fit île...
Il y a bien longtemps, dans la plus haute antiquité,
les collines savaient se parler.
Quand l'une d'entre elles voulait dire à l'autre quelque chose,
elle murmurait son message dans le vent du soir.
Quelque mulot, ou une hermine, parfois une vipère
ou une araignée, entendait la plainte ou le soupir de contente-
ment de ce bout de terre que chacun louait à l'année.
Alors chaque animal devenait le colporteur de la plainte, du sou-
pir, ou de quelque histoire plus grave : la mort d'un arbre, un
éboulement, que sais-je, tout ce qui peut arriver à une colline
pendant sa longue vie.
Et chacun de ses habitants se sentait investi à propager l'his-
toire jusqu'à la colline voisine, et ainsi de suite, jusqu'à ce que
tout le canton sache la vie de tout le canton.
Bien sûr, dans les vallées, veillait un ruisseau, ou une rivière
qui arrêtait le messager et parfois le noyait. Mais le plus
souvent, le message passait de branche en branche grâce à l'écu-
reuil contrebandier ou à l'araignée d'eau. Ainsi, pendant long-
temps, la vie continua.
Un jour, cependant, une des collines qui surplombait la mer, ra-
conta que pour la première fois, les vagues avaient mouillé la fu-
taie de chênes. Sur le moment, la colline avait cru à une simple
colère de la mer.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /168 189
Mais d'année en année, la mer se fit plus pressante. Elle rugis-
sait et disait:" C'est à moi, c'est à moi". Comme si quelque chose
pouvait être à quelqu'un...
Insidieusement, l'eau montait.
Bien plus tard, un fond de vallon fut humecté d'eau salée. Les
deux collines s'en étonnèrent. Avec effroi, elles découvraient que
la mer avait maintenant gagné la gorge par où passait leur ri-
vière. La rivière se sentit comme amputée. Les gorges fières
n'étaient plus les siennes. Les collines, qui pourtant avaient de
la mémoire, commencèrent à oublier leurs pieds verdoyants qui
changeaient de couleur selon les saisons.
Un autre grand choc, ce fut l'année où la mer gagna le col qui joi-
gnaient deux collines. Elles se séparèrent à longs regrets, qui du-
rèrent plusieurs centaines d'années, jusqu'à ce que le gué dispa-
raisse le jour entier.
Avant, bien sûr, on pouvait se rendre visite, à marée basse.
Mais maintenant, il n'y a guère plus que la mouette pour porter
les messages.
....C'est ainsi que la colline se fit île....
Ertiamel
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /169 189
Apprendre à prendre du recul
Apprendre à se servir de son intelligence
Ici, le Chat ne pète pas.
62
Dans mille ans, où seront nos fanatismes!!
Ils peuvent être quelques dizaines, ou quelques milliers, voire des millions
comme ceux qui acclamèrent Khomeini à son arrivée en Iran, le poing levé,
scandant quelques mots hurlés.
Leur cause leur semble honorable, mais ont-ils pris du recul par rapport à leur
fanatisme, à leur embrigadement!? Non ! Ils savent seulement qu'à plusieurs
ils feront plus de bruit voire plus de violence, souvent au-delà de la démocra-
tie qu'ils supportent mal. Pour certains, ils se feront tués quand "on" le leur
dira, ils tueront quand "on" le leur dira.
Où sera-t-il ce fanatisme dans mille ans!?
Combien parmi eux peuvent penser qu'ils suivent un mouvement dont ils ne
perçoivent pas l'objectif, qu'ils suivent parce qu'il est trop difficile de faire au-
trement ?
Je préfère mes erreurs à celles des algorithmies probabilistes.
62
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /170 189
Le comportement grégaire a sa logique. Il est plus sécurisant de suivre le
grand nombre, en pensant que l'autre a sans doute une raison ou a trouvé une
moralité à son comportement.
Et lorsque la meute s'est constituée, il est déjà trop tard pour inciter l'individu
à se situer dans son adhésion.
Que penser de ceux qui prennent Trump pour leur dieu, qui admettent que
son Vice-Président Mike Pence est un créationniste évangélique , qu'un Etats-
63
unien sur six pense que la Terre est plate. On peut admettre qu'Aristote et
Saint Agustin après lui considèrent que le Soleil tourne autour de la Terre,
mais, à leur décharge, ils n'avaient pas le recul nécessaire pour mieux com-
prendre l'Univers.
Heureusement le Chanoine George Lemaitre, qui a proposé la théorie du Big-
Bang, a su convaincre le Pape que la Science n'avait rien à faire avec la reli-
gion. Il aura fallu presque 2000 ans pour que certains hommes accepte de sé-
parer la croyance de la science. Pour les autres, (hindous ou musulmans en
particulier), la poétique religieuse est supérieure à la démocratie.
On arrête tout, on réfléchit ?
L'homme est conditionné par un ensemble de facteurs. Le premier d'entre eux
est la naissance. Depuis la fusion de ses deux parents, hasard ou nécessité, il
reçoit des stimuli. Le foetus se développe avec les mouvements du corps ma-
ternel, avec ses tressaillements, avec ses nourritures, avec ses bruits. Dès avant
sa naissance, il a déjà construit une identité physique et psychique avec la-
quelle il doit réagir. Fait-il froid, fait-il chaud, est-il cajolé, est-il seul entre ses
repas, vit-il au calme ou dans une atmosphère de violence, de bonheur ou de
chagrin!? Le nourrisson est un être dépendant. il construira peu à peu ses
propres référence à partir de son environnement familial puis scolaire et socié-
tal. Le nourrisson prend son premier bain de culture avec sa famille, avec sa
nounou, qui lui apprend ses premiers mots, ses premiers repères, ses pre-
mières sensations de couleurs, de formes, de sons, d'odeurs, de goût, de
mouvement, de toucher ... Puis, l'école lui apprend à lire, à écouter, à com
64 -
prendre les interactions sociales. Il découvre l'histoire de l'Univers, de la Terre
et des hommes. Quand il dessine, il appréhende la peinture, la sculpture.
Quand il écrit, il peut imiter les poètes... Plus il développe son écoute du
monde culturel, plus il relativise sa pensée, plus il peut prendre du recul et se
Sur l'échiquier politique, les évangéliques représentent 20% des Etats-Uniens. Bon nombre
63
haïssent les démocrates, la littérature enfantine indépendante, les homosexuels et l'IVG. Il y
aurait une comparaison à faire avec les islamistes...
