L'Esperanto, ça marche !
J'entends déjà vos préjugés. Au fait ! Etes-vous sûr de savoir de quoi il en retourne ? Savez-vous par exemple que l'Esperanto est la langue maternelle de certains enfants, qu'elle est reconnue officiellement par l'ONU depuis 1975, que pas moins de 70 millions de personnes de plus de cent pays se sentent concernées par cette passerelle entre les peuples, que plus de cent périodiques sont édités en Esperanto, sans compter les périodiques de plus de trois mille associations, que cette langue se développe activement en Chine, que des congrès internationaux en Espéranto sont fréquents ? Bref, l'Esperanto est une langue vivante, même si vous imaginiez le contraire.
Mais
qu'est-ce donc que cette langue dont Tolstoï disait qu'il lui avait fallu à
peine trois heures pour apprendre à la lire, qu'un Japonais a pu parler
couramment en trois mois, que les enfants des écoles apprennent trois fois plus
rapidement qu'une autre langue étrangère, qui intéresse les informaticiens
grâce à sa rigueur et sa cohérence ?
Cette
langue est l'une parmi les milliers de tentatives de langue universelle qui ont
eu une existence plus ou moins éphémère (souvenez-vous du Volapuk ! ). Conçue
par un certain Zamenhof vers 1880, elle est la seule à subsister au travers des
conflits mondiaux, sans doute du fait de quelque idées géniales .
Ainsi,
les racines de l'Esperanto proviennent
de pays différents, du Danemark au Japon pour que chaque espérantiste possède
un point d'appui sur sa propre culture. La charge de mots à mémoriser est plus
légère. Vos rudiments d'anglais et d'allemand ou d'italien vous servirons
d'autant plus. Le nombre de racines n'est pas limité, chaque année les
dictionnaires espérantistes s'enrichissent d'un vocabulaire glané au fil des
évolutions technologiques ou de l'intégration de cultures nouvelles.
Une
autre idée est d'avoir développé une grammaire, une syntaxe et une
prononciation qui sont un exemple de cohérence. Grammaire et syntaxe ne sont
pas embarrassées des éternelles exceptions qui confirment la règle, et ne
comportent que les règles nécessaires pour éviter les ambiguïtés et pour
satisfaire tous les aspects du langage.
Ainsi,
un anglais qui traduira Shakespeare en Esperanto fera ressortir les nuances
ressenties par tout bon Anglais. Ces nuances seront alors accessibles à tout
bon espérantiste de langue française. On voit l'intérêt de l'Espéranto pour la
défense et la sauvegarde de toutes les cultures, y compris les plus faibles,
face à une langue comme l'anglais qui impose en même temps les modes de pensée
et de vie occidentaux. Plus de 10 000 ouvrages littéraires du monde entier sont
ainsi traduits et chaque année ce volume s'accroît, permettant au plus grand
nombre de goûter au plus près du texte original les aventures de Don Quichotte,
la Bible ou les écrits de Confucius ou encore des textes directement écrits en
Espéranto.
La
cohérence grammaticale et syntaxique et le fond de racines indo-européennes
rendent l'apprentissage de la langue facile et agréable. Quelque cours
suffisent pour la compréhension du langage courant parlé. Les écrits peuvent
être facilement traduits à l'aide d'un dictionnaire lorsqu'il s'agit d'un texte
un peu spécialisé. A l'inverse, s'il faut un certain entraînement pour
s'exprimer couramment, traduire un texte en Esperanto sans naïvetés ni
contresens ne présente aucune difficulté.
Cette
clarté de la langue a incité les scientifiques a déclarer, dès 1920,
l'Espéranto comme langue scientifique internationale, même si sur la scène
internationale une science ne peut guère être reconnue s'il elle n'est pas
passée sous les fourches caudines de l'Amérique. Cet état de fait doit-il
continuer ? A l'ère du pluralisme politique, racial, culturel, ne pourrait-on
rajouter le pluralisme des langues véhiculaires, plutôt que de laisser
s'instaurer une situation de monopole de la langue anglaise, reflet d'une
certaine hégémonie culturelle?
Au-delà
de cette "utopie pour citoyen du monde", il s'agit pour l'Espéranto
d'être utile au travers d'un réseau d'espérantistes. Si vous souhaiter visiter
la Chine , sachez qu'il vous suffira de parcourir les petites annonces espérantistes pour trouver des
correspondants qui vous recevront avec plaisir, pour vous guider et vous faire
respirer leur pays. Si vous envisagez un stage de longue durée en Suède, vous
pourrez partir avec de nombreuses adresses de gens qui parleront la même langue
et dont certains seront probablement dans votre branche professionnelle.
Pour
être encore plus concret, je propose à tous ceux qui m'en feront la demande de
leur traduire en Esperanto les résumés de leur études susceptibles d'être
publiées. Ce petit travail peut être l'amorce d'une passerelle personnalisée
avec des correspondants étrangers.
Vous
m'en voudriez sans doute si je ne terminais pas ce plaidoyer par quelques mots
d'Espéranto. Le meilleur exemple de la richesse de cette langue est sans doute
cette triple traduction d'un poème qui nous appartient :
Sanglots Français |
Pleurs espérantistes
|
|
1ére
manière |
2ème
manière |
3ère
manière |
|
|
|
|
Chanson d'automne |
Aùtuna
kanteto |
Aùtuna
kanto |
Aùtuna
kanto |
Les
sanglots longs |
La longa plorado |
Dum gheme
sona |
La velksezon' |
Des
violons |
De
la violonoj |
La
violona |
Per
violon' |
De
l'automne |
De
l'aùtuno |
Aùtuna spir' |
Ghemo sona |
Blessent
mon coeur |
Vundadas
la koron |
Premighas
choro |
Vundas
che l'kor' |
D'une
langueur |
Al mi per langvoro |
De
monotona |
Min
per langvor' |
Monotone. |
Unutona. |
Sopir' |
Monotona. |
|
|
|
|
Tout
suffocant |
Sufoke
premata |
Ighante
pala |
Sufoke
nun |
Et
blême quand |
kaj pala kiam |
Che
la metala |
Kaj
pale dum |
Sonne
l'heure, |
Batas
horo, |
Horo-sonor' |
Tintoj horaj |
Je
me souviens |
Mi ree memoras |
De
l' rememoro |
Memoras
mi |
Des
jours anciens |
La
tagojn iamajn |
Iras kun ploro |
Kaj
ploras pri |
Et
je pleure. |
Kaj
mi ploras |
Mi
for. |
Tagoj
foraj. |
|
|
|
|
Et
je m'en vais |
Kaj mi foriradas |
La
vento blovas |
Mi vagas, jen |
Au
vent mauvais |
En
venton malbonan, |
Kaj for min shovas, |
Zigzagas
en |
Qui
m'emporte |
Kiu pelas |
Kaj estas mi |
Vento forta |
deçà, delà, |
Chi tien kaj tien |
Kiel
falinta |
Kun
svena fal' |
Pareil
à la |
Min kiel folion |
Kaj flavinghinta |
Simile al |
Feuille
morte. |
Flave
sekan. |
Foli'. |
Brancho morta. |
VERLAINE |
(Trad. M. Pagnier) |
(Trad.
Grabowski) |
(Trad.
Kalocsay) |