Les assistantes maternelles ont en général de la bonne volonté, encore faut-il qu'elles (ils)
64
soient bien formée et puissent exercer leur charge dans de bonnes conditions. Les crêches ont
une importance considérable dans la construction physique, mentale, sociale et morale des en-
fants.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /171 189
servir de son intelligence. Un homme ou une femme de grande culture ne sau-
raient être doctrinaires.
Qui apprendra à l'enfant comment regarder les étoiles? Naguère, c'était les
mages. Aujourd'hui, les philosophes et les astronomes doivent le dire aux
parents, aux assistantes maternelles et aux enseignants.
Si personne n'apprend au jeune à prendre du recul face aux mouvements so-
ciaux, face aux radicalismes, il cherchera la sécurité de son groupe social, et
les contraintes de la vie courante le maintiendront dans son univers de pensée,
dans son réseau informationnel. Le premier objectif de l'école devrait être
d'aider les élèves à apprendre à apprendre, à ne pas avoir peur des décou-
vertes, à construire un raisonnement en toute indépendance, à trouver un sens
à ce qu'ils font, en dehors de tout atavisme familial ou social.
De la maternelle au bac, année par année, le jeune devrait entendre puis
comprendre la nécessité de voir large, d'assumer sa place dans la société. L'é-
ducation civique n'est pas qu'un apprentissage passif des règles de la vie en
collectivité, c'est aussi la responsabilisation, la découverte de la dignité. C'est
aussi le refus du bouc émissaire, de la victimisation qui paralyse, le refus de la
démocratie de l'émotion, du jugement hâtif.
Bien sûr, il y a une part d'inné dans le caractère. S'il n'y avait rien d'inné, il ne
pourrait y avoir évolution du vivant. L'homme ne se construit pas à partir d'une
page blanche mais à partir d'un capital génétique.
Pour certains, l'environnement naturel et social est très coercitif, un atavisme
lourd issu de plusieurs générations. Pour d'autres, le cadre est construit, lo-
gique et cohérent, on ne le remet pas en cause. Pour d'autres encore, le cadre
est au contraire ouvert. L'enfant paraît, il est comme une éponge, il apprend
avec son intelligence, sa capacité d'analyse, sa recherche de sécurité ou au
contraire son envie d'aventures, son exubérance ou sa timidité, son envie de
dominer, de sécurité ou d'indépendance et peu à peu, il construit son raison-
nement, son attitude sociale.
Aux dires des instituteurs de maternelle, l'univers familial est prépondérant
dans l'épanouissement physique et intellectuel de l'enfant. "Tout se joue avant
6 ans" a écrit le psychologue Dodson, mais, pour Françoise Dolto, «!On a dit
tout se joue avant 6 ans, on a ensuite circonscrit les trois premières années
comme les années décisives de la formation de la personnalité. Tout se joue
peut-être en huit jours, les premiers jours de la vie. Le temps des premières
empreintes indélébiles, des blessures cicatricielles, se réduirait à la période
périnatale!».
J'oserais aller plus loin, tout se joue aussi dans le vécu propre des parents,
avant même la conception. Il s'agit d'une affaire de société, d'une démarche
globale où peu à peu émerge la conscience collective, le raisonnement libre
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /172 189
plus que la démocratie de l'émotion. Les gynécologues et les sage-femmes
ont aussi un rôle éducatif.
Commençons par l'éducation des parents qui vont, dans la solitude familiale,
gérer l'éveil de leur enfant. Ce sont eux qui les premiers ont la responsabilité
d'expliquer à quoi servent les choses. Si eux-mêmes ne le savent pas,
comment pourraient-ils transmettre les savoirs de base. L'éducation ne saurait
se faire par la violence ou par la perversité. Apprenons aux parents à dire : "je
ne sais pas, mais je vais essayer de trouver une réponse". Apprenons aux pa-
rents à chercher des institutions où l'enfant apprendra à apprendre, à décou-
vrir, à tolérer, à prendre du recul, à trouver à quoi servent les choses, à se ser-
vir de son intelligence. Le tandem parent-enseignant doit fonctionner dès la
maternelle. Encore faut-il que l'enseignant soit bien formé et bien considéré.
L'essentiel du développement de l'intelligence passe par le texte écrit et non
par les écrans. L'enfant peut savoir lire dès l'âge de 4 ans. Le cerveau qui lit
est actif alors qu'il est passif et hypnotisé devant un écran (ou "débilisé" par
les textos). Dès la maternelle, il est essentiel de miser sur l'apprentissage de la
lecture et du plaisir de la lecture pour susciter chez l'enfant l'envie de savoir
par le livre.
La deuxième priorité dans les maternelles est d'enseigner la dignité, un
concept essentiel pour la socialisation qui aujourd'hui est si mal partagée.
De quoi est faite la culture
La culture suppose que l'homme a du temps, qu'il n'est pas en économie de
survie, qu'il dispose du superflu et de la liberté de penser. Encore faut-il qu'il
soit ouvert à la diversité culturelle, qu'il échappe à l'enfermement de ses ré-
seaux sociaux.
Il existe encore trop d'endroits où l'on fait travailler les enfants, où les condi-
tions de travail s'apparentent à de l'esclavage. Comment ces enfants, ces
hommes et ces femmes trouveraient le temps et l'envie de connaître le monde,
ses beautés et sa poésie ?
Dans l'école de Jules Ferry, il y avait le 1er prix de récitation, le 1er prix de
dessin, le 1er prix de lecture... Cet alphabétisation fut le premier pas vers la
culture pour tous.
Aujourd'hui, la culture est tiraillée entre l'académisme et les méga-spectacles,
entre le tourisme de masse passif et la découverte active du monde, entre la
vision compulsive et égoïste de vidéos ou l'étroite culture claniste et la pra-
tique active d'un art, de la philosophie, de l'écriture ou de la musique, ou de
la découverte de la culture des autres.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /173 189
On peut vivre de façon étroite avec un vocabulaire limité à 300 mots, mais on
peut aussi s'intéresser à la vie, prendre du recul et exercer son intelligence
avec un vocabulaire de 3000 mots, voire 30!000 mots.
La culture amènera l'homme à la conscience politique.
S'il est intelligent, il sera entre deux schémas de pensée :
Personnellement, j'approuve la prise de recul de Montesquieu et je souhaite-
rais que nos politiques prêchent sa hauteur de vue.
Mai 1968 a plusieurs faces
Pour certains, mai 68, c'est la sortie du carcan traditionnel : "Il est interdit d'in-
terdire". Le refus des limites pourrait être valable avec des hommes respon-
sables. Cela n'a pas été le cas. L'école n'était plus sacrée, les exemples
n'étaient plus des exemples, les idoles et l'histoire pouvaient être revisités, la
famille n'était plus une nécessité. Pour d'autres, mai 68, c'est la montée de
l'angoisse des nantis, l'incitation à fabriquer des oeillères et des murs, au
propre et au figuré. Ces murs cultivent le communautarisme et empêchent de
voir loin, de prendre du recul. Cette angoisse mène au renouveau religieux, à
la phobie du communisme et de ses avatars, à la phobie du désordre...
Mais ceci est le revers toxique de la médaille. L'autre face est une nouvelle
page blanche où l'homme peut construire de nouveaux repères, de nouvelles
Un discours, plutôt primaire :
Si je savais quelque chose qui fût utile à l'humanité, et qui fût préjudiciable à
ma civilisation, je la rejetterais de mon esprit.
Si je savais quelque chose utile à ma civilisation, et qui ne le fût pas à mon
pays, je chercheraisà l'oublier
Si je savais quelque chose utile à ma patrie et qui fût préjudiciable à ma fa-
mille, je la rejetterais comme un crime.
En d'autres termes, la préférence nationale :
Si on touche à ma fille...
Si on touche à mon quartier...
Si les immigrés ...
Et celui de Montesquieu :
"Si je savais quelque chose qui me fût utile et qui fût préjudiciable à ma famille, je
la rejetterais de mon esprit.
Si je savais quelque chose utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je cher-
cherais à l'oublier.
Si je savais quelque chose utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l'Europe, ou
bien qui fût utile à l'Europe et préjudiciable au genre humain, je la regarderais
comme un crime."
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /174 189
visions de la société, la porte ouverte à la prise de recul, à la recherche du
pourquoi des choses (expliquer n'est cependant pas cautionner ou absoudre),
à la construction de l'éthique, à la possibilité de prendre du recul, de penser
par soi-même, d'utiliser son intelligence, de détruire les murs imbéciles.
Exemples d'oeillères
Le petit actionnaire ne participe guère aux assemblées générales. Il suit un
mouvement organisé par les investisseurs institutionnels, eux-mêmes condi-
tionné par le ou les actionnaires de référence. En gros : plus on a de patri-
moine, plus on a de pouvoir, plus le rendement des actifs que l'on détient
est élevé (Piketti). Le petit actionnaire, qui va gagner quelques euros chaque
année , se sécurise en constatant la richesse du gros actionnaire.
65
Aux USA, les étudiants américains en science économique appartiennent
majoritairement à l'élite (les parents sont thésards ou masters). On peut
penser qu'ils n'ont pas le recul nécessaire pour être attentifs à l'ensemble
des hommes et des femmes de leur pays.
Un autre exemple (Alternatives économiques du 07/02/2024)
Une expérimentation sur plusieurs milliers d’hectares à Chizé (Deux-Sèvres) avec 130agriculteurs a
démontré qu’une réduction de 50% des pesticidesce qui est l’objectif d’Ecophyto– a permis d’obtenir
la même productivité. La rentabilité a augmenté de 200euros par hectare et par an grâce au moindre
coût des intrants.
Pour une ferme dune centaine d’hectares en céréales, ce qui est courant, cela signifie un gain de revenu
de 20000euros par an. Cest bien plus efficace que le renoncement à la taxe sur le gazole non
routier(GNR) qui va ramener 400euros par an en moyenne, ou que les 150millions d’euros de subven-
tions distribués à 147000éleveurs de brebis et de vaches, soit 1000euros par an. Ce nest même pas la
moitié d’un mois de salaire chargé d’un salarié agricole!
Sans parler des choix d'agriculture imposés par les lobbies, médias,
scientifiques de plateaux et de réseaux, camelots politiciens.
L'analyse hâtive quand on condamne les immigrés sans considérer que les
gouvernements ont laissé depuis 50 ans pourrir leur situation dans un cadre
de vie empêchant leur bonne intégration, c'est un jugement hâtif et un
manque de recul.
La solution primaire de la prison, la pire des oeillères, comme fabrique de
délinquants.
Des oeillères encore quand l'homme cherche les boucs émissaires ou se vic-
timise au lieu d'assumer ses responsabilités ou de prendre de la hauteur.
Face au futur
Dans 20 ans, l'intelligence artificielle (algorithmie probabiliste) pourrait être
remplacée par la conscience artificielle!: une machine pourra prétendre qu'elle
Les dividendes sont imposables et ils doivent être diminués de l'inflation.
65
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /175 189
comprend les choses et les discours comme nous-mêmes les comprenons,
qu'elle peut s'astreindre à une morale et qu'elle est capable de construire de
nouveaux mondes conceptuels.
Pour l'instant, l'algorithmie probabiliste ne sait que reconnaître des schémas et
des tendances. Cela n'est pas de l'intelligence. L'intelligence n'est pas ce que
l'on sait, mais ce que l'on fait quand on ne sait pas.
Que se passera-t-il le jour où les machines créatives pourront créer des mondes conceptuels au-
delà de la pensée humaine?
Un missionnaire du moyen âge raconte qu'il avait trouvé .
Rappelons-nous de Bombelli qui, osant s'intéresser à la racine carrée des nombres né-
gatifs, ouvrit cet énorme chantier mathématique des nombres imaginaires et leur cor-
tège d'applications en physique. Ce Bombelli fait penser au mot "bombelliation" utilisé
par Mickaël Delaunay pour ouvrir encore d'autres portes. Par exemple, pour créer une
nouvelle structure algébrique et les opérations que l'on peut faire sur elle… ou pour
créer une catégorie de concepts concrets ou abstraits sur laquelle pourraient s'appli-
quer des lois physiques ou philosophiques. Si nous, les hommes, pourrions avoir des dif-
ficultés à manier ces ensembles, il se pourrait que des GravMachines jonglent jusqu'à
découvrir des méta-univers ou des applications concrètes : la santé, le futur, nos capaci-
tés cognitives, la guerre ou la métaphysique…
(Extrait de http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Barreau/Barreau2023.pdf)
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /176 189
Les hommes seront partagés entre ceux qui pensent qu'une conscience artifi-
cielle est une dangereuse atteinte à notre humanité et ceux qui pensent
qu'une conscience artificielle peut être utile à la paix dans le monde et à la
constitution d'un cadre de vie de qualité pour tous. Quel que soit leur avis, ils
devront vivre avec ce nouvel outil bien plus puissant que nos cerveaux hu-
mains mais tout aussi faillible. La question sera alors!: "Comment apprendre à
une conscience artificielle à prendre du recul!?".
Démocratie de l'émotion
Avec l'ère Bolloré où seule l'information profitable compte, celle qui happe et
fidélise les lecteurs par les sujets émotionnels, avec l'ère des réseaux qui en-
ferment dans l'immédiateté et dans le lapidaire, vient un glissement des es-
prits vers l'indignation émotionnelle, vers le jugement hâtif, vers le bouc émis-
saire, vers l'inversion des responsabilités, où l'on est submergé par la consé-
quence au lieu de chercher la cause et où l'on chasse en meute. J'appellerais
cela la "capitolisation", en référence au trumpisme et au Q-anon. Je pourrais
aussi l'appeler la "victimite". C'est la douleur réelle ou simulée des victimes et
la compassion qui veulent remplacer la justice. La judiciarisation croissante de
la société est un signe de faiblesse, de dé-responsabillisation.
Ajoutons la fausse information qui, parce que nous ne savons pas prendre du
recul, se propage plus vite que la vraie information, et qui provoque l'émotion
et déclenche le lynchage.
Plus subtil, c'est l'agresseur qui s'érige en victime, comme on le voit trop
souvent dans les cours de justice, qu'elle soit familiale, locale, nationale ou
internationale, où la loi du plus fort est toujours la meilleure.
Inconsciemment, chacun s'enferme dans son schéma de pensée et "n'en veut
pas démordre". Cette expression populaire ramène l'homme à son animalité,
comme le chien à qui l'on ne peut pas faire lâcher sa proie. C'est la posture de
celui qui ne peut avoir qu'un seul regard. Le proverbe africain peut combattre
cet aveuglement!: "Si tu vois tout en gris, déplace l'éléphant". Ce proverbe
s'adresse sans doute à ceux qui sont un peu déprimés, qui doivent com-
prendre que c'est à eux de se re-motiver. Pour moi, le proverbe dit aussi qu'il
faut faire un effort pour voir au-delà de la vision banale des choses, un peu
comme dans le mythe de la Caverne de Platon.
De quoi sont faites les religions ?
Les religions ne peuvent pas avoir de recul par rapport à leur prémices. Ce se-
rait apostasie. Elles ne peuvent que se développer dans leur poétique dogma-
tique. 1905 fut une bonne année. "In God we trust" reste un slogan étrange.
Ne parlons pas de la charia.
Il est utopique de rendre les rois philosophes et les philosophes rois. Les rois
ne prendront jamais assez de recul et les philosophes ne sauront pas gouver-
ner. Encore aujourd'hui, comme du temps des rois, les puissants savent s'asso-
cier aux religions.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /177 189
Face à l'endoctrinement, l'intelligence du plus grand nombre peut instiller le
doute. Encore faut-il trouver tous ceux qui savent se méfier des doctrines, qui
savent prendre le recul nécessaire pour relativiser les affirmations péremp-
toires et identifier les "joueurs de bonneteau". Sachons former des citoyens
libres, émancipés et conscients et non les conformer à des dogmes religieux,
politiques, idéologiques ou économico-politiques. Les vaches sacrées ou l'im-
maculée conception ont cependant de beaux jours à vivre tant l'homme a be-
soin des rites et des symboles de son atavisme. Les religions dites révélées ont
construit des civilisations qui restent vivables, pérennes et néanmoins néces-
saires et pleines de richesses. Elles participent à l'équilibre de la société. Tant
qu'elles respectent la dignité humaine, les religions et leurs adeptes sont res-
pectables, face au mystère de la vie. Pour certains, elles ont au moins une va-
leur poétique ou une réponse métaphysique. Les jeunes, face à un monde de
plus en plus incertain, voire virtuel, à la violence endémique, dans leur an-
goisse existentielle, se tournent de plus en plus vers la religion catholique
66
pour ceux qui se sentent dans cette tradition, ou musulmane pour ceux qui ne
réussissent pas leur intégration occidentale. Quand on ne comprend pas, on se
tourne vers le divin!!
La séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905 est une bonne prise de recul. Les
pays où la liberté de croyance est contrainte, officiellement ou socialement,
sont indignes. L'un des principaux attributs d'une secte est qu'il est très diffi-
cile d'en sortir.
Voici un exemple de prise de recul religieuse où le divin n'apparaît pas.
De Siddhārtha Gautama au Bouddha
(Alternatives économiques 20/01/23 Antoine Jourdan)
Bien que les dates de sa naissance et de son décès ne soient pas connues avec exactitude, on
estime que Siddhārtha Gautama, le bouddha historique, aurait vécu entre les VIe et
Vesiècles avant notre ère. Né à Lumbinî, dans l’actuel Népal, fils de roi, il décide, à 29ans,
de quitter le faste de la vie de palais et de découvrir le monde par lui-même.
Selon la légende, le futur Bouddha commence alors une vie de sobriété choisie, faite de mé-
ditation et de pratiques austères. C’est à 35ans que Siddhārtha Gautama aurait atteint
l’«éveil», au pied d’un figuier de Bodhgayā, devenu aujourd’hui lun des «quatre lieux
saints du bouddhisme», situé dans la province du Bihar, en Inde. Il devient alors le Boud-
dha– l’«éveillé»– et présente rapidement les conclusions de sa méditation lors de son
premier cours, intitulé la «mise en mouvement de la roue du Dharma».
Réunissant cinq disciples dans le parc des daims de Sārnāth, il leur enseigne les «quatre
nobles vérités» qui constituent le socle de lenseignement bouddhiste. Dabord, la vie est
souffrance car l’on ne peut échapper à la maladie, à la vieillesse, à la mort. Ensuite, cette
souffrance est intimement liée à la «soif» des hommes, à un sentiment d’incomplétude qui
se traduit par le désir, lavidité ou encore par la haine. Pour autant, il existe un moyen
d’échapper à la souffrance sur la Terre. Ce moyen est de suivre le «chemin octuple» (ou
«sentier octuple») qui permet d’atteindre l’«éveil», la voie progressive vers l’ultime réali-
sation de soi.
Le nombre de baptêmes a doublé entre 2024 et 2025
66
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /178 189
Ce «sentier octuple» est composé de huit préceptes qui doivent guider chacun dans son
chemin vers le juste. Les deux premiers préceptes permettent daccéder à la sagesse: la «vue
juste» demande au disciple de déceler la vraie nature des choses sous les illusions liées au
désir; tandis que les «pensées justes» sont pleines de compassion et de bienveillance, dé-
nuées de cruauté, de colère ou de jalousie.
Les trois préceptes suivants donnent des indications qui doivent guider le comportement: la
«parole juste» interdit le mensonge et la calomnie, l’«action juste» interdit le meurtre et le
vol, tandis que les «moyens d’existence justes» imposent de gagner sa vie de façon éthique,
sans recours à des activités illégales ou méprisables.
Enfin, les trois derniers préceptes permettent d’atteindre la vertu: l’ «effort juste» en-
seigne qu’il faut travailler sur soi pour s’améliorer sans agir égoïstement pour obtenir des
résultats pour soi-même; l’«attention juste» prescrit d’être pleinement vigilant et
conscient dans l’instant présent, sans se perdre dans les rêveries du passé ou dans l’inquié-
tude et l’anticipation du futur; et la «ditation juste» requiert labandon des trois poi-
sons de lesprit que sont l’ignorance, lavidité et la colère.
La nécessité et la toxicité du rite
67
Au delà des religions, qui sont la porte de l'au-delà, mais qui sont sources des
rites, il faut admettre les coutumes locales qui échappent au rationnel. Elles
forment une poétique forte dont la société se nourrit et produit de nombreux
paradoxes (processions, commémorations...). Ces paradoxes forment la diver-
sité des collectivités humaines et donc la richesse de l'humanité. Prendre du
recul à cet endroit ne saurait conduire à éradiquer toute coutume au profit
d'une collectivité unique, inodore, incolore et sans saveur ou d'un totalitarisme
suicidaire. Prendre du recul serait au contraire de favoriser la créativité du vivre
ensemble : conserver et faire évoluer les rituels, faire du ramdam, du buzz, des
agapes, des bacchanales, des carnavals, du barnum, du charivari, du cham-
bard, du tohu-bohu, du hourvari... pourvu que nul n'en soit entaché dans sa
dignité, tout le contraire des hurleurs wokistes. Face au wokisme imbécile , la
68
société s'organise , en espérant que la Justice marginalise les procéduriers
69
qui lui font perdre son temps et comprenne la toxicité du genre soit-disant
ressenti , nouveau mal du siècle.
70
La Nation doit "être visible" par tous, au travers de ses rites : fêtes nationales, élections,
actes d'Etat civil, Service civil, parrainage républicain, reconnaissances familiales, confé-
rences de presse, sites de référence, conseils municipal, départemental, régional, agenda
parlementaire et ministériel, déclarations fiscales, vacances scolaires, journées portes ou-
Pour plus de réflexions sur le rite, voir page 19 de http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/
67
Livres/Philo/Peregrinages_philosophiques-2022.epub
Un régal : https://www.google.fr/url?
68
sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwikjM76sJmEAxXo-
R6QEHSOPB_wQwqsBegQIDRAE&url=https%3A%2F%2Fwww.koreus.com%2Fvideo%2Fsalut-la-
gang.html&usg=AOvVaw0QI646VHDLTcd0NP8XS8G8&opi=89978449
https://decolonialisme.fr/en-finir-avec-le-wokisme-chronique-de-la-contre-offensive-anglo
69 -
saxonne/
"Questionnements de genre - Aude Mirkovic (Artege)
70
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /179 189
vertes, magasines officiels… Plusieurs fois dans l'année, chaque citoyen devrait "voir" son
appartenance à la nation et reconnaître son cadre de vie et ceux qui le bâtissent et l'entre-
tiennent.
(Extrait de Pérégrinages citoyens )
71
Un autre facteur bridant la réflexion est l'habituation. Dans les pays totalitaires,
les citoyens ont été contraints aux habitudes résignées qui leur évite les
conflits avec l'administration coercitive, une espèce de syndrome de Stockolm
où l'on voit les victimes d'enlèvement épouser les idées de leur ravisseur.
De quoi sont faites les politiques
L'embrigadement politique (quand il n'est pas religieux) est plus ou moins sub-
til. Les programmes scolaires qui occultent ou célèbrent, les incitations aux
dénonciations calomnieuses, les programmes TV sans consistance et mainte-
nant les réseaux envahis par des comptes générés par des robots ou par des
bobards, sont d'autant plus contagieux qu'ils sont surprenants (plus c'est gros,
plus ça passe!!), tels les calomnies ou les faux événements. Il est étonnant que
leurs auteurs de ces méchancetés n'aient pas conscience de leur indignité.
peut-être que cela commence à l'école qui ferme les yeux sur le harcèlement,
laissant à penser que le harceleur n'est pas fautif et qu'il peut ainsi nuire pour
"accroître son domaine existentiel". ("Plus je gêne, plus j'existe").
Il reste des hommes politiques dignes, mais la discipline de parti, les alliances
d'opportunisme électoral et autres bousculades médiatiques ne sont pas pro-
pices à prendre du recul. La politique a ses limites. Globalement, il y a des
démocraties vivables et d'autres qui n'en n'ont que le nom. Quant aux dicta-
teurs ou aux marionnettes, ce sont des malades, paranoïaques pour les pre-
miers, idiots utiles pour les seconds. La force du droit ne suffit pas à les conte-
nir.
On voit mal comment contenir Poutine, Netanyahou et ses extrémistes reli-
gieux, les chefs des Talibans ou du Hamas, la junte birmane, la dynastie Kim
Jong-Un ou celle de Nazarbaïev au Kazakhstan, ou celle de l'Azerbaïdjan, de la
Biélorussie ou celles d'Afrique, sans parler de Xi Jing Pin et son parti unique,
de Victor Orban en Hongrie et des ultraconservateurs polonais et leurs me-
sures liberticides, de Modi le fanatique hindou, sans parler de Bolsonaro, de
Trump.
Sur 7 milliards d'individus sur terre, avec un ego dérangé sur 10 000, ce sont
potentiellement 700!000 dirigeants en puissance qui peuvent massacrer leurs
opposants un par un ou par milliers. Le bonheur du monde est une tâche co-
lossale pour tous ceux qui savent prendre du recul et contrer les anti-huma-
nistes.
Les dictateurs ont su recruter leurs affidés. C'est à nous de tarir leur vivier. L'é-
ducation civique et sociale dès le plus jeune âge (crêches), la lutte contre la
corruption, la critique du discours et des média, la transparence politique et
financière, la détection des collusions entre banditisme et pouvoir, l'efficacité
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Citoyen/Peregrinages-citoyens.html
71
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /180 189
de la Justice et des gardiens de la Paix (qui sont devenus des forces de l'ordre,
des robocops), l'humanisme des militaires (gaz sarin, mines antipersonnel,...),
la lutte contre l'irrationalité des religieux et autres fanatiques.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /181 189
En 2023
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /182 189
Pensée logique
Question :
Pourquoi y a-t-il de la neige en hiver?
Réponse:
Parce qu'en été, ça fondrait beaucoup trop vite à cause de la chaleur.
(d'aps Schley)
Construire un raisonnement logique n'est pas inné et nécessite une démarche
volontaire. Comment, par exemple, amener un élève à s'intéresser à la dé-
monstration du théorème de Thalès!? Inutile, dirait Hassan al-Bannâ, fondateur
des Frères musulmans, qui n'admettait, parmi les vérités découvertes par les
sciences positives, que celles qu'il considérait conformes aux préceptes du Co-
ran.
Inutile diraient Sol Garfunkel et David Mumford, éminents (!) mathématiciens
américains, qui ne pensent pas qu'il soit utile de savoir résoudre une équation
du second degré ou de savoir ce qu'est un nombre complexe.
Il ne serait donc pas plus utile de connaître un poème de Rimbaud ou l'avan-
tage des monuments gothiques sur les monuments romans. La liste pourrait
être longue... Concernant les mathématiques, comprendre les nombres com-
plexes à 17 ans est un prodige de la pensée, possible grâce à un enseigne-
ment progressif de l'abstraction.
La capacité d'abstraction est un fondement de la pensée humaine et il faudrait
la remettre en cause, au nom de la seule mathématique utile, sectorisée
comme chez les fourmis ? Quelle étroitesse d'esprit ! N'apprendre que ce qui
est utile à la civilisation (américaine, musulmane ou animiste) d'aujourd'hui,
sans penser à ce qu'elle sera dans cent ans, sans penser à la créativité des fu-
tures générations !
Pourquoi ne pas aussi remettre en cause la géométrie ou du moins la canton-
ner aux seules connaissances nécessaires pour monter un meuble
préfabriqué ? Faut-il rappeler que la démonstration géométrique est une voie
royale pour l'apprentissage du raisonnement logique ?
Quant au latin, que ces messieurs rangent avec mépris au rayon des traditiona-
listes, il n'est sans doute pas nécessaire de le parler pour être bon citoyen,
mais il est utile d'en connaître les éléments linguistiques qui ont structuré la
société occidentale afin de les comparer aux autres approches historiques et
contemporaines. Le caractère cyrillique, l'idéogramme, l'écriture arabe sont,
comme le latin et le grec, des référentiels pour notre futur et pour notre diver-
sité. Doutons qu'un jour la terre entière parle l'anglais et que chacun soit dé-
terminé à sa naissance par un progrès de science fiction !
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /183 189
Au XVIIIe siècle, cela s'appelait déjà "Leçons de choses". On apprenait
souvent sans comprendre. Aujourd'hui, il faudrait apprendre le pourquoi des
choses, mais la science est devenue très vaste et très profonde, incompatible
avec les réseaux sociaux, qui n'échangent qu'une phrase à la fois, souvent fal-
lacieuse et dont l'immédiateté inhibe l'intelligence... Ce n'est pas la voie pour
apprendre à se servir de son intelligence.
Et puis, la société est trop compliquée, même pour les gouvernants les plus
intelligents, qui se font déborder par les lobbies et envahir par les courants
politiques.
De quoi sont faites les guerres
C'est après le désastre, commencé par la "fleur au fusil" et continué dans le
bourbier de Verdun, que l'on prend du recul, en disant "Plus jamais ça!!". Ces
résolutions sont plus ou moins vite oubliées. Les va-t-guerre et les profiteurs
de guerre prennent les pacifistes pour des couards et le droit international n'a
pas encore les garde-fous suffisants pour retenir les uns et les autres qui s'ac-
cusent mutuellement de folie. Le droit international reste encore le seul moyen
de peser sur eux. Encore faut-il que la pression sociale soit forte, qu'une majo-
rité d'hommes et de femmes aient le recul nécessaire pour faire comprendre
au monde qu'il n'y a jamais de gagnant dans l'action violente.
Les fabricants et les trafiquants d'armes ont-ils une conscience, savent-ils
prendre du recul. Ils peuvent toujours dire!: "Si je ne le fais pas moi, d'autres
le feront à ma place." ou "L'auto-défense se justifie." ou "C'est le job des po-
litiques." En fait ils font partie d'un réseau neuronal collectif, avec des sy-
napses plus ou moins solides. Dans une chaîne, il suffit d'un maillon faible
pour que la chaîne soit faible. Dans un réseau, les chaînes fortes compensent
les chaînes faibles. C'est le Jeu de la vie . Il est cyclique. De temps en temps
72
les méchants gagnent, puis c'est au tour des gentils. C'est aussi comme le jeu
de Go. Il suffit d'un grain de sable et tout bascule.
Nous avons dépassé l'ère des guerriers primaires manipulés par des puissants
sans scrupules. Aujourd'hui, nous sommes prisonniers d'un système de plus en
plus prégnant et complexe, impuissants devant la dramatique absurdité d'Is-
raël et du Hamas, où devant "l'opération spéciale" en Ukraine, ou avec les
confrontations ethniques en Inde ou en Afrique... Où est la solution ? Dans le
jeu de la vie, peut-être y aura-t-il un jour des millions d'hommes et de femmes
qui se lèveront pour enseigner l'absurdité de la guerre et qu'il vaut mieux pré-
venir que guérir, comprendre pour mieux prédire et faire la guerre à l'inconsé-
quence, cette seule guerre intelligente, avec tous les problèmes éthiques
qu'elle devrait supporter car la fin ne saurait justifier les moyens.
https://www.paperblog.fr/7113233/le-jeu-de-la-vie-john-horton-conway-1937-/
72
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /184 189
Jusqu'ici, les dirigeants du monde n'ont pas hésité à gaspiller le temps, l'énergie et l'intelli-
gence de leurs peuples pour perfectionner les armes atomiques et biologiques. Il ne semblent
guère qu'ils aient jamais eu l'idée d'utiliser les ressources de la science appliquée pour apai-
ser la faim chez ceux qui en souffrent et supprimer ainsi les principales causes de guerre.
(https://www.unesco.org/fr/articles/une-double-crise-0)
La guerre, cette dépense catastrophique (Georges Bataille) de l'énergie du superflu des so-
ciétés humaines, c'est la victoire des imbéciles.
Les guerres de l'eau sont un scénario plausible, depuis les querelles indivi-
duelles de voisinage jusqu'aux querelles régionales sur les nappes phréatiques
et sur les fleuves hydronucléaires (refroidissement des centrales). Déjà, il faut
trouver un statut juridique international aux icebergs et aux nuages ...
73
De quoi sont faites les choses.
Il y a les choses dures et les choses molles, les sciences humaines, les sciences
économiques, les sciences théoriques, les sciences de la Terre (et de l'Univers)
et les sciences en devenir. Il y a aussi l'absence de science, l'ignorance.
Il y a tellement de choses à savoir pour prendre du recul :
74
Il y a aussi à apprendre les choses de la vie, comment elle fonctionne :
Prendre du recul par rapport au système financier des droits télévisés : Par
exemple, seul 6% du budget de la FFF va aux clubs amateurs qui sont le vivier
des joueurs pro et un instrument social fondamental, qui, faute de finance-
Apprendre à lire la musique en même temps que l’on apprend à lire le français,
Apprendre comment fonctionne la société
Apprendre les raisons qui ont conduit aux règles communes,
Apprendre le respect de soi (lutte contre les addictions,..) et le respect des autres
Apprendre la dignité,… et l’indignité de la violence à tous les niveaux,
Apprendre à apprendre, dans les deux sens de l’expression :
apprendre les mécanismes qui permettent d’acquérir le savoir
apprendre aux autres ce que l’on sait déjà,
Apprendre à prendre du recul
Apprendre à être parents,
Apprendre à écouter
Apprendre à détecter et à bloquer les fausses informations,
Apprendre le respect de la Planète
Apprendre la diversité du monde :
la bio-diversité,
la diversité des climats et des cultures,
la diversité des arts,
la diversité des philosophies et de l’homme face à la mort,
Apprendre la tolérance et la bienveillance, et la concertation plus que l'affrontement
Apprendre l’Univers et notre place dans celui-ci
Apprendre à lire les étoiles…
https://lejournal.cnrs.fr/sites/default/files/numeros_papier/jdc314_web.pdf
73
http://ertia2.free.fr/Niveau2/Nouvelles/Livres/Citoyen/Peregrinages-citoyens.epub
74
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /185 189
ment, ne joue pas son rôle dans l'éducation sociale des gamins et de de leur
parents dont les comportement sur les terrains et au bord des terrains sont ir-
responsables et inconséquents.
Le mécanisme de l'addiction : Le montant des paris sportifs a été multiplié par
20 entre 2010 et 2022. Le parieur a peut-être compris qu'au bout du compte, il
perdra son argent, mais il considère que parier, c'est plus que gagner, ou que
gagner une fois c'est plus que perdre 20 fois, ou qu'il vit plus fort le sport ob-
jet de ses paris. C'est ainsi qu'il devient dépendant. L'addiction empêche la
prise de recul. Le tabac, l'alcool, les opioïdes médicaux (USA), les endorphines
du sportif, la surbouffe, le mysticisme, le sexe, l'argent, les jeux vidéo... sont
autant de murs contre l'intelligence. Le cerveau bugue sur le circuit de la ré-
compense. Peut-être sera-t-il un jour possible de leurrer le cerveau pour stop-
per l'addiction, comme on peut le leurrer pour supprimer la douleur d'un bras
sectionné!?
Comme l'addiction aux réseaux sociaux, l'addiction à un soi-disant confident
nous guette. Pour certains, cette "petit voix" pourra les conduire à des com-
portements irrationnels, en particulier l'angoisse. L'IA manipule sans avoir
conscience de sa manipulation (elle ne comprend rien de ce qu'elle peut ra-
conte elle-même) et le concepteur de l'IA pourra ne pas s'en rendre compte.
L'IA est un outil fabuleux, pour le meilleur comme pour le pire.
De quoi suis-je fait"?!
La réflexion s'apprend. Elle n'est pas innée. Étymologiquement, la réflexion
implique la reconnaissance de soi, la prise de conscience de nos propres per-
ceptions, de nos propres sensations. Entre nos sens et notre conscience, il y a
notre "Je" et notre capacité de nommer les choses, de nous situer en tant que
être vivant dans la réalité. Dans le concret, Elisabeth Nuyts propose de partir
75
de la base. Pour nommer, il faut apprendre à lire, par une méthode alphabé-
tique qui construira progressivement le nom des choses, qui permettra de si-
tuer le sujet, le verbe et le complément d'objet dans la phrase, clé d'une
bonne mémorisation. Puis viendra la conjugaison où interviennent je, tu, il et
elle, nous vous, ils et elles. Le "Je" construit l'individu, il se sent "être" et peut
ainsi se situer dans le monde... et prendre du recul.
https://www.savoir-apprendre.com/
75
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /186 189
Conclusion!
Le principe de la Liberté est d'éduquer les gens. Le principe de la
Tyrannie est de les laisser dans l'ignorance
(Robespierre, qui fut à l'origine de la devise de la France!; "Liberté,
Egalité, Fraternité", qui milita pour l'abolition de la peine de mort et
pour la libération des esclaves)
Prendre du recul passe par le temps pour être "Je", pour penser, par la culture, le sa-
voir, la loi, la liberté, l'égalité, la fraternité, la laïcité et la dignité.
La pauvreté, l'économie de survie, ne donnent pas le temps de penser. La lutte contre
la pauvreté devrait être la priorité d'un gouvernement digne.
L'autodafé de livres, la destruction des biens culturels, sont des actes de guerre, d'in-
tolérance, d'imbécilité, d'indignité.
L'encouragement à la diversité culturelle élève l'intelligence. De plus haut, on voit
mieux, on peut prendre du recul devant le sacré, devant l'atavisme.
La leçon des choses est immense, elle apprend la cohérence, et force l'intelligence.
La loi, lorsqu'elle est produite par la démocratie, détoxique la société. Elle restreint la
liberté, mais elle permet la sérénité des rapports entre les hommes. Les lois, dans une
société, sont la condition de la coexistence des libertés. Beaucoup de dictateurs sont
arrivés au pouvoir par des élections démocratiques, mais leurs électeurs n'ont pas
compris leur toxicité. Pour endiguer leur prise de pouvoir, il faut d'abord que la
conscience civique de tous puisse prendre du recul et que les institutions existantes
aient de forts contre-pouvoirs.
La liberté ne peut s'envisager que dans la cohérence.
L'égalité, c'est le contraire de l'inégalité. Une société inégale ne fait pas le bonheur.
En général, les inégalités croissent avec le temps. Aujourd'hui, les multinationales sont
plus puissantes que les Etats. Le retour à la démocratie semble impossible, à moins
qu'une lame de fond révolutionnaire casse le système, au prix de grandes souffrances.
La fraternité, c'est la solidarité à tous les niveaux. Les plus pauvres sont les plus soli-
daires et les nantis luttent pour leurs avantages acquis.
La laïcité est un effort de tous les instants. La frontière entre religion (atavisme) et
secte (captation) est floue. Seule une forte culture philosophique permet le recul né-
cessaire face au mystère de la vie et de la mort.
La dignité, celle de soi et celle des autres, devrait être le principe conducteur pour
que l'homme prenne du recul, du premier amour (conception) à la fin de vie. Encore
faut-il qu'elle soit enseignée.
Prendre du recul est difficile. C'est souvent une remise en cause de soi-même. Au ni-
veau collectif, il s'agit de la fabrication de l'intelligence dans les écoles, dans les me-
dia et dans les associations tout autant que l'élaboration du droit en tant que garde-
fous et maintien de la dignité humaine.
Quand le peuple sera intelligent, alors seulement le peuple sera souverain.
(Victor Hugo)
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /187 189
Post Scriptum
P.S. 2024 :
Environ 1 milliard d’hommes disent qu’ils croient que Dieu a créé
l’homme à son image. Je pense que c’est plutôt l’homme qui a, dans
son inconscient (quoique ? ), inventé un Dieu à son image.
Dans une croyance, il ne semble pas pertinent de revisiter l’Histoire.
L’univers est une une richesse infinie, d’une diversité infinie. Le Beau
ne peut être absolu. Il s’entend par rapport au Laid, sachant que la
notion de beau est subjective. Chacun perçoit le beau et le laid selon
sa propre histoire. La diversité humaine est ontologique.
L’instant de la singularité technologique est défini de plusieurs fa-
çons. Une façon de définition serait que le jour les prothèses que
l’homme aura construites auront la faculté de manipuler la
conscience humaine sur un nombre suffisant d’humains, le monde ne
sera plus le monde. A brève échéance, cette singularité devrait
conduire à l’implosion. La probabilité que cette singularité soit posi-
tive pour le genre humain semble infime. Il faudrait que ces pro-
thèses soient capables de contenir les addictions, en particulier l’ad-
diction au pouvoir.
A propos du Big Bang : en 1934, le Chanoine belge Georges Le-
maitre proposait l'hypothèse d'un Big Bang initié il y a 13 milliards
d’années. Pour ce chercheur la densité de mille milliards de kg par
cm3 était intenable, conduisant à une explosion incommensurable
générant un univers en expansion (décalage vers le rouge du rayon-
nement des objets astrophysiques existants) (fond diffus cosmolo-
gique). A noter que Einstein, qui penchait pour un univers en état
stationnaire, a ajouté à ses équation une constante cosmologique qui
n'a pas lieu d'être si l'on considère notre Univers comme dyna-
mique. A noter aussi que Pie XII a voulu récupérer le Big Bang
pour en faire une créature de Dieu, mais le chanoine Lemaitre l’a
convaincu qu’il ne fallait pas entremêler science et religion.
Il me plait d’imaginer (hors de toute science) que cette «!boule initiale!»,
trop immensément lourde a explosé, et que l’expansion continuera jus-
qu’à ce que les trous noirs, théorisés par nos astrophysiciens, se re-
joignent pour à nouveau reformer cette boule immensément lourde, qui
à nouveau explosera : ainsi notre Univers serait un cycle qui a commen-
cé éternellement avant et qui se continuera éternellement après.
Pérégrinages philosophiques - avril 2025 - page /188 189
P.S. 2025
Absurde
L'absurdité des guerres, qui n'ont laissé que des vaincus, du sang, des larmes
et des ruines, vaut bien que l'on s'y penche.
Russel (celui de la théière), Tolstoï, et bien d'autres pacifiques ou pacifistes se
sont penchés sur cette toxique absurdité qui saisit tant de va-t-en-guerres, la
fleur au fusil.
Le lecteur intéressé et responsable du monde pourra lire ici ce que l'obscur ci-
toyen que je suis en pense :
http://ertia2.free.fr/niveau2/nouvelles/livres/absurde.html
Jean Meslier
76
Le curé d'Etrépigny, village de 300 habitants à 10 km de Charleville-Mézières
a écrit un "testament" pour que ses ouailles puissent le lire après sa mort, crai-
gnant le pire de son vivant.
Grâce aux Wikipédistes, nous en avons une analyse intéressante :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Meslier
Grâce à Voltaire et à Google book, nous en avons copie :
https://play.google.com/books/reader?id=h6MFAAAAQAAJ&pg=GBS.PA28&hl=fr
J'ai appris le mot "christicole"
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Meslier
76
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